Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 37

Date de la décision : 2024-02-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : BioSyent Pharma Inc.

Requérante : Replete Nutraceuticals Inc.

Demande : 1888495 pour FERAPRO

Introduction

[1] BioSyent Pharma Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la marque de commerce FERAPRO (la Marque), laquelle fait l’objet de la demande no 1888495 par Replete Nutraceuticals Inc. (la Requérante).

[2] La Marque visée par la demande est enregistrée en liaison avec les produits suivants (appartenant à la classe 5 de Nice) : [traduction] « Suppléments alimentaires et nutritifs composés principalement de fer ».

[3] L’opposition est principalement fondée sur une allégation selon laquelle la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce FERAMAX de l’Opposante, antérieurement enregistrée et employée au Canada en liaison avec des produits similaires.

Le dossier

[4] La demande d’enregistrement de la Marque a été produite le 16 janvier 2018, pour un emploi projeté au Canada.

[5] La demande a été annoncée aux fins d’opposition le 4 septembre 2019.

[6] Le 24 septembre 2019, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi).

[7] Les motifs d’opposition sont fondés sur la non-enregistrabilité conformément aux articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi; l’absence de droit à l’enregistrement en vertu des articles 38(2)c) et 16 de la Loi; l’absence de caractère distinctif en vertu des articles 38(2)d) et 2 de la Loi; le fait que la Requérante n’employait pas, ni ne projetait d’employer la Marque en vertu de l’article 38(2)e) de la Loi; et l’absence de droit à l’emploi en vertu de l’article 38(2)f) de la Loi.

[8] Le 21 décembre 2019, la Requérante a demandé une décision interlocutoire pour radier les motifs d’opposition fondés sur l’absence de droit à l’enregistrement et l’absence de droit à l’emploi. Toutefois, la Requérante a subséquemment produit et signifié sa contre-déclaration le 4 mai 2019, avant que la décision demandée ne puisse être rendue. Par conséquent, et comme c’est expliqué dans la lettre du registraire datée du 30 décembre 2019, en vertu de l’article 38(6) de la Loi et de la section II.2 de l’énoncé de pratique intitulée Pratique concernant la procédure d’opposition concernant : Décisions interlocutoires, une fois que la contre-déclaration a été produite et signifiée, les questions relatives au caractère suffisant des actes de procédure de l’Opposante ne sont examinées qu’à l’étape de la décision.

[9] À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit les éléments de preuve suivants :

· affidavit de Robert March, souscrit le 24 avril 2020, à Toronto (l’Affidavit March);

· affidavit de Gail N. Wozny, établi souscrit le 19 mai 2022, à Ottawa (l’Affidavit Wozny), produit en contre-preuve;

· affidavit de Kerry Biggs, établi souscrit le 20 mai 2022, à Ottawa (l’Affidavit Biggs), également produit en contre-preuve.

[10] Mme Wozny et Mme Biggs ont été contre-interrogées, et les transcriptions des contre-interrogatoires ont été versées au dossier.

[11] M. March n’a pas été contre-interrogé au sujet de son affidavit; toutefois, comme il est expliqué ci-dessous, en partie en raison des interruptions causées par la pandémie de COVID-19 à l’époque, les parties ont convenu qu’un affidavit substantiellement similaire d’un autre déposant de l’Opposante dans le cadre d’une autre procédure (ainsi que la transcription et les engagements subséquents du contre-interrogatoire) serait versé au dossier de la présente procédure.

[12] À l’appui de sa demande, la Requérante a produit les éléments de preuve suivants :

· affidavit de Dawn Trach, souscrit le 18 octobre 2021, à Ottawa (l’Affidavit Trach);

· affidavit de Jennifer Nahorniak, souscrit le 14 octobre 2021, à Toronto (l’Affidavit Nahorniak);

· affidavit de Robert Youngson, souscrit le 18 octobre 2021, à Toronto (l’Affidavit Youngson).

[13] Aucun des déposants de la Requérante n’a été contre-interrogé.

[14] Les deux parties ont produit des observations écrites; étant donné que la demande d’audience de chaque partie était conditionnelle à la présentation d’une demande d’audience par l’autre partie, une audience n’a pas été tenue.

Aperçu de la preuve de l’Opposante

[15] L’Opposante est la propriétaire de l’enregistrement de la marque de commerce no LMC739115 pour la marque de commerce FERAMAX (la Marque de commerce de l’Opposante), enregistrée depuis le 29 avril 2009 en liaison avec les produits suivants (les Produits de l’Opposante) :

[traduction]

Préparations pharmaceutiques, suppléments minéraux et suppléments à base de plantes médicinales, nommément préparations à base de fer, hématiniques et suppléments de fer utilisés pour renforcer le sang.

