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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 014

Date de la décision : 2024-01-30

[TRADUCTION CERTIFÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE DE LA PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : Deeth Williams Wall LLP

Propriétaire inscrite : Eaton Corporation

Enregistrement : LMC445,667 pour COMMANDER

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en vertu de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC445,667 pour la marque de commerce COMMANDER (la Marque).

[2] La Marque est enregistrée pour emploi en liaison avec :

[traduction]

Produits électriques, nommément disjoncteurs électriques, commandes, nommément contacteurs, démarreurs de moteurs, centres de commande de moteurs, boutons-poussoirs, commandes électroniques à fréquence réglable, interrupteurs à vide, voies de bus, centres de compteurs électriques, tableaux de distribution, centres de charge, panneaux de compteurs, tableaux de commutation, panneaux de commande de pompes, interrupteurs, appareillages de commutation, protecteurs, supports de lampes en porcelaine, transformateurs, ainsi que leurs assemblages et leurs composants et leurs pièces détachées.

[3] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié.

La procédure

[4] À la demande de Deeth Williams Wall LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi le 19 juillet 2022, à la propriétaire inscrite de la Marque, Eaton Corporation la Propriétaire).

[5] L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, à l’égard de chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle la Marque a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 19 juillet 2019 au 19 juillet 2022.

[6] La définition pertinente d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession des produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[7] Lorsque le propriétaire n’établit pas l’« emploi », l’enregistrement est susceptible d’être radié ou modifié, à moins que le défaut d’emploi ne soit attribuable à des circonstances spéciales qui le justifient.

[8] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit la déclaration solennelle d’Umesh Patel, directeur du marketing d’Eaton Industries (Canada) Company (Eaton Electrical), le distributeur canadien de la Propriétaire et une filiale en propriété exclusive de cette dernière.

[9] Les deux parties ont produit des observations écrites, mais seule la Propriétaire a demandé une audience et y était représentée.

La preuve

[10] Le témoignage de M. Patel indique qu’il est le directeur du marketing d’Eaton Electrical, une filiale en propriété exclusive de la Propriétaire [para 1 et 5 à 7]. Il explique que les [traduction] « produits électriques de marque COMMANDER » vendus par Eaton Electrical à des clients au Canada sont fabriqués par ou pour la Propriétaire et expédiés aux centres de distribution canadiens d’Eaton Electrical. De là, ils sont expédiés aux clients et aux acheteurs partout au Canada. Certains acheteurs sont eux-mêmes des distributeurs ou des détaillants considérés comme des partenaires du réseau de distribution agréés. Parmi les partenaires du réseau de distribution les plus importants figurent notamment Home Depot, Lowe’s et BMR [para 8 et 9].

[11] M. Patel poursuit en précisant que les produits électriques en liaison avec lesquels la Marque a été employée au Canada, y compris tout au long de la période pertinente, sont des [traduction] « produits électriques, nommément disjoncteurs électriques » [para 11].

[12] M. Patel déclare que compte tenu de la nature des produits, la Marque ne figure pas directement sur ceux-ci. Il explique que les produits [traduction] « disjoncteurs électriques » sont [traduction] « mis en vente dans le catalogue d’Eaton Electrical, qui les désigne comme des “disjoncteurs boulonnés de rechange” pour les produits électriques de marque COMMANDER » [para 12].

[13] Il joint un imprimé de la [traduction] « version actuelle du catalogue de la [Propriétaire] », dont il confirme qu’elle est similaire à la version disponible pendant la période pertinente, et qui indique [traduction] « Eaton prend en charge de nombreuses générations de tableaux de distribution en offrant des disjoncteurs de rechange BQL et QBH pour les anciens CEP, Sylvania, Commander et les tableaux de distribution boulonnés » [Pièce B-1]. Il déclare que les produits [traduction] « ont été et sont actuellement mis en vente au moyen du catalogue d’Eaton Electrical », mais ne fournit pas d’autres détails à cet égard [para 12].

