Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Une feuille d’érable sur du papier graphique

Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 70

Date de la décision : 2024-03-28

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : Cozen O’Connor LLP

Propriétaire inscrite : Sabre Retail Fashion Limited

Enregistrement : LMC1042755 pour HYGGE

Introduction

[1] À la demande de Cozen O’Connor LLP (la Partie requérante), le registraire des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi), le 18 juillet 2022, à Sabre Retail Fashion Limited (la Propriétaire), la propriétaire inscrite de l’enregistrement no LMC1042755 pour la marque de commerce HYGGE (la Marque).

[2] L’avis enjoignait à la Propriétaire de fournir une preuve établissant que la Marque était employée au Canada, en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement, à tout moment entre le 18 juillet 2019 et le 18 juillet 2022. Si la Marque n’avait pas été ainsi employée, la Propriétaire devait fournir une preuve indiquant la date à laquelle la Marque a été employée en dernier lieu et la raison du défaut d’un tel emploi depuis cette date. Les produits et services spécifiés dans l’enregistrement lorsque l’avis a été donné sont reproduits à l’Annexe A de cette décision.

[3] Les définitions pertinentes d’« emploi » sont énoncées aux articles 4(1) et 4(2) de la Loi comme suit :

4(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

4(2) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services.

[4] Dans le cas des services, la présentation d’une marque de commerce dans l’annonce est suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 4(2) de la Loi, du moment que le propriétaire est en mesure d’exécuter les services au Canada et prêt à le faire. [Wenward (Canada) Ltd c Dynaturf Co (1976), 28 CPR (2d) 20 (COMC)].

[5] Il est bien établi que de simples allégations d’emploi ne sont pas suffisantes pour établir l’emploi dans le contexte des procédures en vertu de l’article 45 [Plough (Canada) Ltd c Aerosol Fillers Inc (1980), 53 CPR (2d) 62 (CAF)]. Bien que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre des procédures prévues à l’article 45 soit peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance de preuves [Union Electric Supply Co Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)], le propriétaire doit tout de même établir une preuve prima facie [Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184 au para 2]. À cet égard, des faits suffisants doivent être fournis pour permettre au registraire d’en arriver à une conclusion d’emploi de la marque de commerce en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente [John Labatt Ltd c Rainer Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF)].

[6] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a fourni un affidavit assermenté le 17 février 2023, de sa secrétaire Judith Bean, affirmant l’emploi en liaison avec seulement certains des produits et services qui étaient couverts par l’enregistrement à ce moment.

[7] Subséquemment, le 16 juin 2023, la Propriétaire a volontairement supprimé un certain nombre de produits et services de l’enregistrement, essentiellement ceux pour lesquels Mme Bean n’a pas affirmé l’emploi de la Marque, et a regroupé ceux restants selon le système de classification de Nice. Les produits et services restant dans l’enregistrement, énumérés par classe de Nice (Cl), sont les suivants (respectivement les Produits et les Services) :

[traduction]

Produits

Cl4 (1) Bougies.

Cl18 (2) Sacs tout-aller.

Cl25 (3) Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements habillés.

Cl25 (4) Articles chaussants, nommément bottes, sandales.

Services

Cl35 (1) La vente en ligne de ce qui suit : bougies, cuir et similicuir, sacs, sacs tout-aller, chemises et robes, vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés sur un site Web de marchandises générales.

[8] Les deux parties ont produit des observations écrites et ont été représentées à l’audience.

La preuve de la Propriétaire

[9] Dans son affidavit, Mme Bean affirme que la Propriétaire, une entreprise constituée en société au Royaume-Uni en 2012 qui fait également affaire sous le nom « Mint Velvet », a employé la Marque au Canada sans interruption au cours de la période pertinente, dans la pratique normale du commerce, en liaison avec les Produits et Services suivants :

[traduction]

Bougies; sacs tout-aller; vêtements, nommément vêtements tout-aller (p. ex., bas); vêtements, nommément vêtements habillés (p. ex., robes); articles chaussants, nommément bottes; articles chaussants, nommément sandales.

La vente en ligne de ce qui suit : bougies, cuir et similicuir, sacs, chemises et robes, vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant clients aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés sur un site Web de marchandises générales.

[10] Je note que la liste de Mme Bean diffère du libellé des Produits et Services qui se trouve maintenant dans l’enregistrement puisqu’elle fournit des [traduction] « bas » comme exemple des produits [traduction] « vêtements tout-aller » et des [traduction] « robes » comme exemple des produits [traduction] « vêtements habillés » et elle omet [traduction] « sacs tout-aller » de l’objet des Services.