Affidavit March

[16] M. March est le vice-président et dirigeant principal des finances de l’Opposante [para 1]. Il explique que l’Opposante vend des pilules de fer et de la poudre de fer en liaison avec la Marque, et ce, par l’entremise de pharmacies et d’un site Web en ligne. À cet égard, l’Affidavit March établit ce qui suit :

· l’entreprise et l’historique de l’Opposante, en tant qu’entreprise pharmaceutique indépendante qui [traduction] « met l’accent sur la commercialisation de produits qui offrent un avantage reconnaissable aux patients et à leurs fournisseurs de soins de santé, et qui est connue pour sa capacité à introduire de façon efficace et efficiente de nouveaux produits dans le marché canadien » [para 4 et 5];

· le genre des produits FERAMAX de l’Opposante, à savoir des pilules de fer (FERAMAX 150) et de la poudre de fer (FERAMAX Poudre) [para 7 à 9];

· la disponibilité et les ventes de produits FERAMAX de l’Opposante au Canada, qui se chiffrent à plus de 90 millions de dollars en ventes brutes depuis 2008 [para 10 et 11, Pièces B et C];

· l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante sur l’emballage et les présentoirs [para 12 et 13, Pièces D et E];

· la disponibilité des produits FERAMAX de l’Opposante en ligne par l’entremise du site Web de tiers pharmexdirect.com, qui montre comment les produits de l’Opposante sont présentés en ligne en liaison avec la Marque de commerce de l’Opposante [para 14, Pièce F];

· l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante dans l’annonce et la commercialisation des produits FERAMAX de l’Opposante, y compris : dans des annonces imprimées et en ligne [para 15 et 16, Pièces G et H]; dans des documents commerciaux utilisés lors des événements ou distribués au public [para 17 et 18, Pièces I et J]; lors de conférences et d’événements de formation continue [para 19, Pièce K]; sur le site Web de l’Opposante, feramax.com [para 20, Pièces L et M]; et dans les médias sociaux [para 21]. M. March affirme que l’Opposante dépense plus de 2,5 millions de dollars par année pour promouvoir sa marque FERAMAX [para 23];

· des prix remportés par l’Opposante – en particulier, en mai 2019, la marque FERAMAX de l’Opposante [traduction] « a été nommée la marque no 1 de suppléments de fer oraux sans ordonnance recommandée par les médecins et les pharmaciens au Canada pour la quatrième année consécutive selon le Sondage sur les conseils et recommandations de produits sans ordonnances de Pharmacy Practice and Profession Santé » [para 24 et 25, Pièce N];

· la part du marché des produits FERAMAX de l’Opposante par rapport à celle d’autres suppléments de fer vendus dans le marché canadien entre 2013 et 2019 [para 26, Pièce O]. Je note que, des 38 produits identifiés dans le graphique illustratif, plus de la moitié comportent l’élément FER, comme « EURO-FER », « PROFERRIN » et « PALAFER »;

· des imprimés du site Web de la Requérante, ferapro.com (tels qu’ils figuraient en juin 2019), qui décrivent le produit FERAPRO de la Requérante [para 27, Pièce P];

· un imprimé d’une publication de 2019 sur la page Instagram concernant « ferapro 150 », qui compare le produit FERAPRO de la Requérante, le produit FERAMAX de l’Opposante et le produit d’un tiers, et que M. March qualifie de [traduction] « trompeu[se] » [para 28, Pièce Q].

[17] Les parties pertinentes du contre-interrogatoire de M. Goehrum, jointes par la Requérante à l’Affidavit Trach à titre de pièce, seront examinées ci-dessous. Bien que rien ne repose ultimement sur les différences, je note que les Pièces P et Q, et les déclarations connexes (ou similaires) ne sont pas jointes à l’Affidavit Goehrum.

Affidavit Wozny

[18] Mme Wozny se définit comme une résidente d’Edmonton [para 1]. Son affidavit indique simplement qu’en mai 2022, elle a visité une pharmacie à Edmonton, où elle a acheté une boîte de suppléments de fer de marque FERAPRO, ainsi qu’une boîte de suppléments de fer de marque FERAMAX, qui étaient placés une près de l’autre sur les étagères [para 2 à 4, Pièces A et B].

Affidavit Biggs

[19] Mme Biggs est une parajuriste employée par l’agent de l’Opposante [para 1]. Elle atteste qu’en mai 2022, elle a effectué une recherche pour trouver les pharmacies en ligne qui vendent des suppléments de fer [para 2]. Par conséquent, elle atteste que Coal Harbour Pharmacy, Amazon Canada et la Association of Ontario Midwives vendent toutes des suppléments de fer de marque FERAMAX et FERAPRO [para 7]. Elle a joint à son affidavit des imprimés qui montrent les suppléments de fer offerts en vente par chacun des groupes susmentionnés [para 3 à 5, Pièces B à D].

