Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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A maple leaf on graph paper

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2023 COMC 197

Date de la décision : 2023-11-28

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : Tepee Sun LLC

Propriétaire inscrite : Lidl Stiftung & Co. KG

Enregistrement : LMC935,717 pour ULTIMATE SPEED (& Design)

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC935,717 pour la marque de commerce ULTIMATE SPEED (& Design) (la Marque), reproduite ci-dessous.

[2] L’enregistrement contient la revendication de couleur suivante :

[traduction] Revendication de couleur : La couleur est revendiquée comme caractéristique de la marque de commerce. Les mots « ULTIMATE SPEED » sont noirs avec un contour blanc, les lignes horizontales sont rouges avec un contour blanc, l’arrière-plan est rouge.

[3] La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec les produits suivants : [traduction]

(1) Bandes anticorrosion, nommément ruban à conduits. Trousses et sacs de premiers soins. Nourrices en métal. Filtres à air et à huile pour moteurs; crics; silencieux pour moteurs; bougies d’allumage pour moteurs à combustion interne. Marteaux, crics de levage (manuels). Antennes pour véhicules automobiles; manomètres pour pneus; vérificateurs de batterie; préchauffeurs de batterie; câbles de démarrage pour moteurs; thermomètres internes et externes (à usage autre que médical), nommément thermomètres d’aquarium, thermomètres d’intérieur et d’extérieur pour la maison, thermomètres de piscine, thermomètres à viande, thermomètres pour automobiles. Feux et voyants d’automobile. Accessoires et pièces pour automobiles, motos, tricycles et vélos, nommément essuie-glaces, démarreurs pour moteurs, casques pour motocyclistes et cyclistes, nacelles latérales de moto, sonnettes de vélo, porte-vélos, avertisseurs de vélo, cadenas de vélo, garde-boue pour motocyclettes et vélos, supports à vélos, béquilles de vélo; paniers pour vélos, pompes à vélo; plaquettes de frein, ensembles de sabots de frein, disques de frein pour véhicules; essuie-glaces, sièges de véhicule; ceintures de sécurité pour sièges de véhicule; sièges d’enfant pour véhicules; housses pour sièges de véhicule; pneus de véhicule; chaînes à neige; porte-bagages de ski; porte-bagages; tricycles; housses de véhicules (formées). Ruban isolant. Articles en cuir, nommément vêtements de protection pour motocyclistes; malles et sacs de voyage; parapluies, ombrelles, parasols. Nourrices en plastique. Câbles de remorquage pour automobiles; bandes, autres qu’en métal, nommément élastiques, serre-poignets, bandeaux absorbants. Gants, nommément gants pour cyclistes, gants pour motocyclistes, gants de travail. Tapis d’automobile, paillassons, articles décoratifs, nommément napperons, tapis d’automobile.

[4] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être radié.

Procédure

[5] Le 10 janvier 2022, à la demande de Tepee Sun LLC (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis en vertu de l’article 45 de la Loi à Lidl Stiftung & Co. KG. (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de la Marque.

[6] L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 10 janvier 2019 au 10 janvier 2022.

[7] Les définitions pertinentes d’« emploi » en l’espèce sont énoncées à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(3) Une marque de commerce mise au Canada sur des produits ou sur les emballages qui les contiennent est réputée, quand ces produits sont exportés du Canada, être employée dans ce pays en liaison avec ces produits.

[8] Lorsque la Propriétaire n’établit pas l’« emploi », l’enregistrement est susceptible d’être radié ou modifié, à moins que l’absence d’emploi ne soit en raison de circonstances spéciales.

[9] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a fourni l’affidavit de Camille Laliberté, souscrit le 8 juillet 2022.

[10] Seule la Partie requérante a produit des observations écrites et était représentée à l’audience.

