Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Une feuille d’érable sur du papier graphique

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 36

Date de la décision : 2024-02-29

[TRADUCTION CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Wheel Pros, LLC.

Requérante : KMC Chain Industrial Co., Ltd.

Demande : 1,889,156 pour KMC & Dessin

Introduction

[1] KMC Chain Industrial Co., Ltd. (la Requérante) a produit la demande d’enregistrement pour la marque de commerce KMC & Dessin (la Marque) reproduite ci-dessous :

KMC & Dessin

[2] La Marque visée par la demande est enregistrée en liaison avec les produits suivants (les Produits de la Requérante) :

[traduction]

(1) Chaînes à rouleaux pour motos; pièces et accessoires de vélo, nommément chaînes de vélo, pignons de vélo, pignons et plateaux de vélo, arbres de transmission pour vélos, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos; pièces et accessoires de moto, nommément chaînes de moto.

[3] Wheel Pros, LLC. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la Marque. L’opposition est principalement fondée sur des allégations selon lesquelles la Marque crée de la confusion avec quatre marques de commerce enregistrées par l’Opposante en liaison avec les roues de véhicules et les produits liés aux roues, établis ci-dessous (collectivement, les Marques de l’Opposante).

Marque de commerce

No d’enregistrement

Produits et services

KMC

LMC921,216

[traduction]
Jantes de roue pour véhicules automobiles et pièces constituantes connexes.

KMC WHEELS

LMC1,003,482

[traduction]
Jantes de roues de véhicule et composants connexes.

KMC ROCKSTAR & Dessin

LMC1,005,126

[traduction]
Roues de véhicule automobile et composants connexes.

XD KMC & DESSIN

LMC1,007,456

[traduction]
Roues de véhicule automobile et composants connexes.

[4] Pour les raisons qui suivent, la demande est refusée à l’égard des produits [traduction] « arbres de transmission pour vélos » et [traduction] « poulies pour vélos ».

Le dossier

[5] La demande a été produite le 20 mars 2018. Une demande révisée a été produite le 26 février 2020. La demande a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 25 novembre 2020. Le 21 mai 2021, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi). Je note que la Loi a été modifiée le 17 juin 2019. Puisque la Demande en l’espèce a été annoncée après le 17 juin 2019, c’est la Loi dans sa version modifiée qui s’applique (voir l’article 69.1 de la Loi).

[6] Les motifs d’opposition sont résumés ci-dessous :

  • En contravention aux articles 38(2)a) et 30(2)a) de la Loi, le terme [traduction] « poulies pour vélos » n’est pas conforme aux exigences de l’article 30(2) de la Loi puisqu’il ne décrit pas les produits dans les termes ordinaires du commerce.

  • En contravention à l’article 38(2)a.1) de la Loi, la Requérante a produit la demande de mauvaise foi [traduction] « dans le cadre de sa stratégie mondiale continue de miner en toute malhonnêteté les intérêts de l’Opposante au Canada » en produisant une demande de marque de commerce excessivement large et parce que la Requérante connaissait les Marques de l’Opposante et les produits liés à celles-ci.

  • En contravention aux articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable parce que, à la date de production de la demande, la marque créait de la confusion avec les Marques de l’Opposante qui avaient été enregistrées.

  • En contravention aux articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque au Canada en liaison avec les Produits parce qu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les Marques de l’Opposante qui avaient été antérieurement employées au Canada avant la date de production de la demande.

  • En contravention aux articles 38(2)c) et 16(1)b) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque au Canada en liaison avec les Produits parce qu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les Marques de l’Opposante pour lesquelles des demandes avaient été antérieurement produites au Canada.

  • En contravention aux articles 38(2)d) et 2 de la Loi, la Marque ne distingue pas les Produits de la Requérante puisqu’elle ne distingue pas ces produits de ceux de l’Opposante et puisqu’elle ne possède aucun caractère distinctif inhérent.

  • En contravention à l’article 38(2)e) de la Loi, la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits [traduction] « pièces et accessoires de vélo, nommément chaînes de vélo, pignons de vélo, pignons et plateaux de vélo, arbres de transmission pour vélos, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos ».

[7] Le 29 juillet 2021, la Requérante a signifié et produit une contre-déclaration. Les deux parties ont produit des éléments de preuve, lesquels sont discutées ci-dessous. La déposante de la Requérante a été contre-interrogée au sujet de son affidavit. Seule l’Opposante a produit des observations écrites; aucune audience n’a été tenue.

Preuve

Preuve de l’Opposante

[8] À titre de preuve dans cette procédure, l’Opposante a produit ce qui suit :

  • un affidavit d’Eric Greiving, gestionnaire du développement des produits pour l’Opposante, assermenté le 24 novembre 2021;

  • deux affidavits de Runa A, juriste-conseil-assistante chez l’agent au dossier de l’Opposante, les deux assermentés le 29 novembre 2021;

  • une copie certifiée de la marque de commerce KMC de l’Opposante, enregistrement no LMC921,216;

  • un certain nombre de copies certifiées de documents de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle, y compris deux demandes de marques de commerce et trois certificats d’enregistrement pour des marques de commerce formées de KMC et une décision d’opposition de l’EUIPO où une opposition de la Requérante contre une marque de commerce de l’Opposante a été rejetée.

[9] L’affidavit Greiving comprend les renseignements suivants :

  • L’Opposante est le distributeur des roues de marque KMC pour le Canada pour le compte de KMC Products, Inc., une entreprise des États-Unis.

  • L’Opposante fait [traduction] « la promotion active » des roues KMC au Canada depuis septembre 2002 et a ouvert une usine pour la fabrication de telles roues au Canada en 2016.

  • Pièce A : des photos et des dossiers de ventes pour des roues arborant « KMC » illustrant quatre transactions au Canada entre janvier 2020 et novembre 2021.

  • Pièce B : des photos et des dossiers de ventes de roues arborant « KMC WHEELS » illustrant onze transactions au Canada entre janvier 2020 et novembre 2021.

  • Pièce A : des photos et des dossiers de ventes pour des roues arborant « XD KMC » illustrant 34 transactions au Canada entre janvier 2020 et novembre 2021.