Aperçu de la preuve de la Requérante

Affidavit Trach

[20] Mme Trach est une auxiliaire juridique employée par l’agent de la Requérante [para 1]. Dans son affidavit, elle explique qu’elle a demandé et obtenu du registraire des copies des documents produits dans le cadre de la procédure d’opposition à l’encontre de la demande no 1821234 pour la marque de commerce FERACCRU [para 2 à 4]. Par conséquent, les documents suivants de cette procédure sont joints à l’Affidavit Trach :

· Pièce A : l’affidavit de René Goehrum, souscrit le 16 mai 2019, produit par l’Opposante dans le cadre de la procédure pour FERACCRU;

· Pièce B : la transcription du contre-interrogatoire de M. Goehrum, qui a eu lieu le 7 novembre 2019;

· Pièce C : la réponse aux engagements du contre-interrogatoire de M. Goehrum, datée du 25 janvier 2020;

· Pièce D : l’affidavit de Do Youn Kim, souscrit le 20 août 2020 (l’Affidavit Kim), produit par la requérante dans le cadre de la procédure pour FERACCRU.

[21] Comme l’atteste Mme Trach, en raison de problèmes liés à la pandémie de COVID-19, cette preuve a été présentée de cette façon, au lieu que la Requérante procède au contre-interrogatoire de M. March au sujet de son affidavit essentiellement similaire, et avec le consentement de l’Opposante [para 7, Pièce E].

Affidavit Nahorniak

[22] Mme Nahorniak est une auxiliaire juridique employée par l’agent de la Requérante [para 1]. En octobre 2021, elle a effectué diverses recherches sur Internet, dans des bases de données et dans des dictionnaires [para 2 à 14]. Par conséquent, l’Affidavit Nahorniak a établi tout ce qui suit en date d’octobre 2021 :

· un imprimé de la page « where to purchase » [où acheter] du site Web de l’Opposante, feramax.com [para 2, Pièce A];

· des résultats d’une recherche de marques de commerce actives comportant l’élément FER dont les produits liés appartiennent à la classe 5 de Nice (Pharmaceutiques et herbicides) dans la Base de données sur les marques de commerce canadiennes [para 3, Pièce B];

· des détails de 51 enregistrements de marques de commerce (toutes comportant l’élément FER), ainsi que les détails de la demande d’enregistrement de la Marque [para 4 et 5, Pièces C et D];

· des résultats d’une recherche dans la base de données sur les produits de santé naturels (la base de données sur les PSN) de Santé Canada pour trouver tous les produits actifs dont les noms de marque comportent l’élément FER et dont les ingrédients incluent « iron » [fer] ou « ferric » [ferrique] [para 6 et 7, Pièces E à G];

· des imprimés des détails de 14 produits provenant de la base de données sur les PSN [para 8, Pièce H];

· des résultats d’une recherche dans la Base de données sur les produits de pharmaceutiques (BDPP) de Santé Canada pour tous les produits « actif[s] » ou « commercialisé[s] » dont les noms de produit comportent l’élément FER et dont les ingrédients actifs incluent « iron » [fer] ou « ferric » [ferrique] [para 9, Pièce I];

· des détails de neuf produits provenant de la BDPP, ainsi que des explications terminologiques provenant du site Web de Santé Canada, à partir desquels Mme Nahorniak identifie quatre produits « approuvé[s] » ou « commercialisé[s] » parmi les résultats de recherche de la Pièce I qui [traduction] « étaient destinés à une utilisation humaine » [para 10 à 12, Pièces J à L];

· des imprimés de diverses définitions de dictionnaire, y compris pour les termes « iron » [fer], « fer (French) » [fer (français)], « ferro- (combining form) » [ferro- (forme combinée)], « a- (prefix) » [a- (préfix)], « max » et « pro/pro- » [para 13 et 14, Pièces M à AA].

Affidavit Youngson

[23] M. Youngson est un stagiaire employé par l’agent de la Requérante [para 1]. Dans son affidavit, M. Youngson atteste avoir visité plusieurs pharmacies à Toronto, en octobre 2021, où il a photographié divers suppléments de fer offerts en vente [para 2 à 15, Pièces A à Z]. M. Youngson atteste également qu’il a été informé par certains des pharmaciens avec qui il a discuté que d’autres produits n’étaient pas disponibles à ce moment-là, mais qu’ils étaient normalement disponibles dans ces pharmacies [para 7, 10 et 14].

[24] M. Youngson confirme que les produits qu’il a photographiés lors de ses visites en pharmacie sont en grande partie les mêmes que les produits mentionnés dans l’Affidavit Kim susmentionné et produit en preuve dans le cadre de la procédure pour FERACCRU [para 15, Pièce Z].

[25] L’Affidavit Youngson présente également des captures d’écran du site Web d’un tiers, odanlab.com, dont l’une mentionne le produit FERODAN Sirop et gouttes pour nourrissons [para 17 et 18, Pièces AA et BB].