Preuve et analyse

[11] Dans son affidavit, Mme Laliberté se qualifie de stagiaire et a indiqué que son adresse est le 2000‑630, René‑Lévesque Boulevard Ouest, Montréal (Province de Québec) H3B 1S6, qui semble être l’adresse de l’agent des marques de commerce de la Propriétaire, ce qui suggère qu’elle est une employée dans ce cabinet. Elle affirme avoir [traduction] « une connaissance générale des activités de [la Propriétaire] », une société allemande de maxidiscompte qui utilise un concept minimaliste pour réduire les coûts et offrir des produits à très bas prix [paragraphe 1].

[12] Mme Laliberté affirme que la Propriétaire « offre à la vente et vend des produits tels que ceux mentionnés dans [l’enregistrement] sous la [marque] ». À l’appui, elle reproduit des images qu’elle décrit comme des captures d’écran relatives aux produits visés par l’enregistrement. Les images montrent 11 produits arborant la Marque sur eux-mêmes, ainsi que leur description. Bien que les images semblent provenir d’un site Web, Mme Laliberté ne fait référence à aucun lien hypertexte et l’adresse du domaine n’apparaît pas sur les images elles-mêmes [paragraphes 2 à 3].

[13] Enfin, Mme Laliberté affirme qu’elle n’a [traduction] « aucune raison de croire » que les images reproduites ne sont pas illustratives de la façon dont la Marque a été liée aux produits visés par l’enregistrement pendant la période pertinente [paragraphe 4].

Admissibilité de l’affidavit

[14] Dans ses observations écrites, la Partie requérante soutient que la preuve de la Propriétaire est un ouï-dire inadmissible puisque Mme Laliberté n’est qu’une stagiaire de l’agent de la Propriétaire. À cet égard, elle soutient que le déposant n’a pas une connaissance personnelle des activités de la Propriétaire et, par conséquent, des faits énoncés dans son affidavit. Elle soutient également que la Propriétaire n’a pas établi la nécessité de présenter une preuve au moyen d’un affidavit de la stagiaire employée par son agent.

[15] Je suis d’accord que rien dans l’affidavit de Mme Laliberté n’indique qu’elle était à un moment quelconque une employée de la Propriétaire ou qu’elle avait une quelconque relation avec elle. Rien n’indique non plus qu’elle a personnellement participé aux activités de la Propriétaire ou qu’elle a eu accès à ses dossiers d’entreprise. Par conséquent, je ne peux pas conclure que Mme Laliberté connaît bien les activités de la Propriétaire et les faits invoqués dans son affidavit. Dans ce contexte, la preuve fournie dans son affidavit constitue un ouï-dire qui est à première vue inadmissible, à moins qu’elle ne satisfasse aux critères de nécessité et de fiabilité [Labatt Brewing Co c Molson Breweries, A Partnership (1996), 68 CPR (3d) 216 (CF 1re inst)].

[16] La Propriétaire n’a fourni aucune raison pour laquelle la preuve devait être présentée par une stagiaire, ou pour laquelle une personne ayant une connaissance directe des activités de la Propriétaire et de l’emploi de la Marque n’a pas été en mesure de fournir la preuve. Par conséquent, la Propriétaire n’a pas établi la nécessité de présenter des éléments de preuve au moyen d’un affidavit de la stagiaire de son agent. La Propriétaire n’a pas non plus fourni les raisons de croire que les faits ainsi énoncés sont vrais. Sur ce point, Mme Laliberté se contente d’affirmer qu’elle connaît bien les activités générales de la Propriétaire [mon soulignement]. Je note également qu’elle n’indique pas où les images reproduites des produits ont été prises. Sans connaître la source des renseignements fournis par Mme Laliberté, je ne peux pas conclure que la preuve est fiable.

[17] Tout cela étant dit, compte tenu de la nature sommaire de la procédure prévue à l’article 45, « toute préoccupation quant au fait que la preuve constitue du ouïdire devrait être dirigée vers le poids de celle-ci, plutôt que son admissibilité » [Eva Gabor International Ltd c 1459243 Ontario Inc, 2011 CF 18, au para 18]. Par conséquent, toute préoccupation concernant la fiabilité de l’affidavit de Mme Laliberté est évaluée en matière de poids plutôt que d’admissibilité.

