Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 084

Date de la décision : 2023-05-24

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : Shift Law Professional Corporation

Propriétaire inscrite : Apollo Motorhome Holidays Pty. Ltd.

Enregistrement : LMC696,963 pour APOLLO

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T‑13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC696,963 pour la marque de commerce APOLLO (la Marque) enregistrée pour emploi en liaison avec les produits et services suivants :

[traduction]

Cl 12 Véhicules automobiles terrestres, nommément autocaravanes et fourgonnettes de camping.

Cl 35 Services de vente en gros et au détail de véhicules motorisés de location, y compris d’autocaravanes et de fourgonnettes de camping.

Cl 37 Entretien, révision et réparation de véhicules automobiles, y compris d’autocaravanes et de fourgonnettes de camping.

Cl 39 Services de crédit-bail et de location de véhicules.

[2] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié.

La procédure

[3] À la demande de Shift Law Professional Corporation (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis en vertu de l’article 45 de la Loi à la propriétaire inscrite de la Marque, Apollo Motorhome Holidays Pty Ltd (la Propriétaire) le 16 mars 2021.

[4] L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement, si la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, de préciser la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 16 mars 2018 au 16 mars 2021 (la période pertinente). En l’absence d’emploi, un enregistrement est susceptible d’être radié, à moins que le défaut d’emploi ne soit attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient.

[5] Le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». À ce titre, le niveau de preuve est peu élevé [Performance Apparel Corp c Uvex Toko Canada Ltd, 2004 CF 448] et une surabondance d’éléments de preuve n’est pas requise [Union Electric Supply Co c Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)]. Néanmoins, il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la Marque a été employée en liaison avec les produits et services spécifiés dans l’enregistrement.

[6] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a fourni la déclaration solennelle de Tennille Carrier, la secrétaire d’entreprise de la Propriétaire, déclarée à Brisbane, en Australie, le 29 octobre 2021, accompagnée des Pièces 1 à 10 (la Déclaration).

[7] Les deux parties ont produit des observations écrites et étaient présentes à l’audience.

La preuve

[8] Mme Carrier indique que la Propriétaire, laquelle a été constituée à Queensland, en Australie, le 2 avril 1991, se spécialise dans la location, la vente et l’entretien de fourgonnettes de camping, avec sept succursales situées partout au Canada (para 5 et 6).

[9] Mme Carrier affirme que la Propriétaire offre ses [traduction] « services de location et de vente de fourgonnettes de camping de marque APOLLO » par l’entremise de son site Web à canadream.com, lequel associe la clientèle de la Propriétaire à ses sept [traduction] « lieux [physiques] de dépôt et de récupération de location de véhicules récréatifs partout au Canada » (para 7). En appui, elle fournit, à titre de Pièce 2, des imprimés du site Wayback Machine, tous semblant correspondre à la période pertinente. Elle décrit les imprimés comme des instantanés de la page d’accueil du site Web canadien de la Propriétaire lequel, selon ses affirmations, démontre l’emploi de la Marque de septembre 2018 à octobre 2021 (para 8).

[10] Les imprimés de la Pièce 2 sont de piètre qualité (comme c’est le cas de toutes les pièces) et la majorité du texte est illisible. J’ai transcrit ci-dessous le texte pertinent que je suis en mesure de lire (tous les numéros de page font référence aux numéros de page dans l’Affidavit) :

· Page 13 (en date du 14 septembre 2018) : La phrase [traduction] « Explorer plus loin avec les VR Apollo » apparaît dans le bas de la page. Lors de l’audience, la Propriétaire a fait référence à un autre texte qui figure sur cette page, mais, puisque je ne suis pas en mesure de lire l’autre texte dans les documents versés au dossier dont je dispose, je n’en ai pas pris compte.