  • L’affidavit comprend un tableau des revenus en dollars américains de janvier 2016 à novembre 2021 généré par l’Opposante pour les ventes de roues arborant une marque de commerce KMC au Canada, présentant des ventes ventilées par province, mais par année, avec les ventes variant d’approximativement 1 200 $ pour l’Île-du-Prince-Édouard à plus de 1,1 million de dollars pour la Colombie-Britannique, avec des ventes totales de plus de 3,3 millions de dollars.

[10] Le premier affidavit de Runa A (Premier Affidavit A) comprend les renseignements suivants :

  • Pièces A et B : des captures d’écran du site Web de l’Amérique du Nord de la Requérante à store.kmcchain.us du 25 juin 2021. Mme A note que les produits vendus comprennent des chaînes pour vélos de montagne, des chaînes pour vélos de route, des chaînes pour vélos électriques, des chaînes BMX, des chaînes Track & Fixie, des chaînes antirouille, des liens de branchement, des outils supplémentaires et des vêtements et que le site Web ne présente aucun des produits chaînes à rouleaux, pignons de vélo, plateaux de vélo, arbres de transmission pour vélos, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos ou chaînes de moto.

  • Pièce C : les résultats d’une recherche à l’aide les mots clés « KMC chain » sur amazon.ca du 25 juin 2021. Mme A affirme que les résultats de recherche comprennent des chaînes de vélos, des maillons de chaîne de vélos, des demi-maillons de vélos, des leviers pour maillon manquant, des outils de chaîne renversables, des outils d’ouverture de maillons manquants, des outils de fermeture de maillons manquants, des ensembles de chaînes pour vélos, des autocollants de chaînes et des trousses d’outils pour chaînes. La déposant note que la recherche n’a relevé aucun résultat pour pignons de vélo, plateaux de vélo, arbres de transmission, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos et glissières de guide-chaîne.

  • Pièce D : les résultats d’une recherche d’images sur google.ca pour « bicycle pulleys » du 26 novembre 2021. La déposante affirme que les résultats comprennent deux types de poulies de vélo, y compris un appareil d’entreposage qui peut lever un vélo jusqu’au plafond et une poulie de dérailleur arrière de vélo.

[11] Le deuxième affidavit de Runa A (Deuxème Affidavit A) comprend les renseignements suivants :

  • Pièce A : des dossiers de l’EUIPO pour la demande de marque de commerce de l’Opposante pour « KMC ».

  • Pièces B et C : les décisions d’annulation de l’EUIPO pour une marque de commerce « KMC » et une marque de commerce [traduction] « KMC & Dessin » appartenant à la Requérante.

  • Pièces D, E, G et H : des dossiers pour les demandes et les enregistrements de marques de commerce appartenant à la Requérante et ses affiliés des offices de la propriété intellectuelle de Taïwan, de la Chine, de l’Australie et des États-Unis. Dans une affaire ultérieure, des dossiers indiquent qu’une opposition a été accueillie contre la demande de marque de commerce « KMC » de la Requérante et la demande a été abandonnée en 2019.

  • Pièce F : des dossiers de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada de demandes et d’enregistrements de marques de commerce de la Requérante et de l’Opposante et des documents de négociations de règlements antérieurs.

Preuve de la Requérante

[12] À titre de preuve dans cette procédure, la Requérante a produit l’affidavit de Hsieh Chieh Ni, superviseure juridique pour la Requérante, assermentée le 22 avril 2022. L’affidavit de Mme Hsieh comprend les renseignements suivants :

  • La Requérante est un fabricant de chaînes à rouleaux dont le siège social est établi en Taïwan et qui vend ses produits au Canada par l’entremise d’amazon.ca ainsi que par l’entremise de boutiques de vélos, de fabricants, de distributeurs et de détaillants en ligne qui soit sont situés au Canada, soit vendent au Canada.

  • L’affidavit comprend un tableau des revenus pour les ventes des Produits de la Requérante au Canada depuis 2014, avec des ventes dans les milliers de dollars pour chaque année. Mme Hsieh affirme que tous ces produits sont [traduction] « étiquetés et marqués avec une marque de commerce KMC » et que certains arborent la Marque depuis 2015.

  • Pièce B : une photo d’un kiosque faisant voir la Marque, lequel, selon les affirmations de Mme Hsieh, provient d’une exposition de vélos de montagne au Canada en août 2015. Lors de son contre-interrogatoire, Mme Hsieh a affirmé que la date de cette photo est 2017 plutôt que 2015.

  • Pièce C : des captures d’écran du site Web de la publication Bicycle Retailer and Industry News qui, selon les affirmations de Mme Hsieh, est une première source de nouvelles et de renseignements au sujet de l’industrie des vélos qui rejoint un public de cyclistes, de détaillants de vélos, de fabricants, de distributeurs, de cadres de direction et d’autres, y compris au Canada. Mme Hsieh affirme que la Requérante a dépensé plus 2 000 dollars américains pour placer des publicités dans les numéros de mars, d’avril, de mai, de septembre et de novembre 2017 de cette publication et plus de 7 000 $ pour placer des publicités dans des numéros de 2019. La Marque de la Requérante ne figure dans aucune de ces captures d’écran.

  • Pièce D, E et I : des imprimés de sites Web de détaillants de vélos, de pièces de vélos et de pièces de motos indiquant que les produits de la Requérante sont vendus par ces détaillants.

  • Pièce F : des photos d’emballages pour chaînes de vélo qui sont représentatives des produits vendus par la Requérante depuis au moins 2018, accompagnées d’une facture pour une vente de telles chaînes au Canada en date du 20 mars 2018. Bien que la copie versée dans la preuve soit de piètre qualité, Mme Hsieh confirme dans son affidavit que ces emballages arborent la Marque et la forme de deux cercles semble être visible autour du mot « KMC » dans la photo de la première pièce. Par conséquent, j’accepte que l’emballage pour ces produits arbore la Marque.

  • Pièce G : des captures d’écran d’amazona.ca illustrant la disponibilité de [traduction] « pignons KMC » qui, selon les affirmations de Mme Hsieh, [traduction] « sont vendus au Canada depuis de nombreuses années ». La Marque de la Requérante est arborée sur une photo de l’emballage pour de tels produits de pignons.