[11] La Partie requérante soutient que la Propriétaire [traduction] « a défini à son avantage » les groupes de produits et services susmentionnés dans l’effort [traduction] « de masquer les questions » et ainsi maintenir des produits et services pour lesquels la Propriétaire n’a aucune preuve directe d’emploi [observations écrites, aux para 51, 74 et 87]. Je ne suis pas d’accord et j’estime que Mme Bean a simplement identifié le sous-ensemble de produits et services visés par l’enregistrement pour lesquels l’emploi est allégué avant que les produits et services restants ne soient supprimés de l’enregistrement.

[12] En appui de ses affirmations d’emploi, Mme Bean joint les pièces suivantes à son affidavit :

  • ·Les Pièces B2 et B3 sont, respectivement, i) une capture d’écran du site Web Mint Velvet de la Propriétaire mintvelvet.co.uk (le Site Web de la Propriétaire), indiquant que « Mint Velvet » est un nom commercial de la Propriétaire; et ii) un imprimé de l’enregistrement de marque de commerce canadienne de la Propriétaire pour MINT VELVET, couvrant des produits et services semblables à ceux pour lesquels la Marque avait été enregistrée à l’origine. Je note que MINT VELVET est arboré comme logo d’entreprise et marque maison dans un style de lettrage simple, mais distinct (le Logo MINT VELVET) sur le Site Web de la Propriétaire, les médias sociaux et les étiquettes de produits, comme il est décrit ci-dessous. L’importance de cet aspect de l’image de marque de la Propriétaire sera discutée de façon plus détaillée ci-dessous dans mon analyse de la liaison de la Marque avec les Services.

  • ·La Pièce C est une série de photos qui, selon les affirmations de Mme Bean, sont représentatives de l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits au cours de la période pertinente. La pièce comprend des prises rapprochées et à grand angle des mêmes articles. La Partie requérante fait valoir que les produits illustrés dans les prises rapprochées sont en général non identifiables; toutefois, j’estime qu’il est clair que les prises rapprochées illustrent les mêmes articles que les prises à plus grand angle à côté d’elles. La Marque est présentée sous la forme d’un logo, à côté d’un Logo MINT VELVET plus petit, sur les étiquettes et les étiquettes volantes fixées à divers produits, y compris une petite pochette ayant ce qui semble être une fermeture éclair, un sac en tricot en forme de poche avec une fermeture à rabat, un revêtement de bouteille d’eau chaude avec des attache-pompons, des bas épais doublés de peluche, des bottes tricotées doublées de peluche, des pantoufles en fausse fourrure de type sandale comportant deux larges bandes avec des boucles de métal, des bas épais avec des pompons pendants et une jaquette foncée (dark robe, en anglais) sur un cintre. La Marque est imprimée sous forme d’un logo directement sur des bougies et est également cousue dans un lettrage simple et épais suivi d’une ellipse sur le revêtement de bouteille d’eau chaude.

  • ·Les Pièces D1 et D2 sont des captures d’écran du Site Web de la Propriétaire, représentatives de la façon dont il était apparu au Canada au cours de la période pertinente. Une page d’accueil offre du magasinage en ligne avec des prix en dollars canadiens et des droits de douane déjà inclus, ainsi que l’expédition au Canada gratuite pour les commandes de plus de 250 $ CA. Une page de produits, sur mintvelvet.co.uk/products/, présente une paire de [traduction] « Pantoufles à bande de fausse fourrure de couleur crème » avec un prix en dollars canadiens et l’option d’[traduction] « AJOUTER AU PANIER ». Je note que le menu dans le haut de cette page met en valeur un large Logo MINT VELVET, suivi par les catégories [traduction] « Nouveaux articles », [traduction] « Vêtements », [traduction] « Chaussures », [traduction] « Accessoires », [traduction] « Enfants » et [traduction] « Inspirez-moi ». La Marque est apposée seulement sur l’étiquette de la semelle intérieure des pantoufles.

  • ·La Pièce E1 contient des captures d’écran de la page Web HYGGE du Site Web de la Propriétaire, sur mintvelvet.co.uk/‌pages/hygge. L’avis de droit d’auteur indique une date de 2023, mais Mme Bean confirme que la page est représentative de la façon dont la section HYGGE du site est apparue au cours de la période pertinente. Je note le même menu horizontal dans le haut de la page, mais avec un Logo MINT VELVET beaucoup plus petit, sous une bannière offrant l’expédition au Canada. Le corps de la page Web comporte des images d’un modèle dans un environnement domiciliaire présentant des vêtements de nuit, des vêtements d’intérieur et des accessoires de la gamme HYGGE, avec des liens vers [traduction] « MAGASINER DES VÊTEMENTS DE NUIT » et [traduction] « MAGASINER AVEC STYLE ». Les images illustrent des ensembles de pyjamas, des pantoufles, une bougie réparatrice, un revêtement de bouteille d’eau chaude, un masque pour les yeux et (dans l’image finale de vêtements) une jaquette foncée (dark robe, en anglais). Le texte d’accompagnement décrit la gamme de produits par [traduction] « L’art du confort », [traduction] « morceaux pour temps libres » et [traduction] « la joie de sortir des vêtements de travail ou des jeans », mais fait également la promotion d’un [traduction] « nouveau côté plus habillé de Hygge », présentant des ensembles de hauts et de pantalons garnis de plumes qui [traduction] « servent également de vêtements de soirée ultimes pour recevoir à la maison ou sortir ». La Marque est superposée sur une image de couverture dans le haut de la page et figure également dans une partie du texte.