· Page 14 (9 janvier 2019) : Le texte suivant apparaît dans le haut de la page : [traduction] « Une expérience des VR sans soucis avec une assistance routière 24 heures par jour 7 jours par semaine pour la durée de votre location »; [traduction] « Des emplacements pratiques avec sept sites de location de VR partout au Canada » et [traduction] « Des outils de planification de l’itinéraire pour améliorer votre expérience de vacances canadiennes en VR ». Dans le bas de la page, on peut voir ce qui suit : à la gauche, l’en-tête CANADREAM et le texte [traduction] « Imaginez la liberté de faire l’expérience du Canada en tant que notre invité, alors que vous traversez des paysages époustouflants à votre propre rythme et vous arrêtez où vous voulez, quand vous voulez »; au milieu, un menu d’articles qui comprend « Locations », [traduction] « Ventes de VR » et « Service »; et, dans le coin inférieur droit, la Marque placée au-dessus du texte [traduction] « Un membre de la famille d’autocaravanes de vacances d’Apollo ». Le même texte se retrouve dans le bas de la page 16 (en date du 9 janvier 2021), de la page 20 (en date du 2 mars 2021), de la page 24 (en date du 25 avril 2020) et de la page 28 (en date du 6 mars 2021).

· Page 15 (en date du 12 août 2020) : Le texte [traduction] « Acheter une caravane ou un VR » figure dans le haut de la page immédiatement au-dessus de la Marque. Lors de l’audience, la Propriétaire a fait référence à un autre texte qui figure sur cette page, mais, puisque je ne suis pas en mesure de lire l’autre texte dans les documents versés au dossier dont je dispose, je n’en ai pas pris compte.

· Pages 17 et 18 (en date du 2 mars 2021) : Dans le haut de la page 17 se trouve un menu d’articles incluant [traduction] « Locations de VR », [traduction] « Ventes de VR » et [traduction] « Entretien et pièces ». En dessous se trouve l’en-tête [traduction] « Au sujet de la société CanaDream ». Plus bas à la page 17 et continuant à la page 18, le texte suivant est présent :

[traduction]

CanaDream s’engage à fournir à nos invités une expérience de vacances en VR mémorable alors qu’ils font « l’expérience du Canada à leur propre rythme » dans une autocaravane CanaDream.

De ses débuts modestes dans les années 1990, CanaDream est devenue l’une des plus grandes entreprises de location et de vente de VR au Canada. La position de leadership de l’entreprise a été réalisée par une combinaison d’investissements dans des membres de l’équipe expérimentés et bien formés à tous les emplacements, de technologies propriétaires et de l’investissement, de la mise à niveau et de l’entretien en continu de ses systèmes et de son parc de VR. En 2017, CanaDream s’est joint au groupe d’entreprises Apollo Tourism & Leisure.

Bien que CanaDream soit établi au Canada, son parc de plus de 1 000 VR peut être vu sur les routes du Canada et des États-Unis. Les emplacements destinés aux invités et aux ventes de VR se retrouvent dans des villes offrant un large éventail d’expériences naturelles incroyables et comprennent Calgary et Edmonton (Alberta), Vancouver (Colombie-Britannique), Whitehorse (Yukon), Toronto (Ontario), Montréal (Québec) et Halifax (Nouvelle-Écosse).

Par ses parcs de location et de vente de VR, CanaDeam offre à ses invités et ses clients le moyen de découvrir leur propre parcelle du Canada. Bien que certains pourraient dire que CanaDream est une entreprise de location de VR, CanaDream préfère dire que son produit est le Canada et les souvenirs que ses invités et ses clients partagent avec leur famille et leurs amis de leur expérience du Canada à leur propre rythme dans un VR CanaDream.

CanaDream est fièrement Apollo, ce qui signifie que nous faisons partie d’un groupe mondial de location et de vente de VR. Avec notre siège social mondial à Brisbane, en Australie, vous verrez nos marques offrir un large éventail de fourgonnettes de camping et de VR adaptés à tout style et budget. Donc, lorsque vous pensez faire l’expérience de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, de l’Europe et de la Bretagne à votre propre rythme, pensez Apollo!

[11] Mme Carrier indique que la Marque a été employée à l’égard des services de réparation et d’entretien de fourgonnettes de camping sur canadream.com et elle fournit, à titre de Pièce 3, des imprimés du site Wayback Machine qu’elle décrit comme des instantanés de la page de services de réparation et d’entretien du site Web canadien de la Propriétaire et qui, selon ses affirmations, démontrent l’emploi de la marque d’avril 2020 à mars 2021 (para 9).