  • Pièce H : des photos des chaînes de moto de la Requérante et leur emballage, accompagnées d’une facture pour une vente de tels produits à un acheteur canadien en 2016. Je note que l’emballage pour ces produits ne semble pas arborer la Marque de la Requérante.

  • Mme Hsieh affirme que chacun des Produits de la Requérante a été vendu ou est destiné pour la vente au Canada en liaison avec la Marque de la Requérante.

[13] Le 22 avril 2022, Mme Hsieh a été contre-interrogée au sujet de son affidavit.

Contre-preuve de l’Opposante

[14] À titre de contre-preuve dans cette procédure, l’Opposante a produit un troisième affidavit de Mme A, assermenté le 17 février 2023. L’affidavit indique seulement que Mme A a reçu un courriel de l’agent de la Requérante le 18 octobre 2022 contenant une copie numérisée du passeport de Mme Hsieh, indiquant que sa date de naissance est le 5 novembre 1992.

Analyse

Motif d’opposition : Article 38(2)a)

[15] L’Opposante a fait valoir que la demande ne satisfait pas aux exigences des articles 38(2)a) et 30(2)a) de la Loi en ce sens que les produits visés par la demande « poulies pour vélos » ne sont pas décrits en des termes ordinaires du commerce. La date pertinente pour évaluer ce motif est la date de production de la demande [Georgia-Pacific Corp c Scott Paper Ltd (1984) 3 CPR (3d) 469 (COMC) à la p 475].

[16] Un motif d’opposition fondé sur l’article 30(2)a) de la Loi comporte deux questions : premièrement, celle de savoir si l’état déclaratif des produits est dressé dans des termes ordinaires du commerce, et, deuxièmement, celle de savoir s’il désigne valablement les produits spécifiques [Whirlpool SA c Eurotherm Holdings Limited, 2010 COMC 171]. Le fardeau initial imposé à un opposant à l’égard d’un motif fondé sur l’article 30(2)a) est léger et il peut s’acquitter par argumentation seulement [voir Mcdonald’s Corp c MA Comacho-Saldana International Trading Ltd (1984), 1 CPR (3d) 101 à la p 104 (COMC) et Pro Image Sportswear Inc c Pro Image Inc (1992) 42 CPR (3d) 566 (COMC)].

[17] La section 2.4.5.2 du Manuel d’examen des marques de commerce, intitulée « Produits ou services spécifiques », énonce le critère en trois parties suivant pour aider à déterminer si un état déclaratif des produits désigne un produit ou un service « spécifique » au sens de la Loi :

1. Les produits ou services sont-ils assez spécifiques pour permettre de déterminer si l’alinéa 12(1)b) de la Loi sur les marques de commerce s’applique? Une marque qui donne une description claire de la nature ou de la qualité des produits ou services n’est pas enregistrable.

2. Les produits ou les services sont-ils assez spécifiques pour s’assurer que le requérant n’obtiendra pas une protection trop étendue? Par exemple, l’approbation de produits décrits comme étant un logiciel, sans plus de précisions, accorderait au requérant une protection trop étendue.

3. Les produits ou les services sont-ils assez spécifiques pour permettre d’évaluer la confusion? Une marque qui peut être confondue avec une marque de commerce déposée ou avec une marque de commerce en instance d’enregistrement n’a pas à être enregistrable.

[18] L’Opposante fait valoir que la demande n’est pas conforme aux exigences de l’article 30(2)a) de la Loi puisque le terme [traduction] « poulies pour vélos » peut faire référence à un appareil d’entreposage de vélo qui peut lever un vélo ou une partie du système de dérailleur arrière du vélo, comme il est établi dans l’affidavit susmentionné de Rune A. De plus, l’Opposante remarque que [traduction] « poulies pour vélos » n’est pas inscrit dans le Manuel des produits et services de l’OPIC.

[19] En l’espèce, je suis d’accord avec l’Opposante pour dire qu’elle s’acquitte de son fardeau initial aux termes de ce motif à l’égard des produits visés par la demande [traduction] « poulies pour vélos » parce que ce qui précède suffit à remettre en cause la conformité à l’article 30(2)a) en l’espèce en ce qui concerne la question de savoir si ces produits sont décrits en termes suffisamment précis à la lumière des deuxième et troisième volets du test susmentionné. Comme l’a fait remarquer l’Opposante, l’état déclaratif de la demande est ambigu en ce sens qu’il est susceptible de faire l’objet de plus d’une interprétation.

[20] Puisque la Requérante n’a présenté aucune preuve, encore moins des observations démontrant que les produits [traduction] « poulies pour vélos » sont présentés en termes ordinaires du commerce et sont suffisamment spécifiques, elle ne s’acquitte pas de son fardeau ultime qui lui incombe en vertu de ce motif de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que la demande est conforme à l’article 30(2)a) de la Loi.

[21] Par conséquent, ce motif d’opposition est accueilli à l’égard des produits visés par la demande [traduction] « poulies pour vélos ».

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)a.1)

[22] L’Opposante allègue que la Requérante a produit la demande de mauvaise foi [traduction] « dans le cadre de sa stratégie mondiale continue de miner en toute malhonnêteté les intérêts de l’Opposante au Canada ». L’Opposante affirme que la Requérante, qui fabrique des chaînes de vélo et de moto, [traduction] « a une histoire de produire des demandes de marques de commerce excessivement larges pour la Marque de mauvaise foi dans d’autres administrations, dont certaines ont fait l’objet d’une opposition de l’Opposante accueillie ». De plus, l’Opposante affirme que la Requérante [traduction] « a également tenté par le passé de bloquer, de mauvaise foi, l’enregistrement et l’emploi légitimes de l’Opposante de certaines ou de l’ensemble des [Marques] de l’Opposante au Canada et à l’étranger ». Enfin, l’Opposante observe qu’elle a acquis une réputation importante pour ses produits arborant les Marques de l’Opposante, lesquelles étaient connues de la Requérante.