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[26] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de preuve d’établir les faits inhérents à ses allégations plaidées dans la déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CarswellNat 1053 (CF 1re inst)]. L’imposition d’un fardeau de preuve à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit examinée, il doit exister une preuve suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[27] En ce qui concerne les allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi, comme il est allégué dans la déclaration d’opposition. L’imposition d’un fardeau ultime à la Requérante signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que l’ensemble de la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à l’encontre de la Requérante.

Confusion avec une marque de commerce déposée – article 12(1)d)

[28] En vertu des articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec l’enregistrement no LMC739115 pour la Marque de commerce de l’Opposante, enregistrée depuis le 29 avril 2009 en liaison avec les Produits de l’Opposante.

[29] La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd, 1991 CarswellNat 1119 (CAF)]. Étant donné que l’enregistrement de la Marque de commerce de l’Opposante existe toujours au registre, l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve initial.

[30] Par conséquent, la Requérante doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque (FERAPRO) et la Marque de commerce de l’Opposante (FERAMAX).

Test en matière de confusion

[31] Le test à appliquer pour trancher la question de la confusion est énoncé à l’article 6(2) de la Loi, qui prévoit que l’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou services soient ou non de la même catégorie générale ou figurent ou non dans la même classe de la classification de Nice.

[32] Le test applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire « plutôt pressé » la vue de la Marque en liaison avec les produits visés par la demande, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la Marque de commerce de l’Opposante et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur [voir Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23 au para 20].

[33] Aux fins de cette évaluation, toutes les circonstances pertinentes de l’espèce doivent être prises en compte, y compris celles énoncées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre des produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent.

[34] Les critères ou les facteurs énoncés à l’article 6(5) de la Loi ne forment pas une liste exhaustive et le poids qu’il convient d’accorder à chacun d’eux varie selon le contexte [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22 au para 54]. Dans Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, la Cour suprême du Canada a déclaré que le facteur de l’article 6(5)e), la ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion [para 49] et que, bien que le premier mot dans la marque de commerce puisse être l’élément le plus important dans certains cas, il est préférable de se demander si l’un des aspects de la marque de commerce est particulièrement « frappant ou unique » [para 64].

Caractère distinctif inhérent et mesure dans laquelle les marques de commerce sont devenues connues

[35] Dans ses observations écrites, l’Opposante fait valoir que la Marque de commerce de l’Opposante possède un caractère distinctif inhérent, car [traduction] « c’est mot inventé, dépourvu de logique lorsqu’employé en liaison avec les Produits de l’Opposante » [para 40]. En outre, l’Opposante note que la preuve démontre que la Marque de commerce de l’Opposante est employée en liaison avec les Produits de l’Opposante depuis 2009, tandis que la demande est fondée sur l’emploi projeté de la Marque au Canada [para 42 et 43].

[36] Pour sa part, dans ses observations écrites, la Requérante fait valoir que la Marque de commerce de l’Opposante possède un faible degré de caractère distinctif, soutenant ce qui suit :

· « FER » est le mot français pour « iron » et est également une référence directe au fer en anglais – par exemple, « ferric » [ferrique], « ferrous » [ferreux] et d’autres mots connexes commençant par « fer » [para 69 et 70];

· l’élément FER suggère, voire décrit fortement les produits liés [para 69];

· la preuve montre de nombreuses marques de commerce et noms de produits comportant l’élément FER dans le marché canadien [para 71 et 72];

· dans son contre-interrogatoire, M. Goehrum (le déposant de l’Opposante dans la procédure pour FERACCRU) a reconnu l’existence de plusieurs mots qui comportent l’élément FER et qui sont employés pour décrire du fer ou renvoyer au fer, et que l’élément FER est couramment employé dans le marché canadien en liaison avec des suppléments de fer [para 73 à 76];

· l’élément MAX de la Marque de commerce de l’Opposante est suggestif ou louable, laissant simplement entendre que les Produits de l’Opposante contiennent la dose maximale ou la dose la plus élevée en fer [para 76 à 78].

[37] La Requérante note que le registraire a antérieurement reconnu que l’élément FER suggère fortement le fer [para 80 et 81, renvoyant à Ferring, Inc c Apotex Technologies, Inc, 2013 COMC 225 au para 97; Ferring Inc c Ddrops Company Inc, 2016 COMC 36 au para 76; et BioSyent Pharma Inc. c Shield TX (UK) Limited, 2022 COMC 162 (Feraccru) au para 41].

[38] En résumé, en ce qui concerne le caractère distinctif inhérent de la Marque de commerce de l’Opposante, la Requérante soutient que l’Opposante [traduction] « a simplement cherché dans le vocabulaire courant du commerce un terme qui est à la fois descriptif et largement employé et combiné avec “MAX”, un terme laudateur qui est également descriptif et courant », de sorte que la Marque de commerce de l’Opposante devrait se voir attribuer [traduction] « un degré extrêmement faible de caractère distinctif inhérent » [para 79].