[12] La Pièce 3 est composée de sept pages. De nouveau, les imprimés sont de piètre qualité et la majorité du texte est illisible. J’ai transcrit ci-dessous le texte pertinent que je suis en mesure de lire :

· Page 22 (en date du 25 avril 2020) : Dans le haut de la page se trouve un menu d’articles incluant [traduction] « Locations de VR », [traduction] « Ventes de VR » et [traduction] « Entretien ». En dessous se trouve une référence à [traduction] « entretien » et [traduction] « prendre rendez-vous ». En dessous, le texte suivant apparaît au-dessus d’une liste de services et de réparations : [traduction] « CanaDream est heureux de fournir des services de réparation de VR, ainsi qu’un large éventail de pièces de VR ». Également sur la page se trouve une référence à [traduction] « prenez rendez-vous aujourd’hui » et [traduction] « planifiez votre rendez-vous d’entretien aujourd’hui ». Un numéro de téléphone avec l’indicatif 403 est fourni. Les pages 23 et 24 semblent être une continuation de la page 22.

· Page 25 (en date du 6 mars 2021) : Le texte suivant apparaît au-dessus d’un [traduction] « Menu d’entretien » : [traduction] « CanaDream est heureux d’offrir des services de réparation de VR, ainsi qu’un large éventail de pièces de VR » et [traduction] « Si vous êtes un client des ventes CanaDream, vous êtes admissibles à un rabais de 20 % sur les pièces et la main-d’œuvre. Veuillez le mentionner lorsque vous prenez votre rendez-vous d’entretien ». Les pages 26 à 28 semblent être une continuation de la page 25.

[13] Mme Carrier affirme que la Marque a été employée sur divers sites de diffusion et de médias sociaux, y compris YouTube et Facebook (para 10). À l’appui, elle fournit ce qui suit :

· Pièce 4 : Une capture d’écran d’une vidéo qui, selon les affirmations de Mme Carrier, a été diffusée sur YouTube le 18 juillet 2019 (para 11). La vidéo est intitulée [traduction] « Sécurité Apollo CanaDream 2019 – Anglais » et la Marque figure dans le coin supérieur gauche de la page 30 et dans le coin inférieur gauche de la page 31 (laquelle semble être une continuation de la page 30) à côté de la phrase [traduction] « Vacances en autocaravanes Apollo ». D’autres titres de vidéos sont visibles sur les deux pages : [traduction] « Sécurité Apollo CanaDream 2019 – Français », [traduction] « Sécurité Apollo CanaDream 2019 – Allemand » et [traduction] « Vacances familiales avec Apollo ».

· Pièce 5 : Une capture d’écran d’un billet sur la page Facebook de la Propriétaire qui, selon les affirmations de Mme Carrier, est en date du 14 avril 2019 (para 12). La Marque figure à côté de la phrase [traduction] « Vacances en autocaravanes Apollo » et fait également partie de [traduction] « Facile comme Apollo ». Elle apparaît également sur le côté du véhicule présenté sur la page Facebook.

[14] Mme Carrier affirme que la Marque a été employée, et a fait l’objet de promotion, par le blogue de la Propriétaire sur canadream.com (par 13). À l’appui, elle fournit ce qui suit :

· Pièce 6 : Un billet de blogue intitulé [traduction] « Les meilleurs endroits où patiner au Canada » en date de novembre 2019. La Marque figure dans le bas de la page 38, faisant partie de la phrase [traduction] « Entraîné par Apollo ».

· Pièce 7 : Un billet de blogue intitulé [traduction] « Planifier votre location de VR d’automne » en date de septembre 2020. La Marque figure dans le bas de la page 41, faisant partie de la phrase [traduction] « Entraîné par Apollo ».

· Pièce 8 : Un billet de blogue intitulé [traduction] « Quoi mettre dans ses bagages pour faire du VR d’été » en date de juin 2021. La Marque figure dans le bas de la page 46, faisant partie de la phrase [traduction] « Entraîné par Apollo ».

[15] Mme Carrier affirme que la Marque a été employée, et a fait l’objet de promotion, en arborant la Marque sur l’avant des fourgonnettes de camping de la Propriétaire louées ou vendues au Canada. Elle fournit à titre de Pièce 9 des photos du [traduction] « parc de fourgonnettes de camping [de la Propriétaire] qui sont louées et vendues au Canada et ailleurs dans le monde » (para 15). Les photos illustrent la Marque arborée sur le devant de divers véhicules.