[23] Bien que la date à laquelle la demande a été produite est la date pertinente pour l’analyse en vertu de l’article 38(2)a.1) de la Loi, une preuve ultérieure peut également être pertinente lorsqu’elle aide à clarifier la raison pour la production de la demande [Beijing Judian Restaurant Co Ltd c Meng, 2022 CF 743 (Beijing Judian) au para 38; Pentastar Transport Ltd c FCA US LLC, 2020 CF 367 au para 98]. Bien que ce soit la demande dans sa version modifiée le 26 février 2020 qui est en question dans cette procédure, j’estime qu’il est à la fois pertinent et nécessaire d’également tenir compte de la demande originale produite le 20 mars 2018 et d’y faire référence [voir Cerverceria Modelo, SA de CV c Marcon (2008), 70 CPR (4th) 355 (COMC)].

[24] En ce qui a trait aux fardeaux respectifs des parties, lorsqu’il y a des faits qui relèvent exclusivement des connaissances de la Requérante, la preuve circonstancielle et les conclusions déduites des faits démontrés peuvent être suffisantes pour établir les objectifs de la Requérante au moment de la production, alors que la preuve par ouï-dire et la vague conjecture ne le sont pas [Beijing Judian au para 39; Beijing Jingdong 360 Du E-Commerce Ltd c Zhang, 2019 CF 1293 aux para 23 et 24; Domaines Pinnacle Inc c Les Vergers de la Colline, 2016 CF 188 au para 68].

[25] L’Opposante remarque que, lors de la production de la demande pour la Marque le 20 mars 2018, les produits suivants ont fait l’objet d’une demande pour l’emploi projeté au Canada :

[traduction]

Chaînes à rouleaux pour véhicules; chaînes silencieuses pour véhicules; arbres de transmission pour véhicules terrestres; pignons; engrenages et courroies pour véhicules; poulies pour véhicules; tendeurs; glissières de guide-chaîne; pièces et accessoires de vélo, nommément chaînes de vélo, pignons de vélo, pignons et plateaux de vélo, arbres de transmission pour vélos, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos; pièces et accessoires pour moto, nommément chaînes de moto, chaînes silencieuses pour motos, pignons pour motos, engrenages de moto, arbres de transmission pour motos, courroies pour motos, poulies pour motos, tendeurs pour motos, glissières de guide-chaîne pour motos; pièces et accessoires d’automobile, nommément chaînes d’automobile, chaînes silencieuses pour automobiles, pignons d’automobile, engrenages d’automobile, arbres de transmission pour automobiles, courroies d’automobile, poulies pour automobiles, tendeurs pour automobiles, glissières de guide-chaîne pour automobiles.

[26] En réponse aux objections soulevées par l’examinateur de marques de commerce, la Requérante a supprimé [traduction] « emploi projeté » de sa demande et a modifié la liste pour les Produits de la Requérante indiqués ci-dessus. L’Opposante remarque que, lors du contre-interrogatoire de Mme Hsieh, elle a affirmé que certains des produits dans la demande originale étaient destinés à un [traduction] « développement futur », qu’on lui avait dit de ne pas répondre à la question de savoir si la demande initiale couvrait [traduction] « des pièces et accessoires d’automobile » et qu’elle était [traduction] « incertaine » quant à savoir si la Requérante développait des pièces automobiles.

[27] Selon l’opinion de l’Opposante, la demande originale représente une demande excessivement large produite de mauvaise foi [traduction] « pour diminuer ou bloquer la protection des marques de l’Opposante et étendre la protection des marques de la Requérante bien au-delà de leur emploi comme indicateur de source des produits de la Requérante et par conséquent au-delà d’une fin commerciale légitime de la Requérante ». À cet égard, l’Opposante fait valoir que la Requérante a démontré un tel motif comportemental dans plusieurs administrations, y compris la production de demandes de marques de commerce en liaison avec des produits de pièces automobiles et de pneus d’automobile à Taïwan et en Chine, respectivement, lesquelles ont été subséquemment annulées dans le cadre de procédures dans ces pays jointes au Deuxième Affidavit A.

[28] L’Opposante fournit la preuve que la Requérante a produit une demande pour une marque de commerce figurative KMC lorsque la Requérante a proposé un règlement. La demande a subséquemment été retirée. Autre que d’être une autre preuve que la Requérante connaissait l’Opposante, je n’estime pas que le fait de produire et de subséquemment retirer cette demande soit une preuve de mauvaise foi. L’Opposante inclut également une preuve supplémentaire qui semble être couverte par le privilège du règlement puisqu’elle est de la nature de discussions du règlement. Par conséquent, je n’accorderai aucun poids à cette preuve [voir Source Media Group Corp c Black Press Group Ltd, 2014 CF 1014 au para 18].

[29] La preuve de l’Opposante démontre que la Requérante était bien consciente des marques de commerce et de l’entreprise existantes de l’Opposante à la date pertinente, puisque les parties sont impliquées dans des litiges relatifs aux marques de commerce depuis au moins 2007. Si les produits de pièces et d’accessoires d’automobile dans la demande originale étaient toujours en cause, il se pourrait que l’Opposante soit en mesure de s’acquitter de son fardeau pour le motif fondé sur la mauvaise foi en liaison avec ces produits. Cependant, puisqu’ils ne font plus partie de la demande, la question est maintenant caduque à l’égard de ces produits.

[30] Je ne suis pas d’avis que le motif d’opposition fondé sur la mauvaise foi puisse être accueilli à l’égard des Produits de la Requérante dans leur version actuelle. La Requérante a fourni la preuve à l’effet qu’elle a vendu à tout le moins des chaînes de vélo en liaison avec la Marque à la date pertinente. Gardant à l’esprit que cette dernière preuve peut également être pertinente lorsqu’elle aide à clarifier la raison pour la production de la demande, je note que la Requérante a également démontré qu’elle a vendu des pignons de vélo et des chaînes de moto après la date pertinente en liaison avec la Marque ou l’une de ses autres marques de commerce KMC, lesquelles sont enregistrées pour [traduction] « chaînes à rouleaux pour l’industrie » et [traduction] « chaînes de vélo, chaînes de moto ». Les autres Produits de la Requérante sont d’autres pièces et accessoires pour vélos; j’estime qu’il n’est pas clair comment une demande en liaison avec des produits liés à l’industrie de la Requérante, et pas de l’Opposante, pourrait être de mauvaise foi dans ce contexte.

