Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 021

Date de la décision : 2024-02-01

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Oozex Licensing, LLC

Requérante : Qiwu Technology Co., Ltd.

Demande : 1940385 pour YOOZ Design

Introduction

[1] Qiwu Technology Co., Ltd (la Requérante) a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce reproduite ci-dessous (la Marque visée par la demande) :

YOOZ

[2] La demande comprend un large éventail de produits liés aux produits de tabac et aux produits de vapotage. Une liste complète de ces produits (les Produits visés par la demande) figure à l’annexe A de la présente décision.

[3] Oozex Licensing, LLC (l’Opposante) affirme être propriétaire de marques de commerce composées du mot OOZE, ou de versions stylisées de ce mot (les Marques de l’Opposante). L’Opposante affirme que ses marques de commerce sont enregistrées et ont été largement employées en liaison avec divers produits pour fumer et pour le vapotage, ainsi qu’avec des articles chaussants et des couvre-chefs (les Produits de l’Opposante). Les Marques et les Produits de l’Opposante sont énumérés à l’annexe B de la présente décision.

[4] L’Opposante s’oppose à l’enregistrement de la Marque visée par la demande sur le fondement de plusieurs motifs. La plupart de ces motifs tournent en fin de compte autour de la question de savoir si la Marque visée par la demande crée une confusion avec l’une des Marques de l’Opposante, au sens de l’article 6 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 dans sa version modifiée (la Loi).

[5] Pour les raisons qui suivent, la demande d’enregistrement est rejetée.

Le dossier

[6] La Requérante a produit sa demande le 11 janvier 2019. Dans sa demande, la Requérante prétend avoir employé pour la première fois la Marque visée par la demande au Canada le 20 août 2018.

[7] La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 2 février 2022. Une déclaration d’opposition a été produite le 4 avril 2022, conformément à l’article 38(1) de la Loi. Une contre-déclaration a été produite et signifiée le 13 juin 2022.

[8] À l’appui de son opposition, l’Opposante invoque l’affidavit de Gjergj Sinishtaj souscrit le 13 octobre 2022 (l’Affidavit Sinishtaj). La Requérante n’a pas contre-interrogé M. Sinishtaj, et n’a produit aucune preuve à l’appui de la demande.

[9] Seule l’Opposante a produit des observations écrites. Aucune audience n’a été tenue.

La preuve

[10] M. Sinishtaj est le gestionnaire de l’Opposante et le secrétaire de la société Ashh, Inc. (Ashh), le prédécesseur en titre de l’Opposante [Affidavit Sinishtaj, para 1, 8]. Il décrit l’Opposante comme une filiale en propriété exclusive d’Ashh, détentrice de divers actifs de propriété intellectuelle, y compris les Marques de l’Opposante [para 8]. Ashh, quant à elle, fabrique et vend un grand éventail de produits liés au tabagisme et au vapotage, y compris les Produits de l’Opposante [para 7]. Selon M. Sinishtaj, l’Opposante a octroyé à Ashh une licence l’autorisant à employer les Marques de l’Opposante au Canada [para 9], et contrôle la nature et la qualité des produits vendus en liaison avec les Marques de l’Opposante [para 10].

[11] Dans son affidavit, M. Sinishtaj décrit les produits spécifiques qu’Ashh a vendus au Canada, en liaison avec les Marques de l’Opposante, et sous licence de l’Opposante [para 20 à 23]. M. Sinishtaj fournit également des images représentatives des produits d’Ashh vendus au Canada, qui illustrent les Marques de l’Opposante de diverses manières [para 27, et Pièce D]. Il explique que les produits d’Ashh ne sont pas préremplis de substances à fumer comme de la marijuana, du tabac ou de la nicotine, et qu’ils peuvent donc être utilisés pour fumer l’une ou l’autre de ces substances [para 21].

[12] L’Affidavit Sinishtaj décrit les réseaux de distribution par lesquels les produits d’Ashh sont vendus au Canada, en liaison avec les Marques de l’Opposante [para 12 et 13, 28 et 29, et Pièce E]. Il présente également les ventes d’Ashh au Canada sur une période de sept ans [para 32 et 33], et décrit les efforts publicitaires et promotionnels de l’Opposante en liaison avec les Marques de l’Opposante [para 34 et 56, et Pièces G1 à Q6].