  • ·Les Pièces E2 à E5 contiennent chacune des captures d’écran de la même page Web HYGGE, mais avec un élément différent du menu horizontal souligné dans chaque pièce : [traduction] « Enfants » (Pièce E2), [traduction] « Chaussures » (Pièce E3), [traduction] « Accessoires » (Pièce E4) et [traduction] « Vêtements » (Pièce E5). Dans chaque capture d’écran, le haut du contenu de la page Web HYGGE est caché par ce qui semble être un ensemble d’un ou plusieurs sous-menus et des images représentatives pour l’élément de menu souligné et j’estime qu’il est raisonnable de conclure que chacun de ces ensembles était présenté en activant l’élément de menu (les observations écrites de la Propriétaire suggèrent qu’un curseur de souris était placé au-dessus de chaque élément de menu, mais cette méthode n’est pas en preuve). Notamment, les sous-menus [traduction] « Magasiner par catégorie » comprennent des catégories de produits comme [traduction] « Bottes », [traduction] « Sacs », [traduction] « Ceintures », [traduction] « Bougies et diffuseurs », [traduction] « Robes et combinaisons-pantalons », [traduction] « Chaussures », [traduction] « Chemises et blouses » et [traduction] « Hauts », entre autres. Je note également trois gammes de produits énumérées sous le sous-menu « Collections » du menu [traduction] « Vêtements » : [traduction] « Vêtements d’activités », [traduction] « Cuir » et [traduction] « Vêtements d’intérieur ». L’une ou les deux images représentatives de chaque menu illustre une robe de fille, une tenue de bébé, une botte, des chaussures, une bourse, des boucles d’oreilles et une robe de femme. L’importance du système de menu sera discutée de façon plus détaillée ci-dessous dans mon analyse des Services.

  • ·Les Pièces F et G contiennent des captures d’écran des pages Facebook et Instagram de la Propriétaire, représentatives de la publicité publiée par la Propriétaire au cours de la période pertinente. La page Facebook comporte des vidéos publiées en 2020 et 2021 avec des titres décrivant la collection HYGGE comme [traduction] « remplie de vêtements de nuit luxueux et d’accessoires à porter à la maison » (2020) et [traduction] « notre magnifique nouvelle collective de vêtements de nuit inspirée par l’art danois de détente et de relaxation […] remplie du type de pyjamas, de pantoufles et de masques pour les yeux luxueux que vous voudrez porter dès votre arrivée à la maison » (2021, ellipse dans l’original). Les captures d’écran illustrent la Marque apposée à côté d’images, ou dans celles-ci, dans les vidéos, illustrant des pyjamas, des pantoufles à bande de fausse fourrure grise, des bas tricotés gris épais, des jaquettes (robes, en anglais) et des masques pour les yeux (la vidéo de 2021 arbore également le Logo MINT VELVET, dans le bas de l’écran). La publicité Instagram, publiée en décembre 2021, illustre une sélection d’idées de cadeaux de Mint Velvet, y compris des pantoufles à bande de fausse fourrure étiquetée avec la Marque et un sac à cordon coulissant décoré avec un logo imprimé mettant en valeur la Marque.

  • ·La Pièce H est [traduction] « un tableau récapitulatif (indiquant des volumes de ventes canadiennes représentatifs), ainsi que des copies de factures représentatives » documentant les ventes des Produits arborant la Marque qui ont été expédiés au Canada après avoir été commandés du Site Web de la Propriétaire. Les cinq factures datent de 2020 (étiquetées [traduction] « FACTURE COMMERCIALE ») et de 2021 (étiquetées [traduction] « Reçu ») et sont adressées à des personnes en Colombie-Britannique et en Ontario. Le logo MINT VELVET est apposé dans le coin supérieur gauche des trois factures de 2021 (il n’y a aucune référence à la Propriétaire sur les deux factures de 2020) et un logo combinant le nom « Globale » avec le slogan « Smart Cross-BorderTM » est arboré dans le coin supérieur droit des cinq factures. Ce logo semble faire référence à une entreprise nommée Globale UK Limited (Globale), laquelle est identifiée sur les factures commerciales de 2020 comme [traduction] « l’Expéditeur ou exportateur au dossier », située à une adresse d’aéroport, et sur les factures et reçus de 2021 sous l’en-tête [traduction] « Vendu par ». Mme Bean n’explique pas la relation entre la Propriétaire et Globale et l’importance de ce fait sera discutée ci-dessous.