[31] Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 12(1)d)

[32] L’Opposante allègue que, contrairement à l’article 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable en raison des enregistrements de l’Opposante pour les Marques de l’Opposante. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que ces enregistrements existent toujours [voir Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial pour le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d).

[33] Comme l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, je dois déterminer si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de confusion entre la Marque de la Requérante et les enregistrements de l’Opposante susmentionnés. La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[34] Dans l’application du test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont expressément énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à ces facteurs énumérés [voir, en général, Mattel USA Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22 et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27 (Masterpiece)]. De plus, dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a déclaré que le degré de ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[35] Enfin, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion entre des produits ou services provenant d’une source qui est considérée comme provenant d’une autre source. En l’espèce, la question posée par l’article 6(2) est de savoir s’il y aurait confusion entre les produits et services vendus sous la Marque de telle sorte qu’ils seraient considérés comme fournis par l’Opposante.

[36] Dans l’exécution de l’analyse de la confusion, je me concentrerai sur la marque de commerce KMC de l’Opposante, enregistrement no LMC921,216 (la Marque KMC de l’Opposante), puisque j’estime qu’elle représente le meilleur argument de l’Opposante en ce qui concerne la question de la confusion.

Caractère distinctif inhérent et acquis

[37] En général, les marques de commerce composées d’une simple combinaison de lettres ou d’initiales sont globalement considérées comme des marques faibles avec un faible degré de caractère distinctif inhérent [voir GSW Ltd c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (CF 1re inst) aux p 163 et 164; et Alfred Grass Gesellschaft mbh Metallwarenfabrik c Grant Industries Inc (1991), 47 FTR 231 (CF 1re inst)].

[38] L’Opposante observe que, bien que les marques de commerce composées d’une combinaison de lettres ou d’initiales sont considérées en général comme ayant un faible degré de caractère distinctif inhérent, elle affirme que les lettres « KMC » font référence à la femme du fondateur du prédécesseur de l’Opposante. Cependant, ce fait allégué n’est pas mentionné dans la preuve de l’Opposante. Puisque la Marque KMC de l’Opposante est composée seulement des lettres « KMC », elle possède un faible degré de caractère distinctif inhérent.

[39] En revanche, la Marque comprend un élément figuratif qui semble être sous la forme d’un maillon dans une chaîne de vélo. Cependant, les éléments figuratifs qui ne sont pas suggestifs d’un aspect des produits ou services du propriétaire de la marque de commerce ne renforcent peut-être pas de façon significative le caractère distinctif de la marque de commerce [voir, par exemple, Groupe Première Moisson Inc c Pumpernickel’s Franchise Corporation, 2019 COMC 99 au para 45]. Par conséquent, j’estime qu’elle possède seulement un degré légèrement plus élevé de caractère distinctif inhérent.

[40] Le caractère distinctif d’une marque de commerce, même une marque faible composée d’initiales, peut être rehaussé par son emploi et sa promotion au Canada [voir Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst); GSW, précitée]. À cet égard, l’Opposante fait valoir qu’elle a généré plus de 3 millions de dollars américains en revenus au Canada de 2016 à 2021 des roues arborant les Marques de l’Opposante; je note que l’ensemble des Marques de l’Opposante comporte les lettres « KMC » et constituerait donc la présentation de la Marque KMC de l’Opposante.

[41] En revanche, les chiffres des ventes de la Requérante depuis 2014 sont significativement moins élevés que ceux de l’Opposante et on ne sait pas combien de ces ventes sont celles de produits liés à la Marque. Dans le même ordre d’idées, il n’est pas clair que les personnages publicitaires inclus par la Requérante représentent la publicité des Produits de la Requérante en liaison avec la Marque.

[42] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.

Période pendant laquelle les marques ont été en usage

[43] La Requérante et l’Opposante ont toutes deux fourni des chiffres des ventes généralisés, avec les ventes de produits de l’Opposante arborant la Marque KMC de l’Opposante remontant présumément à 2016 et les ventes de produits de la Requérante arborant la Marque remontant à 2015. L’Opposante a fourni des chiffres de ventes pour un produit en particulier arborant la Marque KMC de l’Opposante remontant à 2020 ou 2021, alors que la Requérante a fourni une preuve concrète de transaction de produits arborant la Marque en 2018.

[44] Puisque la preuve démontre que les parties ont commencé à employer leurs marques de commerce respectives à quelques années de l’une et l’autre, ce facteur ne favorise aucune des parties.

Genre de produits, de services ou d’entreprises et nature du commerce

[45] Lorsqu’on examine les articles 6(5)c) et d) de la Loi, c’est l’état déclaratif des produits et services, tels que définis dans les enregistrements invoqués par l’Opposante et l’état déclaratif actuel des Produits dans la demande d’enregistrement de la Marque, qui régit l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Toutefois, puisque chaque état déclaratif doit être lu dans l’optique de déterminer le type probable d’entreprise envisagé, une preuve de la nature véritable des commerces exercés par les parties est utile [voir Mcdonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd, 1996 CanLII 3963 (CAF); Mcdonald’s Corp c Silcorp Ltd (1989), 55 CPR (2d) 207 (CF 1re inst), conf par (1992), 41 CPR (3d) 67 (CAF)].

[46] L’Opposante fait valoir que la demande initiale de la Requérante incluait des [traduction] « pièces et accessoires pour motos » et des [traduction] « pièces et accessoires d’automobile » qui créeraient une probabilité de confusion avec les Marques de l’Opposante. Je suis d’accord avec l’Opposante qui si les « pièces et accessoires d’automobile » étaient demeurés dans la demande, il y aurait eu un important chevauchement entre les produits et le commerce des parties. Cependant, la présente demande ne comprend aucun produit automobile et limite les [traduction] « pièces et accessoires pour motos » à [traduction] « chaînes pour motos ». L’Opposante ne suggère pas que les Produits de la Requérante représentés dans la présente demande seraient d’un genre semblable ou traverseraient des voies de commercialisation semblables, que ceux des produits liés aux Marques de l’Opposante. En effet, je note que dans une procédure d’opposition antérieure impliquant ces parties, dans laquelle l’opposition de la Requérante à la demande de l’Opposante pour sa marque KMC WHEELS a été rejetée, l’Opposante a fait valoir, et le registraire l’a accepté, que les produits des parties diffèrent grandement et qu’il est peu probable qu’il y ait un quelconque chevauchement dans les voies de commercialisation respectives des parties [voir KMC Chain Industrial Co, Ltd c Wheel Pros, LLC, 2018 COMC 39 (Affaire KMC WHEELS) aux para 49 à 56, citant Bridgestone Corp c Campagnolo Srl, 2012 COMC 182, pour la proposition que les pièces de vélo sont fondamentalement différentes des pneus, des tubes et des roues pour automobiles].