[39] En ce qui concerne la mesure dans laquelle la Marque de commerce de l’Opposante est devenue connue, la Requérante tente de définir la preuve d’emploi et de promotion de la Marque de commerce de l’Opposante comme étant [traduction] « ambigüe », liée aux marques de commerce composites, et comme n’étant [traduction] « non étayée » par des renseignements spécifiques [para 26 à 28, et 142 à 153]. Toutefois, j’accepte que l’Opposante a établi l’emploi et la commercialisation de la Marque de commerce de l’Opposante depuis 2009.

[40] En outre, en dehors de l’existence du site Web de la Requérante en juin 2019, il n’y a aucune preuve évidente de la mesure dans laquelle la Marque est devenue connue au Canada. À ce titre, même si j’avais à conclure que la Marque possède degré de caractère distinctif inhérent plus élevé que celui de la Marque de commerce de l’Opposante, dans l’ensemble, ce facteur favoriserait l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

[41] L’Opposante a établi l’emploi de la Marque de l’Opposante en liaison avec les Produits de l’Opposante depuis 2009. La demande d’enregistrement de la Marque a été produite sur la base de l’emploi projeté au Canada, et il n’y a aucune preuve d’emploi de la Marque subséquente à la date de production de la demande.

[42] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Genre de produits ou entreprises, et nature du commerce

[43] Lorsqu’il est question de considérer le genre des produits des parties en ce qui a trait à la question de la confusion, ce sont les états déclaratifs des produits dans la demande et l’enregistrement en cause qui gouvernent [Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CarswellNat 749 (CAF); Miss Universe, Inc c Bohna, 1994 CarswellNat 1443 (CAF)].

[44] Dans ses observations écrites, l’Opposante soutient que les produits et les entreprises des parties se chevauchent, puisque les parties vendent toutes deux des produits pharmaceutiques et des suppléments composés de fer dans le marché canadien [para 45 à 50].

[45] Pour sa part, la Requérante note que la preuve concernant les produits FERAMAX de l’Opposante indique que ces produits sont des [traduction] « produits de santé naturels homologués en vente libre » qui sont [traduction] « conservés derrière le comptoir » à la pharmacie [para 140]. Cependant, la Requérante définit ses produits comme étant des [traduction] « suppléments alimentaires et nutritionnels composés principalement de fer » [para 138], ce qui laisse entendre que [traduction] « le rôle d’intermédiaire du professionnel de la santé dans l’accès aux produits respectifs » différencie en quelque sorte le genre des produits des parties. Je note que, compte tenu de l’absence de preuve de la part de la Requérante concernant la vente ou la commercialisation de ses produits, cette différence implicite n’est pas nécessairement évidente. Quoi qu’il en soit, la Requérante reconnaît à juste titre [traduction] « [qu’]il y a potentiel chevauchement » entre les produits des parties, mais elle insiste autrement sur l’importance d’autres facteurs dans l’analyse relative à la confusion [para 141].

[46] En effet, je suis d’accord avec l’Opposante qu’il y a un chevauchement clair dans le genre des produits des parties, et qu’il y a, à tout le moins, un risque de chevauchement dans le genre des entreprises des parties et dans la nature du commerce.

[47] Par conséquent, ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[48] Dans ses observations écrites, l’Opposante affirme que, puisque les deux marques de commerce commencent par le préfixe FERA, elles possèdent un degré élevé de ressemblance dans leur présentation et leur [traduction] « premier » son [para 53]. En ce qui concerne les idées suggérées, l’Opposante soutient que les marques de commerce suggèrent la même idée, en ce sens que [traduction] « FERAMAX suggère l’atteinte du niveau maximal », tandis que [traduction] « FERAPRO suggère l’atteinte du niveau le plus élevé, comme un sportif amateur qui devient un “pro” ou un apprenti qui devient un professionnel » [para 55].

[49] En particulier, l’Opposante compare les marques de commerce en cause aux marques de commerce qui ont fait l’objet de la procédure susmentionnée Feraccru. À cet égard, l’Opposante soutient ce qui suit :

[traduction]

Dans l’opposition de FERACCRU, la Commission a déterminé qu’il y avait une différence dans les idées suggérées, entre le « maximum de fer » et l’« accumulation » ou l’« accroissement du fer ». Ce n’est pas le cas en l’espèce. L’idée d’un « maximum de fer » et l’idée du « niveau le plus élevé » se chevauchent directement et créent de la confusion. [Feraccru au para 52.]