[16] Enfin, Mme Carrier affirme que la Marque a été employée, et a fait l’objet de promotion, en l’arborant sur les articles de papeterie de la Propriétaire, dont des échantillons sont fournis à titre de Pièce 10 (para 16). Les échantillons comprennent les articles suivants :

· Des échantillons de papier à en-tête pour les emplacements en Alberta, en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec qui arborent CanaDream dans le coin supérieur gauche et, dans le coin supérieur droit sous l’adresse, le texte [traduction] « Une filiale d’Apollo ». Dans le bas de la page se trouve le texte [traduction] « Locations et ventes de VR CanaDream ».

· Des échantillons d’enveloppes arborant CanaDream à la gauche et, à la droite, le texte [traduction] « Une filiale d’Apollo ». Le texte [traduction] « Locations et ventes de VR CanaDream » figure au-dessus de l’adresse.

· Des échantillons de cartes professionnelles qui arborent CanaDream au-dessus du texte [traduction] « Une filiale d’Apollo ».

Motifs de la décision

[17] Dès le départ, je veux aborder deux questions relatives à la preuve.

[18] D’abord, lors de l’audience, j’ai remarqué que les Pièces 7 et 9 dans ma copie de la Déclaration n’étaient pas notariées. Puisque la Partie requérante n’a soulevé aucune objection aux pièces et, compte tenu du but et de l’intention de l’article 45 ainsi que du fait que Mme Carrier a décrit les pièces dans la Déclaration, j’accepte les pièces comme faisant partie de la preuve.

[19] Deuxièmement, la Partie requérante a souligné que Mme Carrier a indiqué une période pertinente erronée de mars 2018 au 15 octobre 2021, ce qui rend la preuve contenue dans sa déclaration ambiguë. Bien qu’il y ait une description erronée de la période pertinente, je n’estime pas que cela soit problématique lorsque la preuve est lue dans son ensemble, compte tenu particulièrement du fait que bon nombre des pièces fournies par Mme Carrier sont en date de la période pertinente.

[20] En ce qui a trait aux questions liées à la substance soulevées par la Partie requérante, j’ai gardé à l’esprit que la preuve dans une procédure en vertu de l’article 45 doit être considérée dans son ensemble, et le fait de se concentrer sur des éléments de preuve individuels n’est pas la bonne approche [Kvas Miller Everitt c Compute (Bridgend) Limited (2005), 47 CPR (4th) 209 (COMC); Fraser Milner Casgrain LLP c Canadian Distribution Channel Inc (2009), 78 CPR (4th) 278 (COMC)]. De plus, la preuve fournie permet raisonnablement de tirer des inférences [Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64]. Enfin, en l’absence d’une preuve contraire, il convient d’admettre sans réserve les déclarations faites par un déposant et d’accorder une crédibilité substantielle aux déclarations contenues dans un affidavit produit dans le cadre de la procédure en vertu de l’article 45 [Oyen Wiggs Green & Mutala LLP c Atari Interactive Inc, 2018 COMC 79].

Produits

[21] La définition pertinente d’emploi est énoncée à l’article 4(1) de la Loi comme suit :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[22] La Partie requérante observe que Mme Carrier ne fournit aucune preuve, autres que de simples affirmations, pour démontrer l’emploi de la Marque au Canada en liaison avec les produits inscrits dans l’enregistrement (c.-à-d. véhicules automobiles terrestres, nommément autocaravanes et fourgonnettes de camping). En particulier, la Partie requérante observe que la Propriétaire n’a fourni aucune preuve pour démontrer que la Propriétaire a réalisé de quelconques ventes de produites au Canada dans la pratique normale du commerce au cours de la période pertinente.

[23] La preuve de Mme Carrier est que la Propriétaire [traduction] « se spécialise dans la location, la vente et l’entretien » (au para 6). Elle continue en affirmant que la Propriétaire [traduction] « offre ses services de location et de vente de fourgonnettes de camping de marque APOLLO par l’entremise de son site Web CanaDream » (au para 7). Elle affirme également que la Marque [traduction] « a été employée, et a fait l’objet de promotion, directement par l’emploi de son image de marque APOLLO appliquée à l’avant de ses fourgonnettes de camping, lesquelles sont soit louées, soit vendues partout au Canada » (au para 15). Mme Carrier décrit les photos à la Pièce 9 comme étant du [traduction] « parc de fourgonnettes de camping [de la Propriétaire] qui sont louées et vendues au Canada et ailleurs dans le monde ». Enfin, il y a des références à [traduction] « Ventes de VR » et [traduction] « Achetez une caravane ou un VR » sur le site Web canadien de la Propriétaire comme l’illustrent les Pièces 2 et 3.