[47] Compte tenu de la preuve dont je dispose en l’espèce, et en l’absence d’une quelconque suggestion du contraire, j’accepte que les Produits de la Requérante tels que présentés dans la présente demande sont d’un genre différent et seraient probablement vendus par des voies de commercialisation qui ne chevauchent pas celles des produits liés à la Marque KMC de l’Opposante (ou l’une des Marques de l’Opposante).

[48] Par conséquent, ces facteurs favorisent la Requérante à un degré significatif.

Degré de ressemblance

[49] Lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, la loi est claire qu’il faut prendre en considération les marques de commerce dans leur ensemble; il n’est pas approprié de les placer côte à côte dans le but de les comparer et de relever les ressemblances ou les différences entre leurs éléments constitutifs. La Cour suprême du Canada dans Masterpiece a indiqué que l’approche préférable pour comparer les marques de commerce consiste à déterminer d’abord s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement frappant ou unique.

[50] En l’espèce, le seul élément de la Marque KMC de l’Opposante est les lettres « KMC ». La Marque de la Requérante, en revanche, comprend à la fois les lettres « KMC » et la forme de maillon de chaîne de vélo. L’Opposante fait valoir que cet élément graphique n’est pas distinctif et insignifiant comparativement à l’élément « KMC », affirmant que [traduction] « les éléments graphiques ne doivent pas être ajoutés à une marque nominale lors de l’évaluation de la portée possible de l’emploi » et citant Domaines Pinnacle c Constellation Brands, 2016 CAF 302. Cependant, la Marque en question présentement n’est pas une marque nominale, mais une marque figurative, contrairement à la marque du répondant dans cette affaire. J’estime que la forme de maillon de chaîne est un élément frappant de la Marque.

[51] Néanmoins, j’accepte qu’il existe un certain degré de ressemblance visuelle entre les deux marques, surtout du point de vue du consommateur occasionnel qui est un peu pressé. Sur le plan phonétique, les marques de commerce sont identiques. En ce qui concerne les idées suggérées, la Marque KMC de l’Opposante ne suggère aucune idée en particulier, alors que l’élément figuratif de la Marque de la Requérante suggère un maillon de chaîne de vélo.

[52] Par conséquent, j’estime que ce facteur favorise l’Opposante dans une certaine mesure.

Autres circonstances de l’espèce : Enregistrements canadiens existants de la Requérante

[53] Mme Hsieh note dans son affidavit que la Requérante possède déjà deux enregistrements de marques de commerce pour KMC au Canada, à savoir LMC481,631 pour des [traduction] « chaînes de rouleaux pour l’industrie » et LMC411,274 pour [traduction] « chaînes de vélo, chaînes de moto ». Il est bien établi que l’existence d’enregistrements antérieurs appartenant à une partie ne donne pas automatiquement le droit à une partie d’enregistrer une marque de commerce semblable [voir GroupeLavo Inc c Proctor & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (COMC) au para 15; voir aussi Highland Feather Inc c American Textile Company, 2011 COMC 16 au para 20]. Cependant, dans Caesarstone Sdot-Yam Ltd c Ceramiche Caesar SPA, 2016 CF 895, la Cour fédérale a conclu qu’il s’agissait d’une circonstance pertinence que les services en question étaient une [traduction] « extension » des produits contenus dans un enregistrement antérieur (dans le sens que les services comptaient pour la vente de détail et l’installation des produits englobés par les produits dans l’enregistrement antérieur).

[54] En l’espèce, Mme Hsieh affirme que la Propriétaire [traduction] « cherche maintenant à enregistrer, essentiellement, une version figurative de ses marques de commerce KMC, couvrant les mêmes produits et pièces et accessoires conçus pour la même industrie que pour ses enregistrements antérieurs ». Bien que certains des produits de la Requérante ne sont pas [traduction] « les mêmes » que ceux dans les enregistrements existants de la Requérante (comme l’a remarqué Mme Hsieh lors de son contre-interrogatoire), j’accepte malgré tout qu’ils sont étroitement liés aux produits dans les enregistrements existants de la Requérante. Comme c’était le cas dans Caesarstone, la Marque visée par la demande est une version figurative des enregistrements existants de la Requérante; je note que ces marques nominales arborent une ressemblance encore plus rapprochée à la Marque KMC de l’Opposante que la Marque en question. Par conséquent, j’estime qu’il s’agit d’une circonstance de l’espèce pertinente favorisant la Requérante [voir Caesarstone aux para 50 à 56; l’affaire KMC WHEELS aux para 60 et 61; Kenneth Cole Productions, Inc c Mankind Grooming Studio for Men Inc, 2023 COMC 23 au para 54].

Autres circonstances de l’espèce : Enregistrements canadiens existants de l’Opposante

[55] L’Opposante fait valoir qu’elle possède déjà des enregistrements pour les Marques de l’Opposante susmentionnées. Dans la mesure où l’Opposante affirme qu’elle a droit à un degré de protection accru en raison de l’existence d’une famille de marques de commerce, pour pouvoir invoquer une famille de marques de commerce, un opposant doit prouver l’emploi de chaque marque de commerce de la famille alléguée [McDonald’s Corp c Alberto-Culver Co (1995), 61 CPR (3d) 382 (COMC); Mcdonald’s Corp c Yogi Yogurt Ltd (1982), 66 CPR (2d) 101 (CF 1re inst)].