Emploi de la Marque en liaison avec les produits visés par l’enregistrement

[18] La Partie requérante fait également des observations subsidiaires en ce qui concerne la preuve. Notant que Mme Laliberté n’établit aucune corrélation entre les produits visés par l’enregistrement et les 11 produits montrés dans les images, elle soutient que la preuve ne démontre pas la liaison entre la Marque et chacun des produits visés par l’enregistrement. La Partie requérante soutient également que la preuve est muette quant au transfert des produits au Canada ou depuis le Canada. Elle soutient en outre que la preuve est également muette quant à l’existence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque au Canada pendant la période pertinente.

[19] Bien que Mme Laliberté affirme que la Propriétaire vend des produits tels que ceux spécifiés dans l’enregistrement, elle n’affirme pas que les produits présentés dans son affidavit ont déjà été vendus ou autrement transférés au Canada ou à partir du Canada. Plus important encore, elle ne fournit ni factures ni détails factuels permettant de déduire de tels transferts. En l’absence de preuves de ventes des produits au Canada ou de leur exportation à partir du Canada, je n’ai pas besoin d’examiner les observations de la Partie requérante relatives à l’avis de liaison.

[20] Par conséquent, je ne suis pas convaincue que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec l’un des produits visés par l’enregistrement au sens des articles 4 et 45 de la Loi. En outre, la preuve est muette quant aux raisons qui justifient le défaut d’emploi de la Marque au Canada pendant la période pertinente.

[21] Avant de conclure, j’aborderai brièvement une observation ajoutée par la Partie requérante lors de l’audience concernant le comportement de la Propriétaire.

Je note qu’une audience a été demandée à l’origine par les deux parties. L’agent de la Propriétaire a indiqué que les observations seraient formulées en français; l’agent de la Partie requérante a indiqué que les observations seraient formulées en anglais et qu’une traduction simultanée serait nécessaire. Initialement prévue le 18 août 2023, l’audience a été reportée une fois sur consentement des parties et fixée au 15 novembre 2023 à 10 h en présence d’interprètes. Le matin de l’audience, la Propriétaire a envoyé un courriel au coordinateur de l’audience pour l’informer qu’il n’y assisterait pas. Je note en outre que, lors de l’audience, la Partie requérante a fait référence à deux procédures antérieures en vertu de l’article 45 dans lesquelles la Propriétaire a également produit des affidavits de stagiaires et qui ont conduit à la radiation des enregistrements [Barrette Legal Inc. c Lidl Stiftung & Co. KG, 2022 COMC 6; et Vanguard IP LLP v Lidl Stiftung & Co. KG, 2022 COMC 189].

[22] La Partie requérante soutient que le comportement de la Propriétaire concernant l’annulation de dernière minute de l’audience et de la preuve elle-même était inacceptable et équivalait à un abus de procédure puisque la Partie requérante, la Commission des oppositions des marques de commerce et les interprètes ont mobilisé des ressources non nécessaires dans cette procédure.

[23] Toutefois, les paramètres de la présente procédure sont limités et une décision visant à déterminer si les actions de la Propriétaire constituent un abus de procédure dépasse la portée des procédures en vertu de l’article 45 [voir Essilor Group Canada Inc c Vermillion Networks Inc, 2021 COMC 184; et Michelle Fleischhacker Room Service Interiors c Room Service Interiors Ltd., 2022 COMC 74]. La seule question à trancher dans une procédure en vertu l’article 45 est celle de savoir si la marque de commerce a été employée au sens de la Loi; ainsi, les allégations selon lesquelles les actes d’une partie peuvent être abusifs ou vexatoires ne sont pas pertinentes [Consorzio del Prosciutto di Parma c Maple Leaf Foods Inc, 2010 COMC 52, au para 20].

Décision

[24] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi et conformément aux dispositions de l’article 45 de la Loi, l’enregistrement sera radié.

_______________________________

Maria Ledezma

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo, traductrice

Le français est conforme aux WCAG.


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