Motifs d’opposition

[13] Les motifs d’opposition soulevés par l’Opposante peuvent se résumer comme suit :

  • Le motif fondé sur la non-enregistrabilité : la Marque n’est pas enregistrable en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi, puisqu’elle crée de la confusion avec les Marques de l’Opposante;

  • Le motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement : la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque visée par la demande en vertu de l’article 16(1)a) de la Loi, puisque cette marque de commerce créait de la confusion avec les Marques de l’Opposante, lesquelles avaient été employées antérieurement au Canada bien avant la date de premier emploi revendiquée par la Requérante;

  • Le motif fondé sur l’absence de caractère distinctif : la Marque visée par la demande n’est pas distinctive de la Requérante, au sens de l’article 2 de la Loi, puisqu’elle ne distingue pas, et n’est pas adaptée pour distinguer, les produits de la Requérante des produits et des services des autres, et plus particulièrement ceux de l’Opposante;

  • Le motif fondé sur le défaut d’emploi ou d’emploi projeté : selon l’article 38(2)e) de la Loi, la Requérante n’employait pas et n’avait pas employé la Marque visée par la demande au Canada, et ne projetait pas d’employer la Marque visée par la demande au Canada en liaison avec les produits mentionnés dans la demande;

  • Le motif fondé sur l’absence de droit à l’emploi : selon l’article 38(2)f) de la Loi, la Requérante n’avait pas et n’a pas le droit d’employer la Marque visée par la demande au Canada en liaison avec les produits mentionnés dans la demande, puisque la Requérante connaissait ou aurait dû connaître les Marques de l’Opposante, les droits de l’Opposante sur celles-ci et la réputation de l’Opposante attachée aux Marques de l’Opposante au Canada. De plus, l’emploi de la Marque visée par la demande est illégal puisqu’il contreviendrait aux articles 7, 20 et 22 de la Loi;

  • Le motif fondé sur la mauvaise foi : selon l’article 38(2)a.1) de la Loi, la demande a été produite de mauvaise foi, puisque la Requérante avait connaissance des Marques de l’Opposante, qui avaient été employées antérieurement par l’Opposante au Canada, et qui continuent d’être employées en liaison avec les produits mentionnés dans les enregistrements de marque de l’Opposante.

[14] Pour chaque motif d’opposition, l’Opposante doit s’acquitter du fardeau de preuve initial de produire une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition. Si l’Opposante s’acquitte de ce fardeau initial, alors la Requérante a le fardeau ultime de convaincre le registraire que, selon la prépondérance des probabilités, les motifs d’opposition ne devraient pas empêcher l’enregistrement de la Marque [voir John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)].

Motif fondé sur la non-enregistrabilité

[15] Étant donné que l’enregistrement de chacune des Marques de l’Opposante est en règle, l’Opposante s’acquitte de son fardeau initial en ce qui concerne le motif fondé sur la non-enregistrabilité. En conséquence, la Requérante a le fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque visée par la demande ne crée pas de confusion avec les Marques de l’Opposante. La date pertinente pour évaluer la confusion en vertu de ce motif est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[16] Mon analyse concernant ce motif se concentrera sur la confusion avec la marque de commerce de l’Opposante OOZE (la Marque nominale de l’Opposante), no d’enregistrement LMC1100546 (l’enregistrement 546), qui est enregistrée pour emploi en liaison avec des [traduction] « Atomiseurs oraux pour fumer; pipes électroniques; moulins à tabac ». À mon avis, cette marque de commerce représente le meilleur argument pour l’Opposante, étant donné que la Marque nominale de l’Opposante n’inclut pas de caractéristiques figuratives qui la différencient de la Marque visée par la demande, et que les produits mentionnés dans cet enregistrement se chevauchent partiellement avec les Produits visés par la demande.

Test en matière de confusion

[17] L’emploi d’une marque de commerce créera de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits ou les services liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail, loués ou exécutés (selon le cas), par la même personne [article 6(2) de la Loi]. Le test en matière de confusion ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce ou noms commerciaux. Il concerne plutôt la confusion quant à la source des produits ou des services.