[56] En l’espèce, l’Opposante a démontré l’emploi d’au moins plusieurs de ses marques de commerce KMC déposées, y compris KMC, KMC WHEELS et XD KMC. Je suis donc convaincu que l’Opposante a démontré l’emploi d’une petite famille de marques de commerce KMC. Cependant, la petite taille de la famille de marques de commerce KMC de l’Opposante, le petit nombre de transactions démontrées liées à certaines de ces marques de commerce et le fait que KMC est présenté en liaison avec d’autres éléments dans la plupart des cas atténuent le poids qui peut être accordé à cela à titre de circonstance de l’espèce [pour une conclusion semblable, voir Align Technology, Inc c Osstemimplant Co, Ltd, 2019 COMC 101 au para 23].

[57] Par conséquent, j’estime qu’il s’agit d’une circonstance de l’espèce pertinente qui favorise l’Opposante à un dégré modéré.

Conclusion

[58] Dans l’application du test en matière de confusion, je l’ai examinée comme une question de première impression et de souvenir imparfait et j’ai tenu compte de toutes les circonstances de l’espèce. Dans la plupart des cas, le facteur le plus important pour déterminer la question de confusion est le degré de ressemblance entre les marques de commerce [Masterpiece; Beverley Bedding & Upholstery Co c Regal Bedding & Upholstery Ltd (1980), 47 CPR (2d) 145 (CF 1re inst) à la p 149, conf par 60 CPR (2d) 70 (CAF)]. En outre, l’article 6(2) de la Loi ne porte pas sur la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais plutôt sur la confusion quant à la source des produits.

[59] Il est difficile de monopoliser des marques de commerce faibles composées seulement des initiales; en effet, comme il a été indiqué dans Acklands c Anamet (1996), 67 CPR (3d) 478 (CF 1re inst) à la p 483, [traduction] « […] un seul commerçant ne devrait pas avoir le droit d’obtenir des droits de propriété exclusifs sur une lettre ou une combinaison de lettres qui correspondent à ses initiales au détriment d’autres commerçants qui ont peut-être les mêmes initiales ». Bien que je reconnaisse que l’Opposante a acquis une réputation dans une certaine mesure en liaison avec KMC, il s’agit du type de marque de commerce auquel il n’est pas accordé une large portée de protection, avec des petites différences étant suffisantes pour distinguer une marque de commerce semblable [pour une conclusion semblable, voir 385229 Ontario Ltd c ServiceMaster Co, 2012 COMC 59 au para 51]. En l’espèce, le facteur du degré de ressemblance et le facteur du caractère distinctif inhérent et acquis favorisent l’Opposante, et l’Opposante a démontré qu’elle possède une petite famille de marques de commerce formées de KMC. Cependant, j’estime que la différence dans le genre des produits et la nature du commerce et l’existence des enregistrements de longue date de la Requérante pour des marques de commerce très semblables en liaison avec des produits connexes sont suffisantes pour pencher en faveur de la Requérante. Par conséquent, j’estime que la Requérante s’est acquittée de son fardeau.

[60] Le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est donc rejeté.

Motif d’opposition : Article 16(1)a)

[61] En vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, l’Opposante fait valoir que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque parce qu’à la date de production de la demande, la Marque créait de la confusion avec les Marques de l’Opposante qui avaient été antérieurement employées au Canada avant la date de production de la demande.

[62] Afin de s’acquitter de son fardeau initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer qu’au moins une de ses marques de commerce a été employée avant la date de production de la demande de la Requérante (20 mars 2018) et n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande (25 novembre 2020). Par conséquent, la preuve pertinente que l’Opposante peut invoquer est la preuve d’emploi antérieure à la date de la production de la demande.

[63] Comme il est noté ci-dessus, la preuve de l’Opposante fait référence à l’Opposante ouvrant un entrepôt au Canada en 2016 pour distribuer ses produits et à la promotion active de ses produits en liaison avec la marque de commerce « KMC » depuis septembre 2002. Cependant, afin de démontrer un emploi au sens de l’article 4(1) de la Loi, l’Opposante était tenue de fournir la preuve de présentation de ses marques de commerce en liaison avec un transfert dans la pratique normale du commerce au Canada. Bien que l’affidavit Greiving démontre la façon dont les Marques de l’Opposante ont été arborées sur les produits de roues, la seule preuve de transferts dans la pratique normale du commerce à la date pertinente est un sommaire des revenus de janvier 2016 à novembre 2021. Le fait que ces revenus sont présentés sous la forme d’un montant regroupé (ventilé par province, mais pas par année) fait qu’il m’est impossible de déterminer les parties qui précèdent la date pertinente [pour des conclusions semblables, voir Unilever Canada Inc c Superior Quality Foods Inc (2007), 62 CPR (4th) 75 (COMC); CoreLogic Inc c MLXjet Media Corp, 2012 COMC 67 au para 32]. Dans le même ordre d’idées, l’Opposante ne fournit aucune preuve démontrant ses efforts de faire la promotion de ses marques de commerce depuis 2002, comme des chiffres de dépenses publicitaires.

[64] En l’absence de preuve démontrant que l’une des Marques de l’Opposante avait été employée ou révélée avant la date pertinente, je ne suis pas convaincu que l’Opposante se soit acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition. Je note que même si je devais conclure du contraire, j’arriverai à des conclusions semblables dans l’analyse de confusion à celles établies pour le motif fondé sur l’article 12(1)d), particulièrement compte tenu du fait que l’Opposante n’aurait pas démontré que l’une de ses marques de commerce avait acquis un caractère distinctif à la date pertinente pour ce motif d’opposition.

[65] Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 16(1)b)

[66] L’Opposante fait valoir que la Requérante n’a pas le droit d’enregistrer la Marque parce qu’elle crée de la confusion avec les demandes antérieurement produites pour les Marques de l’Opposante. Toutefois, l’Opposante a le fardeau initial de prouver que ces demandes de marque de commerce étaient pendantes à la date de production de la demande en question et qu’elles étaient pendantes le jour où la demande a été annoncée. Puisque les demandes pour chacune des Marques de l’Opposante ont abouti à l’enregistrement en 2015 et en 2018, avant la date de l’annonce de la demande de la Requérante (25 novembre 2020), l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau en ce qui concerne ce motif d’opposition.

[67] Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté parce que l’Opposante ne s’est pas acquittée de son fardeau de preuve.

