Contenu de la décision
Office de la propriété intellectuelle du Canada
LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE
Référence : 2023 COMC 069
Date de la décision : 2023-04-18
[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45
Partie requérante : Finlayson et Singlehurst
Propriétaire inscrite : Alcon Inc.
Enregistrement : LMC412,177 pour FRESH LOOK
Introduction
[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T‑13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC412,177 pour la marque de commerce FRESH LOOK (la Marque) enregistrée pour emploi en liaison avec des [traduction] « lentilles de contact jetables » (les Produits).
[2] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être maintenu.
La procédure
[3] À la demande de Finlayson & Singlehurst (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi le 9 novembre 2021 à la Propriétaire inscrite de la Marque, Alcon Inc. (la Propriétaire).
[4] L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard des produits, si la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, de préciser la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la Période pertinente pour démontrer l’emploi est du 9 novembre 2018 au 9 novembre 2021 (la Période pertinente). En l’absence d’emploi, l’enregistrement est susceptible d’être radié, à moins que le défaut d’emploi ne soit en raison de circonstances spéciales.
[5] La définition pertinente d’emploi en l’espèce est énoncée à l’article 4(1) de la Loi en ces termes :
Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.
[6] Le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». Dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45, la preuve n’a pas à être parfaite; la Propriétaire doit seulement présenter une preuve prima facie d’emploi au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Ce fardeau de preuve à atteindre est bas; il suffit que les éléments de preuve établissent des faits à partir desquels une conclusion d’emploi peut logiquement être inférée [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc., 2010 CF 1184].
[7] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Vanessa Johari-Hansen, souscrit le 2 juin 2022, y compris les Pièces A à D.
[8] Les deux parties ont produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.
La preuve
[9] Mme Johari-Hansen est directrice du marketing, Vision Care, d’Alcon Canada Inc. (Alcon Canada), une filiale en propriété exclusive de la Propriétaire.
[10] Mme Johari-Hansen déclare que la Propriétaire a acquis la Marque de Novartis AG par l’entremise d’une cession nunc pro tunc de la Marque à compter du 8 avril 2019, laquelle cession a été enregistrée à l’égard de l’enregistrement le 27 septembre 2019. Le registraire a le pouvoir discrétionnaire de vérifier l’état du registre [True Software Scandinavia AB c Ontech Technologies Inc., 2018 COMC 40] et j’ai exercé ce pouvoir pour confirmer qu’un changement dans le titre en faveur de la Propriétaire a été enregistré le 27 septembre 2019.
[11] Mme Johari-Hansen ajoute que la Propriétaire distribue ses produits au Canada par l’entremise d’Alcon Canada. Elle affirme également qu’Alcon Canada est titulaire d’une licence de la Propriétaire lui permettant d’utiliser la Marque au Canada en liaison avec les Produits et que la Propriétaire assure le soin et le contrôle sur la nature et la qualité des Produits en liaison avec lesquels la Marque est employée au Canada.
[12] Mme Johari-Hansen déclare que la Propriétaire a vendu les Produits au Canada en liaison avec la Marque pendant la Période pertinente par l’entremise de divers détaillants canadiens en ligne, comme Clearly et par l’entremise de distributeurs canadiens comme Essilor Luxottica Canada, Inc. À l’appui, elle fournit les pièces suivantes :
a) Pièce A – une copie imprimée du site Web de Clearly au clearly.ca montrant l’emballage des Produits, qui affiche FRESHLOOK (c.-à-d. un mot). Mme Johari‑Hansen indique que l’imprimé est représentatif de la façon dont les Produits affichant la Marque étaient offerts dans le catalogue de produits disponible sur le site clearly.ca au Canada pendant la Période pertinente.
b) Pièce B – image de l’emballage des Produits, étiquetée [traduction] « lentilles de contact journalières FreshLook ONE-DAY COLOR ». Mme Johari-Hansen dit que l’image est représentative de l’emballage utilisé pour les Produits vendus au Canada pendant la Période pertinente.
c) Pièce C – une copie d’une facture datée du 16 septembre 2020, d’Alcon Canada à Essilor Luxottica Canada, Inc., Division Clearly, avec une adresse à Vancouver (Colombie-Britannique). La facture présente plusieurs entrées pour FRESHLOOK 1D (que je conclus être une référence à FRESHLOOK ONE DAY) pour une valeur totale supérieure à 12 000 $.
d) Pièce D – un guide des paramètres d’Alcon de 2020 distribué par Alcon Canada aux ophtalmologistes canadiens pour utilisation dans la prescription de lentilles cornéennes à leurs patients. Le Guide répertorie les lentilles de contact FreshLook journalières sous la rubrique [traduction] « lentilles de beauté ».