[14] Il déclare également que les [traduction] « disjoncteurs boulonnés de rechange » peuvent être commandés en ligne par l’intermédiaire des sites Web transactionnels de divers partenaires du réseau de distribution. Il explique que ces sites Web contiennent des paniers d’achat et [traduction] « un bouton “cliquable” Ajouter au panier » et que sur ces sites Web, la Marque [traduction] « figure à proximité du produit qui y est lié » [paras 13 et 14]. Il joint des imprimés des sites Web de trois partenaires du réseau de distribution comme [traduction] « exemples de produits électriques, nommément des disjoncteurs électriques qui ont été mis à disposition au cours de la période pertinente […] » [para 14, Pièce B-2].

[15] Il indique que les recettes provenant des ventes de disjoncteurs électriques par Eaton Electrical au Canada au cours de la période pertinente s’élèvent à plus de 6,8 millions de dollars [para 15].

[16] Il joint deux factures représentatives adressées à des partenaires du réseau de distribution et datées de la période pertinente, en précisant qu’elles [traduction] « accompagnaient les produits au moment de leur transfert à l’acheteur » [para 16]. Les deux factures montrent des ventes de produits décrits dans les factures comme 1- ou 2- « POLE COMMANDER BREAKER » [Pièce C].

Motifs de la décision

[17] Il est bien établi que le but et l’objet de l’article 45 de la Loi consistent à assurer une procédure simple, sommaire et expéditive pour débarrasser le registre du « bois mort ». La preuve dans une procédure prévue à l’article 45 n’a pas à être parfaite; en effet, un propriétaire inscrit doit uniquement établir une preuve prima facie d’emploi au sens des articles 4 et 45 de la Loi. Ce fardeau de preuve à atteindre est bas; il suffit que les éléments de preuve établissent des faits à partir desquels une conclusion d’emploi peut logiquement être inférée [selon Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184 au para 9].

[18] Comme l’indiquent les observations écrites des deux parties et comme l’a reconnu l’agent de la Propriétaire à l’audience, les éléments de preuve ne concernent que des [traduction] « produits électriques, nommément disjoncteurs électriques ». Aucune preuve d’emploi ou de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque n’a été fournie pour aucun des autres produits énumérés dans l’enregistrement. Ils seront donc supprimés en conséquence.

[19] En ce qui concerne les produits [traduction] « disjoncteurs électriques », les observations écrites de la Partie requérante allèguent plusieurs lacunes dans la preuve de la Propriétaire, y compris l’absence de preuve (i) d’emploi en tant que marque de commerce au sens de l’article 2 de la Loi étant donné la présence d’autres marques de commerce, (ii) d’emploi dans la pratique normale du commerce; et (iii) d’emploi par Eaton Electrical au profit de la Propriétaire. À la base, ces arguments découlent tous de la position de la Partie requérante selon laquelle les preuves ne démontrent pas l’emploi de la Marque en liaison avec des disjoncteurs électriques, mais plutôt, le cas échéant, avec des tableaux de distribution pour lesquels ils constituent des pièces de rechange.

[20] Certaines des observations de la Partie requérante à cet égard se rapportent au caractère distinctif de la Marque. Cette question ne se pose toutefois pas dans le cadre d’une procédure prévue à l’article 45, qui exige que la Propriétaire démontre l’emploi au sens de l’article 4 de la Loi [United Grain Growers Ltd c Lang Michener, 2001 CAF 66]. À cet égard, le témoignage de M. Patel atteste clairement de ventes importantes de disjoncteurs de rechange. Comme la Marque ne figure pas directement sur les produits ou sur leur emballage, la question essentielle est de savoir si la preuve démontre l’existence d’un avis de liaison entre la Marque et les disjoncteurs électriques au moment du transfert de propriété ou de possession.

[21] M. Patel a clairement déclaré que les disjoncteurs électriques sont désignés et vendus comme des disjoncteurs boulonnés de rechange dans le catalogue d’Eaton Electrical et par les partenaires du réseau de distribution. Il a fourni des détails et des captures d’écran représentatives indiquant comment la Marque était présentée sur les sites Web de certains de ces partenaires au cours de la période pertinente, sites Web sur lesquels il était possible d’effectuer des achats. À cet égard, je note que le site Web de BMR, un [traduction] « partenaire de distribution plus important », identifie le produit en gros caractères comme « TWO-POLE COMMANDER BREAKER ». J’accepte qu’un consommateur canadien ayant acheté le produit présenté sur ce site Web ait lié la Marque au produit au moment de la transaction en ligne [Smart & Biggar c The Black & Decker Corporation (2020), 2020 COMC 93; Law Office of Philip B Kerr c Face Stockholm Ltd (2002), 16 CPR (4th) 105 (COMC)].