[18] La question de la confusion est une question de première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la marque de commerce visée par la demande alors qu’il n’a qu’un souvenir imparfait de la marque de commerce de l’opposant. Ce consommateur ordinaire et pressé ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques de commerce [Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 au para 20].

[19] L’application du critère de confusion est un exercice qui consiste à rechercher les faits et à tirer des conclusions [Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27 au para 102]. Toutes les circonstances de l’espèce doivent être évaluées, y compris les facteurs énumérés à l’article 6(5) de la Loi, notamment :

  • le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues;

  • la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage;

  • le genre de produits, services ou entreprises;

  • la nature du commerce;

  • le degré de ressemblance entre les marques de commerce, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

Degré de ressemblance

[20] Même s’il est mentionné en dernier lieu à l’article 6(5) de la Loi, le degré de ressemblance est le facteur susceptible d’avoir le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion. Les autres facteurs ne deviennent importants que si les marques de commerce en question sont jugées identiques ou très similaires [Masterpiece au para 49].

[21] Je suis d’accord avec l’observation de l’Opposante (au paragraphe 105 de ses observations écrites) selon laquelle la Marque nominale de l’Opposante et la Marque visée par la demande sont fortement semblables dans la présentation. Les deux marques de commerce sont des mots d’une seule syllabe comportant quatre lettres. Trois des quatre lettres des marques de commerce sont identiques et apparaissent dans le même ordre, à savoir « ooz ». À mon avis, cela confère aux deux marques, lorsqu’elles sont considérées dans leur ensemble, un degré assez élevé de similarité visuelle. De même, j’estime que la police stylisée utilisée dans la Marque ne différencie pas sensiblement l’impression générale de la Marque de celle de la Marque nominale de l’Opposante. En outre, en l’absence de preuve contraire, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire que les marques de commerce produiraient un son presque identique lorsqu’elles sont prononcées.

[22] En ce qui concerne les idées suggérées par les marques de commerce, il ne semble pas y avoir de ressemblance. Puisqu’il n’y a aucune preuve que la Marque visée par la demande a une signification en anglais ou en français, ou qu’elle suggère une idée particulière, il ne peut y avoir de similitude avec une idée suggérée par la Marque de l’Opposante.

[23] Dans l’ensemble, compte tenu du degré élevé de ressemblance dans la présentation et le son, et malgré l’absence de similitude quant aux idées suggérées, j’estime que ce facteur favorise l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques sont devenues connues

[24] Les marques de commerce possèdent un caractère distinctif inhérent lorsque rien en elles n’oriente le consommateur vers une multitude de sources. La marque de commerce qui peut faire allusion à de nombreuses choses, ou qui se limite à décrire les produits ou les services en question, jouira d’une protection moindre [United Artists Pictures Inc c Pink Panther Beauty Corp, 1998 CanLII 9052 (CAF), [1998] 3 CF 534 au para 23]. Cela dit, une marque de commerce qui ne possède pas de caractère distinctif inhérent peut acquérir un caractère distinctif lorsque’elle devient connue du public consommateur, par exemple, par l’emploi ou la promotion de la marque de commerce sur le marché [voir, par exemple, Mondo Foods Co Ltd c Industries Torrémonde Inc, 2022 CF 926 au para 24].

[25] L’Opposante prétend que les marques de commerce des parties possèdent un caractère distinctif inhérent équivalent [Observations écrites de l’Opposante, para 74]. Je ne suis pas nécessairement d’accord pour dire que les marques de commerce possèdent un caractère distinctif inhérent équivalent, étant donné que la Marque nominale de l’Opposante est un mot connu dans la langue anglaise, alors que la Marque visée demande semble être un terme inventé. Néanmoins, les marques de commerce des parties possèdent toutes deux un degré assez élevé de caractère distinctif en liaison avec leurs produits respectifs, étant donné qu’aucune des marques n’est descriptive ou suggestive de ces produits de quelque manière que ce soit.

