Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 159

Date de la décision : 2023-09-08

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Wonder Brands Inc.

Requérante : Poppy Industries Canada Inc.

Demande : 1,839,901 pour DESSERT CRISPS

Introduction

[1] Wonder Brands Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce DESSERT CRISPS (la Marque), laquelle est l’objet de la demande d’enregistrement no 1,839,901 déposée par Poppy Industries Canada Inc. (la Requérante). La demande est liaison avec les produits suivants (les Produits) :

[traduction]

(1) Grignotines à base de légumes.

(2) Gâteaux, craquelins, biscottis, biscuits, craquelins, biscuits-collations, grignotines à base de blé, grignotines à base de riz.

[2] Les motifs d’opposition de l’Opposante sont tous fondés, au moins en partie, sur l’allégation selon laquelle la Marque donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse des Produits.

[3] Pour les raisons exposées ci-dessous, je rejette la demande.

Le dossier

[4] La demande a été déposée le 30 mai 2017 et a été annoncée aux fins d’opposition le 11 juillet 2018. Le 11 avril 2019, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). L’autorisation de modifier la déclaration d’opposition pour refléter le changement du nom de l’Opposante a été accordée par la suite. Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019, et puisque la présente demande a été annoncée avant cette date, les motifs d’opposition seront évalués en fonction de la Loi dans sa version antérieure au 17 juin 2019 (voir l’article 70 de la Loi). L’Opposante soulève des motifs d’opposition en vertu des articles 2, 12(1)b), 30e) et 30i) de la Loi.

[5] La Requérante a produit une contre-déclaration contestant les motifs d’opposition.

[6] À titre de preuve, l’Opposante a produit l’affidavit de Biserka Horvat, souscrit le 18 décembre 2020 (l’Affidavit Horvat). Cet affidavit comprend des définitions de dictionnaire tirées du site Web dictionary.com pour les mots « dessert » et « crisp » ainsi que des imprimés provenant de divers sites Web de tiers décrivant des recettes de desserts, ainsi que des sites Web relatifs à des produits alimentaires de tiers. Mme Horvat n’a pas été contre-interrogée. La Requérante n’a produit aucune preuve.

[7] Les deux parties ont produit des observations écrites. Seule la Requérante a assisté à une audience. Je note que cette affaire a été entendue avec des oppositions à la demande connexes nos 1839903 (CAKE THINS), 1839913 (CAKE SLIMS), et 1839911 (DESSERT THINS), étant donné que les procédures concernaient des parties et des motifs d’opposition identiques. Toutefois, comme les éléments de preuve spécifiques sont différents dans chaque espèce, j’ai réglé les quatre affaires dans des décisions distinctes.

Fardeau de preuve et dates pertinentes

[8] C’est à la Requérante qu’incombe le fardeau ultime de démontrer que la Demande est conforme aux exigences de la Loi. Toutefois, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial en produisant suffisamment d’éléments de preuve admissibles à partir desquels on pourrait raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition. Une fois ce fardeau initial rempli, la Requérante doit convaincre le registraire, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition invoqués ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la marque de commerce [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst), à la p 298; Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA (2002), 20 CPR (4th) 155 (CAF)].

[9] Les dates pertinentes en ce qui a trait aux motifs d’opposition sont les suivantes :

· Articles 38(2)a) et 30 de la Loi – la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984), 3 CPR (3d) 469 (COMC), à la page 475];

· Articles 38(2)b) et 12(1)b) – la date de production de la demande [General Housewares Corp c Fiesta Barbeques Ltd (2003), 28 CPR (4th) 60 (CF)];

· Articles 38(2)d) et 2 de la Loi – la date de production de la déclaration d’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185, 34 CPR (4th) 317 (CF)].

Analyse des motifs d’opposition

Article 12(1)b) – Description claire ou description fausse et trompeuse

[10] L’Opposante soutient que la Marque contrevient à l’article 12(1)b) de la Loi parce qu’elle décrit clairement une particularité et une caractéristique intrinsèque des produits, à savoir que les produits alimentaires et de boulangerie proposés par la Requérante sont des desserts croustillants ou des produits ressemblant à des desserts. À titre subsidiaire, l’Opposante allègue que la Marque donne une description fausse et trompeuse des produits.