[24] Il est bien établi qu’« offrir en vente » n’est pas la même chose que « vendre » [voir Michaels & Associates c WL Smith & Associates Ltd (2006), 51 CPR (4th) 303 (COMC)] et que l’annonce à elle seule est insuffisante pour démontrer l’emploi d’une marque de commerce conformément à l’article 4(1) de la Loi [voir Riches, McKenzie & Herbert LLP c Cleaner’s Supply Inc, 2012 COMC 211].

[25] Bien qu’il ne soit pas obligatoire de produire des factures pour répondre de façon satisfaisante à un avis prévu à l’article 45 [Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst)], une certaine preuve qu’un transfert a eu lieu dans la pratique normale du commerce au Canada est nécessaire [John Labatt c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)]. Une telle preuve peut prendre la forme de documents comme des factures et des rapports de vente, mais elle peut aussi être obtenue à l’aide de déclarations assermentées claires concernant des volumes de ventes, la valeur en dollars des ventes ou des données factuelles équivalentes [voir, par exemple, 1471706 Ontario Inc c Momo Design srl, 2014 COMC 79].

[26] La preuve d’un transfert des produits dans la pratique normale du commerce au Canada au cours de la période pertinente, ou en effet à tout moment, n’est pas présente en l’espèce : la Propriétaire n’a fourni aucun document ou aucune information quant aux ventes, soit en termes de valeur en dollars, soit en termes d’unités vendues. De plus, les déclarations de Mme Carrier sont ambiguës. Comme il est indiqué ci-dessus, elle affirme que la Marque [traduction] « a été employée, et a fait l’objet de promotion, directement par l’emploi de son image de marque APOLLO appliquée à l’avant de ses fourgonnettes de camping, lesquelles sont soit louées, soit vendues partout au Canada » et elle décrit les photos à la Pièce 9 comme étant du [traduction] « parc de fourgonnettes de camping [de la Propriétaire] qui sont louées et vendues au Canada et ailleurs dans le monde » [mon soulignement]. Ces déclarations ne correspondent pas à des déclarations assermentées claires démontrant un transfert des produits dans la pratique normale du commerce au Canada au cours de la période pertinent.

[27] EN réponse, la Propriétaire observe que l’enregistrement visant les produits devrait être maintenu puisqu’il y a une déclaration assermentée de la part de Mme Carrier que les produits étaient vendus, associée à des photos des produits. La Propriétaire invoque les deux affaires suivantes pour appuyer son observation que rien de plus n’est requis : Digital Attractions Inc c LNW Enterprises Ltd (2007), 64 CPR (4th) 418 (COMC) et Jebsen & Co c Molson Breweries, A Partnership (1997), 78 CPR (3d) 568. Cependant, je note que dans les deux affaires, des volumes de ventes ont été fournis dans la preuve; autrement dit, la preuve contenait plus que simplement des déclarations assermentées de ventes et des photos.

[28] Par conséquent, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les produits précisés dans l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Comme je ne dispose d’aucune preuve de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Services

[29] La définition pertinente d’« emploi » est énoncée à l’article 4(2) de la Loi comme suit :

Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[30] La présentation d’une marque de commerce dans l’annonce des services est suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2) de la Loi, du moment que le propriétaire de la marque de commerce est prêt et en mesure d’exécuter les services au Canada [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[31] La Partie requérante observe que Mme Carrier ne fournit aucune preuve pour démontrer que la Propriétaire a employé la Marque au Canada en liaison avec les services inscrits dans l’enregistrement au cours de la période pertinente.