[50] La Requérante soutient que l’argument de l’Opposante selon lequel la Marque, FERAPRO, évoque l’idée de [traduction] « l’atteindre du niveau le plus élevé » constitue une [traduction] « interprétation forcée non étayée par la preuve au dossier » et qui est incompatible avec la jurisprudence antérieure qui s’est prononcée sur un élément PRO similaire [para 129 à 131]. La Requérante soutient plutôt que le terme PRO serait compris comme étant une forme abrégée de [traduction] « professionnel », suggérant du professionnalisme ou suggérant que le produit de la Requérante est d’un grade professionnel [para 128]. À titre subsidiaire, la Requérante soutient qu’il pourrait évoquer des idées d’être [traduction] « favorable » ou de quelque chose de similaire– quoi qu’il en soit, elle fait valoir qu’il n’y a rien d’inhérent dans le terme PRO qui [traduction] « serait considéré comme suggérant la concentration de la dose, et encore moins la dose maximale d’un produit » [para 128].

[51] J’ai tendance à être d’accord avec la Requérante que la tentative de l’Opposante de décrire les marques de commerce comme suggérant la même idée est quelque peu forcée. En ce qui concerne les exemples de l’Opposant en ce qui a trait à [traduction] « l’atteinte du niveau le plus élevé » – un apprenti dans un emploi ou un amateur dans un sport – même si ces exemples peuvent être facilement extrapolés de l’élément PRO, la Marque de commerce de l’Opposante ne les évoque pas de manière évidente. Il faut relier les points; il faut fournir des explications. Bien que la logique du raisonnement peut être appréciée et que le raisonnement n’est peut-être pas aussi poussé que ce qui a été plaidé dans Feraccru, cela reste un raisonnement. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où il est nécessaire de tenir compte de l’idée suggérée au-delà du mot lui-même dans une marque nominale, compte tenu du genre des produits en l’espèce – suppléments et préparations de fer – je ne considère pas que l’idée d’un niveau supérieur ou du niveau le plus élevé de fer soit particulièrement distinctive aux fins de la présente analyse.

[52] En outre, je considère les différences dans la présentation et le son comme étant plus importantes que l’élément commun FER qui, en liaison avec les produits pertinents, suggère à tout le moins du fer, comme le démontre la preuve. Comme l’a noté la Requérante, lorsque la première partie d’une marque de commerce est un mot descriptif courant, son importance diminue [para 120 à 125].

[53] Je suis donc d’accord avec la Requérante pour dire que, puisque l’élément FER possède un sens suggestif, voire descriptif en liaison avec les produits pertinents et qu’il est couramment employé dans le commerce, il y a des différences suffisamment significatives entre les marques de commerce dans la présentation et le son, et dans les idées qu’elles suggèrent.

[54] Par conséquent, ce facteur favorise la Requérante.

Autres circonstances de l’espèce – état du registre et état du marché

[55] La preuve de l’état du registre n’est pertinente que dans la mesure où elle permet de tirer des inférences quant à l’état du marché [Ports International Ltd c Dunlop Ltd, 1992 CarswellNat 1431 (COMC); et Welch Foods Inc c Del Monte Corp, 1992 CarswellNat 178 (CF 1re inst)]. Ces inférences ne peuvent être tirées que lorsqu’un grand nombre d’enregistrements pertinents est repéré [Maximum Nutrition Ltd c Kellogg Salada Canada Inc, 1992 CarswellNat 124 (CAF)].

[56] Dans ses observations, la Requérante soutient que la Marque de commerce de l’Opposante ne devrait bénéficier que d’une protection étroite, puisque la preuve de l’état du registre et de l’état du marché indique que des marques de commerce comportant l’élément FER sont couramment adoptées et coexistent librement dans le domaine pharmaceutique [para 84]. À cet égard, elle renvoie à la preuve des deux parties et la précise [para 84 à 103], notant en particulier que M. Goehrum avait admis lors de son contre-interrogatoire que l’élément FER est [traduction] « une description générique courante » [para 94, renvoyant à l’Affidavit Trach, Pièce B, Q444 à Q447]. La Requérante soutient en outre que la preuve au dossier est compatible avec les conclusions antérieures et récentes du registraire dans des affaires concernant des marques de commerce comportant l’élément FER employées en liaison avec des produits de fer similaires, y compris la procédure dans Feraccru [para 108 à 117].

[57] Dans ses observations écrites, l’Opposante note qu’elle n’allègue pas qu’elle seule peut employer des marques de commerce comportant l’élément FER en liaison avec des produits liés au fer [para 63]. L’Opposante fait valoir que le préfixe FERA est important en l’espèce, ne mentionnant qu’une autre marque déposée comportant le préfixe FERA dans la preuve de l’état du registre exposée dans l’Affidavit Nahorniak [para 63 et 64]. Autrement, elle conteste la pertinence de plusieurs marques de commerce comportant l’élément FER dans le registre, soutenant que l’Affidavit Nahorniak [traduction] « fournit une preuve limitée démontrant l’emploi de marques comportant le préfixe FERA qui sont actuellement actives ou employées dans le marché canadien en liaison avec des produits liés au fer, ou même des marques de commerce comportant l’élément FER comme préfixe » [para 67].