[11] L’interdiction prévue à l’article 12(1)b) de la Loi vise à empêcher un commerçant unique de monopoliser un terme qui donne une description claire ou qui est couramment employé dans le commerce, et de placer ainsi des commerçants légitimes dans une position désavantageuse [Canadian Parking Equipment c Canada (Registraire des marques de commerce), 1990 CarswellNat 834 (CF 1re inst)].

[12] La question de savoir si une marque de commerce donne une description claire ou une description fausse et trompeuse doit être examinée du point de vue de l’acheteur moyen des produits ou services liés. La « nature » s’entend d’une particularité, d’un trait ou d’une caractéristique des produits et services, et « claire » signifie qu’elle est facile à comprendre, évidente ou simple [Drackett Co of Canada Ltd c American Home Products Corp (1968), 55 CPR 29 (C de l’É), à la p 34]. La Marque ne doit pas être analysée dans ses moindres détails, mais considérée dans son ensemble sous l’angle de la première impression [Wool Bureau of Canada Ltd c Registraire des marques de commerce (1978), 40 CPR (2d) 25 (CF 1re inst); Atlantic Promotions Inc c Registraire des marques de commerce (1984), 2 CPR (3d) 183 (CF 1re inst)]. En d’autres termes, la Marque ne doit pas être examinée de façon isolée, mais plutôt dans le contexte de sa relation avec les produits visés par la demande [Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario c Canada, 2012 CAF 60]. Enfin, il faut user de bon sens lorsqu’il s’agit de juger du caractère descriptif [Neptune SA c Canada (Procureur général), 2003 CFPI 715].

[13] En l’espèce, je suis convaincu que la preuve produite par l’Opposante est suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de preuve initial. En particulier, les définitions de dictionnaire contenues dans l’Affidavit Horvat sont suffisantes pour au moins contester la question de savoir si la Marque contrevient à l’article 12(1)b) de la Loi. Ces définitions du dictionnaire comprennent ce qui suit :

[traduction]

Dessert

nom

Croustillant

adjectif, plus croustillant, le plus croustillant

(en particulier dans le domaine alimentaire) dur, mais facilement cassable; cassant : toast croustillant.

(en particulier dans le domaine alimentaire) ferme et frais; non mou ou flétri : une feuille de laitue croquante.

[…]

nom

Cuisine. dessert composé de fruits, comme des pommes ou des abricots, cuits avec un mélange croustillant, généralement composé de chapelure, de noix hachées, de beurre et de sucre brun.

[14] La position de l’Opposante en ce qui concerne l’article 12(1)b) comporte deux volets. Premièrement, l’Opposante soutient que la Marque en liaison avec des produits alimentaires, de grignotines et de boulangerie décrit clairement une particularité et une caractéristique intrinsèque des produits, à savoir qu’il s’agit d’un dessert croustillant ou d’un produit de type dessert. Deuxièmement, l’Opposante soutient que ses preuves démontrent que des tiers emploient l’expression « dessert crisp(s) » pour décrire certains produits alimentaires, de sorte que cette terminologie est courante et susceptible d’être employée par les commerçants dans ce domaine.

[15] En ce qui concerne le premier point, la Requérante soutient que la marque est une expression fantaisiste qui, compte tenu de sa construction grammaticale inhabituelle, est susceptible de véhiculer de multiples significations différentes, et ne peut donc pas être considérée comme clairement descriptive. Deuxièmement, en ce qui concerne la preuve du marché, la Requérante soutient qu’elle ne divulgue pas l’emploi descriptif de certains termes, mais plutôt la preuve de l'existence de diverses marques de commerce formatives de tiers « crisp(s) ».