[32] D’abord, la Partie requérante observe que la simple existence du site Web archivé n’est pas suffisante pour établir que le site Web a été consulté par des Canadiens au cours de la période pertinente et que, en l’absence de preuve que le site Web a été consulté par des consommateurs au Canada, le site Web ne constitue pas la publicisation aux fins de l’article 4. À cet égard, la Partie requérante invoque Barrette Legal Inc c 1811350 Alberta Ltd, 2019 COMC 80, où le registraire a soutenu ce qui suit (aux para 28 et 29) :

En ce qui concerne le matériel promotionnel publié en ligne, il est vrai que les pages Web, à la différence des publicités imprimées, ne peuvent pas être physiquement distribuées, mais elles doivent tout de même être [traduction] « distribuées auprès » de clients potentiels ou consultées par des clients potentiels pour constituer une annonce […] Une déclaration claire en ce sens peut constituer une preuve de distribution suffisante ou, à défaut, une certaine preuve permettant raisonnablement d’inférer que des clients ou des clients potentiels ont consulté les pages Web peut suffire. Cependant, la simple existence de pages Web archivées n’est pas suffisante pour établir que ces pages Web ont été consultées par des Canadiens pendant la période pertinente.

À la différence, par exemple, d’un panneau d’affichage situé près d’une autoroute, on ne peut pas présumer qu’un site Web a été vu par le public. Ainsi, un site Web s’apparente davantage à une brochure qui a été imprimée sans être véritablement distribuée ou à une ancienne coupure de journal. Le simple fait qu’un tiers puisse mettre la main sur une telle brochure ou une telle coupure de journal ne constitue pas en soi une preuve d’annonce; il doit également exister une certaine preuve que la brochure ou le journal en question a été activement distribué auprès de Canadiens pendant la période pertinente […]

[33] Le registraire a continué en concluant au para 30 :

En l’espèce, même si j’admets que le site Web de la Propriétaire semble cibler les Canadiens, il n’y a aucune preuve que des Canadiens ont déjà consulté les pages Web jointes à l’affidavit Chen. De même, il n’y a aucune preuve que des personnes se sont véritablement prévalues de l’un quelconque des services de la Propriétaire pendant la période pertinente. Il n’y a pas non plus d’autres renseignements sur les activités commerciales de la Propriétaire ou sur la façon dont la Propriétaire a, dans les faits, exécuté les services visés par l’enregistrement après avoir fait l’acquisition de la Marque, dont on pourrait tirer des inférences favorables à la Propriétaire. À titre d’exemple, si des renseignements avaient été fournis au sujet des ventes, des quantités de bouteilles expédiées ou des membres de la Propriétaire pendant la période pertinente, il aurait pu être raisonnable d’inférer que le site Web de la Propriétaire a été consulté par au moins certains des membres du club pendant cette période. Or, M. Chen n’indique même pas clairement dans son affidavit si le club comptait des membres actifs pendant la période pertinente. [mon soulignement]

[34] La situation en l’espèce diffère de la situation dans Barrette. Bien qu’il n’y ait rien pour indiquer si des Canadiens ont consulté les pages Web en question, nous avons des renseignements quant aux activités commerciales de la Propriétaire. En particulier, nous avons la déclaration de Mme Carrier que la Propriétaire [traduction] « se spécialise dans la location, la vente et l’entretien de fourgonnettes de camping […] avec sept succursales situées partout au Canada » (au para 6) et la déclaration que la Propriétaire [traduction] « offre ses services de location et de vente de fourgonnettes de camping de marque APOLLO par son site Web CanaDream », lequel dirige les clients vers l’un des sept emplacements physiques de dépôt et de récupération de location de VR (au para 7). Le lieu des emplacements physiques de la Propriétaire est indiqué sur le site Web (pages 17 et 19) et sur les articles de papeterie (Pièce 10); le papier à en-tête fait également référence à la location et à la vente de VR. Enfin, nous avons la déclaration que la Marque [traduction] « a été employée, et a fait l’objet de promotion, directement par l’emploi de son image de marque APOLLO appliquée à l’avant de ses fourgonnettes de camping, lesquelles sont soit louées, soit vendues partout au Canada » (au para 15 et à la Pièce 9); voir également la présentation de la Marque sur le côté du véhicule présenté sur la page Facebook (Pièce 5).