Analyse et motifs de la décision
[13] La Partie requérante fait valoir que la preuve ne démontre pas l’emploi de la Marque telle qu’elle est enregistrée (c.-à-d. FRESH LOOK en deux mots); la preuve montre plutôt que FRESHLOOK est utilisé en un mot.
[14] La Partie requérante fait également valoir que la Propriétaire n’est pas autorisée à faire valoir que la preuve d’emploi de la marque FRESHLOOK constitue un emploi de la Marque et fait valoir des faits qui ne figurent pas dans la preuve dans la présente affaire, à savoir que la Propriétaire détient l’enregistrement no LMC927,940 pour la marque FRESHLOOK (en un mot). Tous ces observations seront écartées [Ridout & Maybee LLP c Encore Marketing International Inc (2009), 72 CPR (4th) 204 (COMC)] – je dois trancher cette affaire en fonction des preuves qui me sont présentées dans le cadre de la procédure.
[15] La question que je dois trancher est de savoir si la Marque est demeurée reconnaissable malgré les différences entre la forme sous laquelle elle a été enregistrée (deux mots) et celle sous laquelle elle a été employée (un mot) [Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull SA (1985), 4 CPR (3d) 523 (CAF)]. Pour trancher cette question, il faut se pencher sur la question de savoir si les « traits dominants » de la Marque ont été préservés [Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF)]. L’évaluation de la question de savoir si tous les éléments sont des traits dominants et si l’écart est suffisamment mineur pour permettre de conclure qu’il y a emploi de la Marque telle qu’elle a été déposée est une question de fait qui doit être tranchée au cas par cas.
[16] En comparant FRESH LOOK et FRESHLOOK, l’impression générale créée par FRESH LOOK n’est pas perdue, et FRESH LOOK n’a pas perdu son identité en raison de l’absence d’espace entre les deux mots. La Marque demeure reconnaissable et la caractéristique dominante de la Marque, à savoir que les mots FRESH et LOOK en combinaison sont toujours présents (l’espace entre les deux mots n’est pas une caractéristique dominante de la Marque). La caractéristique dominante ayant été préservée, je conclus que l’affichage de FRESHLOOK constitue un affichage de la Marque.
[17] Je suis également convaincu que les produits ont été vendus au Canada pendant la Période pertinente dans des emballages qui affichaient la Marque.
[18] Mme Johari-Hansen déclare qu’Alcon Canada a été autorisée par la Propriétaire à utiliser la Marque, sous réserve des soins et du contrôle de la Propriétaire quant à la nature et à la qualité des produits vendus en liaison avec la Marque. D’après son témoignage, je suis convaincu qu’une licence était en place et que le contrôle requis a été exercé [Empresa Cubana Del Tobaco Trading c Shapiro Cohen, 2011 CF 102]. Par conséquent, je suis convaincu que l’emploi de la Marque par Alcon Canada constitue un avantage pour la Propriétaire en vertu de l’article 50 de la Loi.
[19] De plus, la preuve démontre que la Marque était apposée sur l’emballage dans lequel les Produits ont été vendus au Canada (Pièce B).
[20] Enfin, la preuve démontre qu’il y a eu une vente des produits au Canada pendant la Période pertinente, soit le 16 septembre 2020 (après l’inscription de la cession) d’Alcon Canada à Essilor Luxottica Canada, Inc., Division Clearly.
[21] La preuve d’une seule vente peut suffire pour établir l’emploi aux fins d’une procédure en vertu de l’article 45, pour autant qu’elle présente les caractéristiques d’une opération commerciale authentique et qu’elle ne soit pas perçue comme ayant été délibérément fabriquée ou inventée en vue de protéger l’enregistrement [Philip Morris Inc c Imperial Tobacco Ltd (1987), 13 CPR (3d) 289 (CF 1re inst)]. D’après l’ensemble de la preuve, je suis convaincu que la preuve d’une seule vente suit le modèle d’une véritable transaction commerciale.
[22] Par conséquent, je suis convaincu que la Marque a été employée au Canada par la Propriétaire en liaison avec les Produits au cours de la Période pertinente au sens des articles 4(1) et 45 de la Loi.
Décision
[23] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera maintenu selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.
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Robert A. MacDonald
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce
Office de la propriété intellectuelle du Canada
Traduction certifée conforme
Judy Gordian
Le français est conforme aux WCAG.
Comparutions et agents inscrits au dossier
DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue
AGENTS AU DOSSIER
Pour la Partie requérante : Finlayson & Singlehurst
Pour la Propriétaire inscrite : Miller IP Law