[26] Même si elles possèdent des degrés similaires de caractère distinctif, les Marques de l’Opposante (y compris la Marque nominale de l’Opposante) ont également acquis un degré raisonnable de caractère distinctif en devenant connues sur le marché canadien dans une mesure appréciable, alors que la Marque visée par la demande ne l’a pas fait. Sur la base des parties suivantes de l’Affidavit Sinishtaj, je suis convaincu que les Marques de l’Opposante ont été vues et connues par un grand nombre de consommateurs sur le marché canadien :

  • au Canada, Ashh vend plusieurs types de produits, y compris les Produits de l’Opposante, en liaison avec les Marques de l’Opposante, et sous licence de l’Opposante [para 9, 10, 20, et 27, et Pièce D];

  • les ventes des Produits de l’Opposante au Canada sont passées de 27 500 $ en 2016 à plus de 1,3 million de dollars en 2021. Les ventes totales des Produits de l’Opposante au Canada, de 2016 à la date de l’affidavit Sinishtaj, dépassent 4 millions de dollars [para 33];

  • les Produits de l’Opposante sont annoncés au Canada de diverses manières, y compris par le biais de sites Web [para 37 à 41, et Pièces G1 et G2, et H1 et H2], et par des communications personnelles directes avec les détaillants, fournissant des instructions sur la meilleure façon de vendre les Produits de l’Opposante [para 42 et 43];

  • l’Opposante a dépensé plus de 50 000 millions de dollars annuellement en efforts publicitaires au Canada depuis 2016 [para 36]. Ses sites Web ont été consultés par les Canadiens plus de 100 000 fois depuis 2017 [para 38, 41];

  • les Produits de l’Opposante sont également annoncés et promus en liaison avec les Marques de l’Opposante au moyen de communiqués de presse payés [para 45 et 46 et Pièce J], du parrainage d’un festival de musique à Détroit, au Michigan, qui est proche de la frontière canadienne [para 49 et 50 et Pièces L à O], de la participation à des foires commerciales [para 51], de bulletins d’information et de listes de diffusion par courriel [para 52], de catalogues, de brochures et de présentoirs en magasin [para 53 à 55 et Pièce P], et du contenu des médias sociaux [para 56 et Pièces Q1 à Q6]. J’estime qu’il est probable qu’au moins certains consommateurs canadiens aient vu les Marques de l’Opposante par le biais de ces formes de publicité et de promotion. Toutefois, étant donné que l’Affidavit Sinishtaj soit ne dit rien sur l’étendue de cette publicité, soit s’appuie sur des informations provenant de tiers, qui constituent des ouï-dire [para 50, 56], je ne suis pas prêt à tirer des conclusions significatives quant au nombre de consommateurs canadiens touchés par cette publicité et cette promotion;

  • les Produits de l’Opposante et les Marques de l’Opposante ont fait l’objet de critiques sur le site Web canadien de tiers www.torontovaporizer.ca [para 47 et 48, et Pièce K]. Encore une fois, j’estime qu’il est probable qu’au moins certains consommateurs canadiens aient vu ces critiques portant sur les Marques de l’Opposante. Toutefois, étant donné que les éléments de preuve produits par M. Sinishtaj concernant le nombre d’abonnés de tiers sur Facebook, les critiques sur Google et les vues sur YouTube sont obtenus à partir des déclarations figurant sur leur site Web, et constituent donc des ouï-dire, je ne suis pas prêt à tirer des conclusions significatives quant au nombre de Canadiens qui ont vu ces critiques.

[27] En ce qui concerne la Marque visée par la demande, en l’absence de preuve d’emploi, ou de toute autre preuve suggérant que cette marque de commerce est devenue connue au Canada dans une quelconque mesure, rien ne me permet de conclure que la Marque visée par la demande a acquis un quelconque caractère distinctif au Canada.