[58] L’Opposante qualifie également la preuve de l’état du marché de la Requérante de [traduction] « faible » [para 69 à 73]. À cet égard, elle note des résultats de recherche limités et la pertinence des recherches effectuées dans les deux bases de données de Santé Canada, comme l’indique l’Affidavit Nahorniak [para 70 et 71]. En ce qui concerne les visites de M. Youngson dans diverses pharmacies à Toronto, l’Opposante soutient ce qui suit concernant les produits présentés :

[traduction]

Aucune des marques de commerce ne comporte le préfixe FERA, dans le son ou la présentation. Seules deux […] commencent par le préfixe FER. Les onze […] marques de commerce figurant sur des produits de fer dans le marché canadien ne représentent pas un nombre suffisamment important pour tirer des conclusions significatives concernant l’état du marché à la date pertinente. [para 72.]

[59] Bien que je sois d’accord avec l’Opposante que les résultats de recherche dans les bases de données de Santé Canada ont une valeur limitée, aucun des éléments de preuve ne devrait être pris isolément. Comme l’a noté la Requérante, « [i]l existe […] des façons plus détaillées et probablement plus onéreuses d’établir l’état du marché en ce qui concerne l’adoption ou l’emploi commun d’un terme dans le marché » [para 104, citant Vital Source Inc c Vital Life Pharmaceutical Inc, 2020 COMC 21 au para 87; et Feraccru au para 65].

[60] Bien que l’Opposante affirme que l’élément pertinent est le préfixe FERA (plutôt que seulement l’élément FER), je suis d’accord avec la Requérante qu’une telle approche divise de façon inappropriée les marques de commerce et ignore des marques de commerce similaires dans la présentation et le son, comme celles comportant les éléments FERRI ou FERRO [observations écrites de la Requérante, au para 113, citant Feraccru au para 66].

[61] Compte tenu de l’ensemble de la preuve, je suis d’accord avec la Requérante que FER semble être un élément courant dans des marques de commerce liées à des suppléments de fer et des produits similaires, de sorte qu’il est raisonnable de conclure que les clients sont largement exposés aux marques comportant l’élément FER en liaison avec des suppléments de fer ou des produits pharmaceutiques [para 112].

[62] Compte tenu de ce qui précède, considérés dans leur ensemble, ces facteurs favorisent fortement la Requérante.

Conclusion – confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante

[63] Ayant examiné l’ensemble des circonstances de l’espèce, je conclus que la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime, selon la prépondérance des probabilités, en ce qui a trait à la probabilité de confusion quant à la source des produits des parties. J’arrive à cette conclusion en raison du faible degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties, compte tenu de l’état du marché pertinent en ce qui a trait aux marques de commerce comportant l’élément FER, et nonobstant la preuve d’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante et la probabilité de chevauchement dans le genre des produits et des entreprises des parties, ainsi que dans leurs voies de commercialisation.

[64] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) concernant la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante est rejeté.

Absence de droit à l’enregistrement – article 16

[65] En vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque parce qu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante, pour laquelle une demande avait été produite antérieurement.

[66] Pour s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard d’un motif fondé sur l’article 16(1)b), un opposant doit démontrer qu’une demande d’enregistrement pour sa marque de commerce avait été produite antérieurement au Canada, et que cette demande antérieure était en instance à la date de l’annonce de la marque de commerce du requérant [article 16(2) de la Loi].

[67] Dans ses observations écrites, l’Opposante semble renvoyer à l’article 16(3) de la Loi, réitérant sa position selon laquelle il existe une probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce des parties, et soumettant que, par conséquent, [traduction] « la Requérante n’aurait pas pu être convaincue qu’elle avait ou qu’elle a le droit d’enregistrer [la Marque] » [para 74].

[68] Toutefois, si l’Opposante souhaitait invoquer un motif d’opposition fondé sur l’article 16(3) de la Loi (qui traite de l’« Emploi antérieur ou révélation antérieure » d’une marque de commerce), elle était alors tenue d’étayer ce motif ou de modifier son acte de procédure en conséquence. Comme l’a souligné la Requérante dans ses observations écrites (et faisant écho à sa demande de décision interlocutoire susmentionnée), il n’y avait aucune demande en instance pour la Marque de commerce de l’Opposante à la date d’annonce pertinente; la marque de commerce FERAMAX de l’Opposante a été enregistrée en avril 2009, bien avant l’annonce de la demande pour la Marque, le 4 septembre 2019 [para 158 à 161]. En outre, rien n’indique qu’il y avait d’autres demandes en instance pour la Marque de commerce de l’Opposante à ce moment-là.

[69] Compte tenu de ce qui précède, l’acte de procédure est insuffisant et n’est pas corrigé par la preuve au dossier.