[35] En lisant la preuve dans son ensemble, je suis convaincu que la Propriétaire était en position d’exécuter les services à ses sept emplacements physiques partout au Canada. À partir de cela, il est raisonnable de conclure que le site Web de la Propriétaire aurait bénéficié à tout le moins d’un certain achalandage au cours de la période pertinente par des consommateurs voulant en savoir plus au sujet de l’entreprise de location ou de vente de la Propriétaire ou prendre un rendez-vous d’entretien.

[36] Deuxièmement, la Partie requérante observe que la Marque n’est pas arborée de façon à faire la liaison entre la Marque et les services offerts, puisque la Marque figure seulement dans le coin inférieur droit et n’est pas mise en évidence. Lors de l’audience, la Partie requérante a observé que le consommateur moyen ne percevrait pas la Marque comme indiquant la source des services offerts, puisque la marque de commerce dominante sur les pages Web est CANADREAM.

[37] Je n’accepte pas l’observation de la Partie requérante pour deux raisons :

a) D’abord, rien dans la Loi n’empêche un propriétaire de marque de commerce d’employer plus d’une marque de commerce en même temps [AW Allen Ltd c Warner-Lambert Canada Inc (1985), 6 CPR (3d) 270 (CF 1re inst)].

b) Deuxièmement, la prétention de la Partie requérante selon laquelle le consommateur ne percevrait pas la Marque comme indiquant la source est liée à la question du caractère distinctif, qui ne se pose pas dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45 [voir United Grain Growers Ltd c Lang Michener, 2001 CAF 66]. Il faut déterminer si des faits suffisants ont été fournis pour me permettre de conclure à l’emploi de la Marque par la Propriétaire, au sens de l’article 4(2) de la Loi, en liaison avec les services pendant la période pertinente.

[38] La Partie requérante note également que la preuve fait référence sur une page Web à la société CanaDream et, sur les articles de papeterie, à [traduction] « une filiale d’Apollo ». Cependant, Mme Carrier indique clairement que la Propriétaire offre ses [traduction] « services de location et de vente de fourgonnettes de camping de marque APOLLO » par l’entremise de son site Web à canadream.com, lequel associe la clientèle de la Propriétaire à ses sept [traduction] « lieux [physiques] de dépôt et de récupération de location de véhicules récréatifs partout au Canada » (para 7) et j’accepte ses déclarations assermentées telles quelles.

[39] Enfin, la Partie requérante observe que, dans la mesure que Mme Carrier fait des déclarations concernant les services offerts au Canada, elle emploie le temps présent et ne parle pas de la période pertinente. Bien que la formulation employée par Mme Carrier aurait pu être plus précise, les pages Web invoquées par Mme Carrier correspondent toutes à la période pertinente. Lues dans ce contexte, rien dans la preuve n’est contraire à l’interprétation que ses déclarations au temps présent concernent l’offrent de services en général, y compris au cours de la période pertinente.

[40] Selon la preuve, je suis convaincu que la Marque a été employée dans l’annonce et la promotion des services énumérés dans l’enregistrement et que la Propriétaire était prête et en mesure d’exécuter les services à ses emplacements au Canada au cours de la période pertinente.

[41] Par conséquent, je suis convaincu que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les services énumérés dans l’enregistrement au cours de la période pertinente au sens des articles 4(2) et 45 de la Loi.

Décision

[42] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié pour supprimer les produits énumérés dans l’enregistrement, nommément les suivants, selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

Cl 12 Véhicules automobiles terrestres, nommément autocaravanes et fourgonnettes de camping.

[43] L’enregistrement sera maintenu à l’égard des services, nommément les suivants.

Cl 35 Services de vente en gros et au détail de véhicules motorisés de location, y compris d’autocaravanes et de fourgonnettes de camping.

Cl 37 Entretien, révision et réparation de véhicules automobiles, y compris d’autocaravanes et de fourgonnettes de camping.

Cl 39 Services de crédit-bail et de location de véhicules.

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Robert A. MacDonald

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifée conforme

William Desroches

Le français est conforme aux WCAG.

 

 


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-04-06

COMPARUTIONS

Pour la Partie requérante : John Simpson

Pour la Propriétaire inscrite : Marta Tandori Cheng

AGENTS AU DOSSIER

Pour la Partie requérante : Shift Law Professional Corporation

Pour la Propriétaire inscrite : Riches, McKenzie & Herbert LLP

 

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