[28] Compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincu que ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques ont été en usage

[29] Dans sa demande, la Requérante prétend avoir employé la Marque visée par la demande au Canada depuis aussi tôt que le 20 août 2018. Toutefois, la Requérante n’a pas produit d’éléments de preuve pour étayer cette prétention. En l’absence de preuve, je ne suis pas prêt à accepter que la Marque visée par la demande a été employée au Canada depuis le 20 août 2018, ni même qu’elle l’a été du tout. Même si je le faisais, comme indiqué ci-dessous, la preuve démontre l’emploi de la Marque nominale de l’Opposante au Canada depuis au moins 2016. Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre des produits et nature du commerce

[30] En ce qui concerne le genre des produits des parties, je suis essentiellement d’accord avec observations de l’Opposante aux paragraphes 91 et 92 de ses observations écrites. Il existe un chevauchement partiel entre les produits des parties, du moins en ce qui concerne les [traduction] « vaporisateurs oraux pour fumeurs » dans les produits visés par la demande et les [traduction] « atomiseurs oraux pour fumer » mentionnés dans l’enregistrement 546. Concernant les produits qui ne se chevauchent pas directement, les produits sont liés en ce sens qu’ils sont destinés à être utilisés pour fumer ou pour le vapotage.

[31] En ce qui concerne la nature du commerce, je suis d’accord avec observations de l’Opposante aux paragraphes 96 et 97 de ses observations écrites. En l’absence de preuve concernant les voies de commercialisation de la Requérante, il est raisonnable d’inférer que les produits des parties qui se chevauchent et sont liés emprunteraient probablement les mêmes voies de commercialisation.

[32] Compte tenu de ce qui précède, ces facteurs favorisent tous deux l’Opposante.

Circonstance de l’espèce – Famille de Marques

[33] Dans ses observations écrites, l’Opposante affirme qu’elle est propriétaire d’une famille de trois enregistrements OOZE comportant le mot « OOZE » comme élément commun, et que cela lui donne droit à une protection élargie de la marque de commerce. L’Opposante affirme que cette portée élargie de la protection favorise l’Opposante dans l’analyse de confusion [Observations écrites de l’Opposante, para 112 à 128]. Cependant, il a été conclu qu’une [traduction] « famille » de marques est composée de plusieurs marques de commerce différentes qui sont des variantes sur un même thème, comme MACSUNDAY, MCCHEESE et MCFEAST [voir British Columbia Hydro & Power Authority c Union Gas Ltd (1998), 85 CPR (3d) 231 au para 12 (COMC)]. Un seul mot ou une seule expression présenté de différentes manières, par exemple comme une marque nominale et comme une marque figurative stylisée, ne constitue pas une [traduction] « famille » de marques de commerce [voir Now Communications Inc c CHUM Ltd (2003), 32 CPR (4th) 168 au para 35 (COMC)]. Les enregistrements de marque de commerce de l’Opposante visent les marques composées du mot OOZE, ou une version stylisée de ce mot. Ces marques de commerce ne constituent pas une [traduction] « famille » de marques commerce, comme le prétend l’Opposante, ce qui lui donne droit à une protection plus étendue. Par conséquent, je n’estime pas qu’il d’un facteur qui favorise l’Opposante.

Conclusion concernant la confusion

[34] Après avoir examiné toutes les circonstances de l’espèce, je conclus que la probabilité de confusion entre la Marque visée par la demande et la Marque nominale de l’Opposante est, dans le meilleur des cas pour la Requérante, partagée de façon égale. Je tire cette conclusion en me fondant principalement sur le degré de ressemblance entre les marques de commerce, les produits et les voies de commercialisation qui se chevauchent partiellement et qui sont liés, et le degré raisonnable de caractère distinctif acquis par les Marques de l’Opposante (y compris la Marque nominale de l’Opposante) par l’emploi. Étant donné que la Requérante n’a pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que la Marque visée par la demande ne crée pas de confusion, le motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement est accueilli.

Motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement

[35] Pour s’acquitter de son fardeau initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer que ses Marques ont été employées au Canada avant la date pertinente pour ce motif d’opposition, et que ces marques de commerce n’avaient pas été abandonnées à la date de l’annonce de la demande (le 2 février 2022). La date pertinente pour ce motif est la date de production de la demande, soit le 11 janvier 2019, car il n’y a pas de preuve que la Marque visée par la demande a été employée au Canada [articles 16(1)a) et 16(1)c) de la Loi].