[16] Dans l’ensemble, je suis favorable à la position de l’Opposante en ce qui concerne l’article 12(1)b) de la Loi, et je conclus que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer que la Marque ne donne pas une description claire. Les définitions de dictionnaire incluses dans la preuve de l’Opposante indiquent que le mot « crisp » décrit un type particulier de produit alimentaire, à savoir un dessert composé de fruits, cuit avec un mélange croustillant, généralement de chapelure, de noix hachées, de beurre et de sucre brun. Cette preuve par le dictionnaire est étayée par la preuve présentée par l’Opposante de diverses recettes en langue anglaise pour « Apple Crisp », « Strawberry and Apricot Crisp with Pine-Nut Crumble », et même un livre de recettes en langue anglaise intitulé « Dessert Crisp Recipes ». Le fait que certaines de ces références de tiers dans la preuve de l’Opposante puissent provenir de l’extérieur du Canada ne la rend pas non pertinente en vertu de l’article 12(1)b) de la Loi. En ce qui concerne ce motif d’opposition, la question n’est pas de savoir si le terme a été employé de manière clairement descriptive au Canada, mais si le terme donne une description claire en langue française ou anglaise [voir Canadian Inovatech Inc c Burnbrae Farms Ltd (2003), 31 CPR (4th) 151 (COMC), au para 13; Guess? Inc c Slide Sportswear Inc (2005), 44 CPR (4th) 380 (COMC)].

[17] Selon la preuve présentée ci-dessus, je suis convaincu que l’expression « DESSERT CRISPS » est apte à décrire un dessert ou un produit de type dessert, et qu’elle devrait pouvoir être employée par les autres commerçants afin de décrire leurs produits alimentaires. Par exemple, selon la preuve au dossier, il n’est pas difficile d’imaginer un scénario dans lequel un commerçant de produits de boulangerie souhaiterait identifier sa sélection de « Dessert Crisps » disponibles à la vente, qu’il s’agisse de croustillants aux pommes, aux abricots, aux petits fruits ou d’une variante ou d’un produit similaire. À cet égard, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que la Marque constitue une description facile à comprendre et simple de la nature du produit. Par conséquent, je conclus que la Marque donne une description claire en vertu de l’article 12(1)b), et que ce motif d’opposition est accueilli. Étant donné que j’ai conclu que la Marque donne une description claire, il n’est pas nécessaire d’examiner si elle donne une description fausse et trompeuse.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[18] Avec ce motif d’opposition, l’Opposante allègue que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi parce qu’il s’agit d’un terme générique qui donne une description claire ou une description fausse et trompeuse des produits. Aux termes de l’article 2 de la Loi, « distinctive » décrit une marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire de ceux d’autres personnes, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

[19] Il été conclu à maintes reprises qu’une marque de commerce qui est jugée comme étant clairement descriptive ou donnant une description fausse et trompeuse en vertu de l’article 12(1)b) de la Loi ne signifie pas nécessairement qu’elle est distinctive au sens de l'article 2 de la Loi [voir Conseil canadien des ingénieurs professionnels c APA - The Engineered Wood Assn (2000), 7 CPR (4th) 239 (CF), au para 49; voir aussi Unilever Canada Inc c Superior Quality Foods, Inc (2007), 62 CPR (4th) 75 (COMC), au para 24]. Puisque j’ai déjà conclu en faveur de l’Opposante en vertu de l’article 12(1)b) que la Marque est clairement descriptive (et il n’y a aucune raison pour que cette conclusion change à la date de la déclaration d’opposition), l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard du motif fondé sur l’article 2, et je conclus que la Marque n’est pas intrinsèquement adaptée pour distinguer les Produits de la Requérante des produits similaires de tiers. En outre, la Requérante n’a présenté aucune preuve suggérant que la Marque avait acquis un caractère distinctif au Canada à la date pertinente par son emploi et sa publicité. Par conséquent, la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer que la Marque est distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, et le motif d’opposition fondé sur l’article 2 est accueilli.

Autres motifs d’opposition

[20] Puisque j’ai conclu en faveur de l’Opposante à l’égard des motifs d’opposition fondés sur les articles 12(1)b) et 2, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs d’opposition.

Décision

[21] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

 

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Timothy Stevenson

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Le français est conforme aux WCAG.


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