[22] Il est vrai que M. Patel ne déclare pas expressément que des ventes ont été réalisées par l’intermédiaire du site Web de BMR au cours de la période pertinente, ou que les ventes réalisées par l’intermédiaire des partenaires du réseau de distribution, y compris ceux dont les sites Web sont joints à la Pièce B-2, sont incluses dans les chiffres de vente globaux fournis. J’estime néanmoins qu’il est raisonnable d’inférer qu’au moins une partie des ventes totales a été réalisée par l’intermédiaire de ces voies, y compris BMR, compte tenu notamment des déclarations claires de M. Patel concernant la pratique normale du commerce et de la chaîne de distribution d’Eaton Electrical incluant BMR en tant que [traduction] « partenaire de distribution plus important », des captures d’écran de BMR montrant une option d’achat de panier qui, selon lui, est représentative de la période pertinente, et des chiffres de vente substantiels qui ont été fournis. Je suis guidée à cet égard par le principe affirmant que la preuve dans une procédure prévue à l’article 45 n’a pas à être parfaite [voir Lewis Thomson & Son Ltd c Rogers, Bereskin & Parr (1988), 21 CPR (3d) 483 (CF 1re inst], et que des inférences raisonnables peuvent être tirées des éléments de preuve fournis dans leur ensemble [voir Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64].

[23] En outre, j’estime également que les factures de l’échantillon représentatif établissent l’avis de liaison entre la Marque et les produits, compte tenu de la présentation claire de la Marque dans la partie description des factures, qui mentionne « COMMANDER BREAKER » à 1 pôle ou à 2 pôles, et de l’affirmation de M. Patel selon laquelle les factures accompagnaient les produits au moment de leur transfert [voir Hortilux Schreder BV c Iwasaki Electric Co, 2012 CFA 321; Tint King of California Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 1440 au para 32; et Riches, McKenzie & Herbert c Pepper King Ltd (2000), 8 CPR (4th) 471 (CF 1re inst)]. En l’absence d’observations de la Partie requérante sur ce point, j’accepte que les termes à 1 pôle, à 2 pôles et disjoncteurs constituent des références descriptives. Ainsi, j’accepte que l’identité de la Marque est préservée et que la variante ne tromperait pas un acheteur non averti [Canada (Registraire des marques de commerce) c Cie International pour l’informatique CII Honeywell Bull, SA (1985), 1985 CanLII 5537 (FCA), 4 CPR (3d) 523 (CAF)].

[24] Enfin, il ressort clairement du témoignage de M. Patel qu’Eaton Electrical distribue des disjoncteurs électriques fabriqués par ou pour la Propriétaire et que toute transaction subséquente est une vente à un client, à un détaillant ou à un autre distributeur. La Propriétaire est donc l’unique source des produits. En conséquence, l’emploi de la Marque dans la chaîne de distribution, par Eaton Electrical ou autrement, profite à la Propriétaire sans avoir besoin d’une licence [Manhattan Industries Inc c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CF 1re inst); Lin Trading Co c CBM Kabushiki Kaisha (1988), 21 CPR (3d) 417 (CAF); Osler, Hoskin & Harcourt c Canada (Registraire des marques de commerce) (1997), 77 CPR (3d) 475 (CF 1re inst)].

[25] Ainsi, dans l’ensemble, j’estime que les éléments de preuve fournis par M. Patel sont suffisants pour établir une preuve prima facie d’emploi de la Marque en liaison avec des [traduction] « produits électriques, nommément disjoncteurs électriques » au sens des articles 4(1) et 45 de la Loi.

Décision

[26] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi l’enregistrement sera modifié afin de supprimer tous les produits à l’exception des [traduction] « produits électriques, nommément disjoncteurs électriques » selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

_______________________________

Emilie Dubreuil

Agente d’audience

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

 

Révisée par Manon Duchesne Osborne et Cassandre Choquette Sauvageau


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-12-11

COMPARUTIONS

Pour la Partie requérante : Aucune comparution

Pour la Propriétaire inscrite : Kathleen Lemieux

AGENTS AU DOSSIER

Pour la Partie requérante : Deeth Williams Wall LLP

Pour la Propriétaire inscrite : Borden Ladner Gervais LLP

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