[36] Pour les raisons exposées ci-dessus en ce qui concerne la mesure dans laquelle les Marques de l’Opposante sont devenues connues, je conclus que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial. La preuve démontre que les Marques de l’Opposante étaient employées avant le 11 janvier 2019, en liaison avec les Produits de l’Opposante. La preuve établit également que les Marques de l’Opposante n’avaient pas été abandonnées en date du 2 février 2022, puisque les ventes en liaison avec les Marques de l’Opposante se sont poursuivies au-delà de cette date, au moins jusqu’à la date de l’Affidavit Sinishtaj [para 30].

[37] Je conclus également que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime à l’égard de ce motif. À la date pertinente pour ce motif d’opposition, la probabilité de confusion, dans le meilleur des cas pour la Requérante, est partagée de façon égale. J’arrive à cette conclusion pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus en ce qui concerne le motif fondé sur la non-enregistrabilité, en dépit de la preuve quelque peu réduite du caractère distinctif acquis de l’Opposante à la date pertinente pour ce motif. Étant donné que la Requérante n’a pas établi que la Marque visée par la demande ne crée pas de confusion à la date pertinente pour le motif fondé sur l’absence de droit à l’enregistrement, ce motif est accueilli.

Autres motifs d’opposition

[38] Étant donné que deux des motifs d’opposition de l’Opposante ont été accueillis, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs.

Décision

[39] Dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

 

_______________________________

Jaimie Bordman

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

Hortense Ngo

Manon Duchesne Osborne

Cassandre Choquette Sauvageau

Annexe A

Les Produits visés par la demande

[traduction]

Tabac; cigarettes contenant des succédanés de tabac, à usage autre que médical; tabac à priser; blagues à tabac; bouts de cigarettes; pipes à tabac; étuis à cigares; étuis à cigarettes; appareils de poche pour rouler des cigarettes; fume-cigarettes en métal précieux; embouts pour fume-cigarettes; pots à tabac; tabatières; cendriers en métal précieux; crachoirs pour consommateurs de tabac; boîtes à cigares pourvues d’un humidificateur; allumettes; boîtes d’allumettes; briquets pour fumeurs; filtres à cigarettes; cahiers de papier à cigarettes; papier absorbant pour pipes à tabac; papier à cigarettes; vaporisateurs oraux pour fumeurs; cigares; coupe-cigares; fume-cigares; solutions liquides pour cigarettes électroniques; cigarettes électroniques; cigarettes; étuis à cigarettes électroniques.

 


 

Annexe B

Les Marques de l’Opposante

Marque de commerce

État

No de demande et d’enregistrement / Dates

Produits

 

þÿ

 

Enregistrée

Dem. 30-AOÛT-2019

Dem. 1995699 Enr. 01-SEP-2021 Enr. LMC1108200

  • (1)[traduction] Batteries, nommément batteries pour cigarettes électroniques, vaporisateurs oraux pour fumer ainsi que moulins à tabac et à cannabis; chargeurs de batterie pour cigarettes électroniques, vaporisateurs oraux pour fumer ainsi que moulins à tabac et à cannabis

  • (2)Articles chaussants, nommément chaussures, bottes, sandales et pantoufles; couvre-chefs,

nommément chapeaux, petits bonnets, visières et casquettes; chandails à capuchon; chemises

 

 

(3) Atomiseurs oraux pour fumer; plateaux à rouler pour fumeurs; pipes; moulins à tabac

OOZE

Enregistrée

[traduction] (1) Batteries, nommément batteries pour cigarettes électroniques, vaporisateurs oraux pour fumer ainsi que moulins à tabac et à cannabis; chargeurs de batterie pour cigarettes électroniques, vaporisateurs oraux pour fumer ainsi que moulins à tabac et à cannabis

 

Dem. 30-AOÛT-2019

 

Dem. 1988611

 

Enr. 01-SEPTEMBRE-2021

 

Enr. LMC1108110

OOZE

Enregistrée

Dem. 12-JUILLET-2018

[traduction] (1) Atomiseurs oraux pour fumer; pipes électroniques; moulins à tabac.

 

Dem. 1909166

 

 

Enr. 20-MAI-2021

 

 

Enr. LMC1100546

 


 

Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Borden Ladner Gervais LLP

Pour la Requérante : Neomark Ltd.

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