[70] Quoi qu’il en soit, même si l’Opposante s’était acquittée d’une façon ou d’une autre de son fardeau initial à l’égard de ce motif (ou d’un motif fondé sur l’article 16(3) de la Loi), je ne conclurais pas que mes conclusions ci-dessus concernant l’analyse de la confusion sont substantiellement différentes, nonobstant toute date importante antérieure.

[71] Compte tenu de ce qui précède, le motif d’opposition fondé sur l’article 16 de la Loi est rejeté.

Absence de caractère distinctif – article 2

[72] En vertu des articles 38(2)d) et 2 de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Marque ne distingue pas, au Canada, les produits de la Requérante puisque la Marque ne distingue pas et n’est pas adaptée à distinguer les produits de la Requérante de ceux de l’Opposante.

[73] La date pertinente pour ce motif est la date de production de l’opposition, à savoir le 24 septembre 2019.

[74] L’article 2 de la Loi définit le terme « distinctive » comme suit :

« distinctive » Se dit de la marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire de ceux d’autres personnes, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

[75] Une marque de commerce « distingue véritablement » en acquérant un caractère distinctif par son emploi, lui conférant ainsi un caractère distinctif en fait. D’autre part, une marque de commerce qui est « adaptée à les distinguer ainsi » est une marque qui ne dépend pas de son emploi pour acquérir son caractère distinctif, puisqu’elle possède un caractère distinctif inhérent [voir Astrazeneca AB c Novopharm Ltd, 2003 CAF 57 au para 16].

[76] En vertu d’un motif fondé sur l’absence de caractère distinctif comme en l’espèce, l’Opposante a le fardeau initial d’établir qu’à la date pertinente, sa marque de commerce (i) était connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec les produits pertinents et (ii) avait, au Canada, une réputation « importante, significative ou suffisante » de façon à annuler le caractère distinctif de la Marque [voir Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657 aux para 33 et 34; et Association dentaire canadienne c Ontario Dental Assistants Association, 2013 CF 266 au para 42, conf par 2013 CAF 279]. Dans Auld Phillips Ltd c Suzanne’s Inc, 2005 CAF 429, bien que le contexte d’une procédure de radiation en vertu de l’article 57 de la Loi, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’« [é]videmment, il ne peut arriver que rarement qu’un commerçant unique soit en mesure de faire perdre à une marque son caractère distinctif, mais rien ne l’empêche en principe » [para 7].

[77] En l’espèce, comme il a été mentionné ci-dessus, j’accepte que la Marque possède un certain caractère distinctif inhérent en liaison avec les produits visés par la demande. Bien que la Marque de commerce de l’Opposante soit connue dans une certaine mesure au Canada en liaison avec les Produits de l’Opposante depuis 2009, il est impossible d’affirmer qu’il existe une preuve que la réputation de la Marque de commerce de l’Opposante était importante, significative ou suffisante de façon à annuler ce caractère distinctif inhérent de la Marque. À cet égard, en notant en partie que la demande est fondée sur l’emploi projeté, il n’y a aucune preuve d’annulation.

[78] Par conséquent, étant donné que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau initial, le motif d’opposition fondé sur l’article 2 est rejeté.

[79] Quoi qu’il en soit, dans la mesure où ce motif est en partie ultimement fondé sur la question de la confusion, j’arriverais à la même conclusion que celle que j’ai tirée ci-dessus concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d), nonobstant la date pertinente différente.

Absence d’emploi et d’emploi projeté – article 38(2)e)

[80] En vertu de l’article 38(2)e) de la Loi, l’Opposante fait valoir qu’à la date de production de la demande au Canada, la Requérante n’employait pas et n’avait pas l’intention d’employer la Marque en liaison avec les produits énumérés dans la demande.

[81] Je note que l’Opposante n’aborde pas particulièrement ce motif dans ses observations écrites. Quoi qu’il en soit, je suis d’accord avec la Requérante que l’Opposante n’a produit aucune preuve à l’appui de ce motif [para 170 à 172]. En effet, ce motif n’est pas suffisamment étayé et il n’est pas corrigé par la preuve au dossier.

[82] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e) de la Loi est rejeté.

Absence de droit à l’emploi – article 38(2)f)

[83] En vertu de l’article 38(2)f) de la Loi, l’Opposante fait valoir qu’à la date de production de la demande au Canada, la Requérante n’avait pas le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits visés par la demande.

[84] Encore une fois, l’Opposante n’aborde pas particulièrement ce motif dans ses observations écrites, le motif n’est pas suffisamment étayé et il n’y a aucune preuve pour corriger l’acte de procédure ou pour autrement appuyer ce motif.

[85] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f) de la Loi est rejeté.

Décision

[86] Compte tenu de ce qui précède, selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette l’opposition.

 

_______________________________

Andrew Bene

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

Anne Laberge

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne

 


 

 

 

 

Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Smart & Biggar S.E.N.C.R.L.

Pour la Requérante : Ardeshir Darabi

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