Motif d’opposition : Article 2

[68] L’Opposante a également fait valoir que, contrairement à l’article 2 de la Loi, la Marque ne distingue pas véritablement et n’est pas adaptée pour distinguer les Produits de la Requérante des produits et services liés aux Marques de l’Opposante. La date pertinente à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur l’absence du caractère distinctif est la date de production de l’opposition (le 21 mai 2021) [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc (2004), 34 CPR (4th) 317 (CF 1re inst)].

[69] Dans Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657 aux para 33 et 34, la Cour fédérale a indiqué qu’une marque de commerce pouvait annuler le caractère distinctif d’une autre marque de commerce si elle était connue au Canada dans une certaine mesure, à tout le moins, et que sa réputation au Canada était importante, significative ou suffisante ou si elle est bien connue dans une région particulière du Canada. Un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif n’est pas limité à la vente des produits ou services au Canada. Il peut également être fondé sur la preuve de la connaissance ou de la réputation de la marque de commerce d’un opposant, y compris celle qui est diffusée par le bouche-à-oreille ou par des articles de journaux et de magazines [Motel 6, Inc c No 6 Motel Ltd (1981), 56 CPR (2d) 44 (CF 1re inst)].

[70] Je concentrerai encore une fois mon analyse sur la Marque KMC de l’Opposante puisqu’elle représente le meilleur argument de l’Opposante. La preuve d’emploi de l’Opposante, détaillée dans l’affidavit Greiving et démontrant d’importantes ventes partout au Canada, est suffisante pour lui permettre de s’acquitter de son fardeau de preuve. Cependant, comme la différence entre les dates pertinentes n’a pas d’incidence sur mon analyse de ce motif d’opposition, je parviens aux mêmes conclusions en ce qui concerne la confusion que celles énoncées dans le motif fondé sur l’article 12(1)d).

[71] Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Motif d’opposition : Article 38(2)e)

[72] L’Opposante a fait valoir que la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque au Canada en liaison avec les produits [traduction] « pièces et accessoires de vélo, nommément chaînes de vélo, pignons de vélo, pignons et plateaux de vélo, arbres de transmission pour vélos, courroies de vélo, poulies pour vélos, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos ». À cet égard, l’Opposante affirme que la Requérante fabrique des chaînes de vélo et de moto et a un historique de produire des demandes de marques de commerce excessivement larges de mauvaise foi.

[73] La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de production de la demande.

[74] Puisque les faits pertinents sont plus facilement disponibles au requérant dans le cadre de ce motif d’opposition, le fardeau de preuve à l’égard de ces motifs est léger et la quantité de preuve nécessaire pour s’en acquitter peut être très faible [Allergan Inc c Lancôme Parfums & Beauté & Cie, société en nom collectif (2007), 64 CPR (4th) 147 (COMC); Canadian National Railway c Schwauss (1991), 35 CPR (3d) 90 (COMC); Green Spot Co c John M Boese Ltd (1986), 12 CPR (3d) 206 aux p 210-11 (COMC)]. Pour s’acquitter de son fardeau en invoquant la preuve du requérant, l’opposant doit démontrer que la preuve du requérant est « clairement incompatible » avec les revendications énoncées dans la demande ou « soulève un doute » sur celles-ci [voir Ivy Lea Shirt Co c Muskoka Fine Watercraft & Supply Co (1999), 2 CPR (4th) 562 (COMC), conf par 2001 CFPI 252; et Bacardi & Co c Corporativo de Marcas GJB, SA de CV, 2014 CF 323 aux para 33, 50 et 54].

[75] En l’espèce, Mme Hsieh a indiqué que, bien que la Requérante [traduction] « puisse être principalement connue pour son entreprise de chaînes de vélo, elle produit également des pièces et accessoires KMC pour vélos et de nouveaux produits sont constamment en développement pour cette industrie ». Elle affirme également que l’ensemble des produits de la Requérante [traduction] « sont des produits d’intérêt pour [la Requérante] qui ont été vendus ou sont destinés pour la vente au Canada en liaison avec cette marque de commerce ».

[76] Au cours du contre-interrogatoire de Mme Hsieh, lorsque questionnée au sujet des documents qu’elle a examinés pour vérifier ses déclarations concernant les nouveaux produits en cours de développement, Mme Hsieh a expliqué qu’elle a examiné un [traduction] « accord de confidentialité » fourni par la section de recherche et développement de l’entreprise. Lorsqu’on lui a demandé si ce document faisait référence à des arbres de transmission pour vélos, Mme Hsieh a répondu que ce n’était pas le cas. Lorsqu’on lui a demandé si le document mentionnait des poulies de vélo, des courroies de vélo et des plateaux de vélo, Mme Hsieh a indiqué que c’était le cas. Elle n’a pas été questionnée au sujet des autres produits dans la demande, comme les [traduction] « tendeurs pour vélos » ou [traduction] « glissières de guide-chaîne pour vélos ».

[77] Compte tenu de ce que Mme Hsieh a admis lors de son contre-interrogatoire que le document qu’elle a examiné concernant les produits en développement par la Requérante faisait référence à certains produits, mais pas à des arbres de transmission pour vélos, j’estime que l’Opposante s’est acquittée de son léger fardeau de preuve à l’égard des produits [traduction] « arbres de transmission pour vélos », puisqu’elle a remis en question le fait que la Requérante employait ou projetait d’employer la Marque en liaison avec ces produits.

[78] Puisque la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime de démontrer qu’elle employait ou projetait d’employer la Marque en liaison avec ces produits, ce motif d’opposition est accueilli à l’égard des produits [traduction] « arbres de transmission pour vélos ».

Décision

[79] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement en ce qui a trait aux produits [traduction] « arbres de transmission pour vélos » et [traduction] « poulies pour vélos » et je rejette l’opposition en ce qui a trait au reste des produits établis ci-dessous :

[traduction]

(1) Chaînes à rouleaux pour motos; pièces et accessoires de vélo, nommément chaînes de vélo, pignons de vélo, pignons et plateaux de vélo, courroies de vélo, tendeurs pour vélos, glissières de guide-chaîne pour vélos; pièces et accessoires de moto, nommément chaînes de moto.

___________________________

G.M. Melchin

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne

 


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Paul D. Jones (Jones & Co.)

Pour la Requérante : Aventum IP Law LLP

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.