[13] Mme Bean confirme qu’elle est en mesure de déterminer lesquels des produits facturés sont des Produits au moyen des numéros de produits et/ou des numéros et codes de suivi internes sur les factures et dans le système informatique de la Propriétaire et elle atteste que ces Produits étaient vendus et expédiés [traduction] « en arborant la Marque » une fois que les clients canadiens les avaient commandés de la Propriétaire au moyen du Site Web de la Propriétaire. À l’exception discutable des [traduction] « Bas avec brillants » et [traduction] « Bas scintillants », la plupart des produits facturés pertinents semblent être représentés par des images de produits du même type ou d’un type semblable dans l’ensemble de la preuve.

[14] Un ou deux articles de chaque facture (manuellement surligné sur quatre d’entre elles) correspondent à une ligne dans le tableau récapitulatif pour cette année-là, nommément [traduction] « Pantoufles de fausse fourrure blanc cassé », [traduction] « Bas à paillettes roses », [traduction] « Ensemble de pyjamas unisexes à carreaux rouges », [traduction] « Bas scintillants noirs » et [traduction] « Masque de sommeil de velours noir ». La copie de la facture pour les [traduction] « Bas à paillettes roses » est de mauvaise qualité, mais la date et la ville de destination sont lisibles et le texte de l’entrée surlignée semble correspondre à la rangée équivalente dans le tableau récapitulatif. Le sommaire indique une vente de chacun des articles précédents, excepté pour les [traduction] « Bas scintillants noirs », lesquels sont présents sur deux des factures et pour lesquels deux ventes sont indiquées. Le sommaire indique également une vente pour chacun des [traduction] « ENSEMBLE DE PYJAMAS LONGS ZÉBRÉS ZOÉ », et [traduction] « ENSEMBLE DE PYJAMAS CAMISOLE ET CULOTTE COURTE ZOÉ » en 2021, [traduction] « BAS PANTOUFLES TRICOTÉS NOIRS » en 2022 et [traduction] « PANTOUFLES À BANDE DE FAUSSE FOURRUE GRISE » en 2023. Cependant, je note que la dernière vente est à l’extérieur de la période pertinente et, en l’absence d’une date de vente plus précise, l’avant-dernière vente pourrait l’être également.

Analyse

[15] La Partie requérante fait valoir que l’affidavit fourni en l’espèce n’est pas aussi direct que l’on pourrait s’attendre et laisse beaucoup trop de place à la spéculation. Lors de l’audience, la Partie requérante a noté le nombre limité de produits et services en cause et la quantité limitée de documents fournis et a soutenu qu’il n’aurait pas été exagéré pour Mme Bean de fournir des corrélations explicites et des explications plus complètes, de manière à avoir une preuve assermentée au dossier.

[16] En revanche, la Propriétaire observe qu’elle doit seulement fournir [traduction] « une certaine preuve que la marque de commerce déposée était employée au Canada dans la pratique normale du commerce lors de la période pertinente » et non un ensemble exhaustif de preuves et spécimens, citant Saks & Co c Registraire des marques de commerce (1989), 24 CPR (3d) 49 à la p 57 (CF 1re inst). Selon la Propriétaire, les exemples contenus dans l’affidavit de Mme Bean se veulent représentatifs et non exhaustifs.

[17] Un propriétaire inscrit n’a pas à fournir une preuve directe ou documentaire à l’égard de chacun des produits et services énumérés dans un enregistrement. Cependant, des faits suffisants doivent être fournis pour permettre au registraire de se faire une opinion ou de déduire logiquement qu’il y a eu emploi au sens de l’article 4 de la Loi [voir Guido Berlucchi & C Srl c Brouilette Kosie Prince, 2007 CF 245 au para 18]. En l’espèce, je suis d’accord avec la Partie requérante qu’il aurait été préférable de disposer de plus de détails. Cependant, comme il est indiqué ci-dessus, le fardeau de preuve dans le cadre de la procédure prévue à l’article 45 est léger. Ces procédures n’ont pas pour but de trancher des questions de fait contestées, ni de fournir une alternative à l’habituelle attaque inter partes contre une marque de commerce prévue à l’article 57 de la Loi [Meredith & Finlayson c Canada (Registraire des marques de commerce) (1991), 40 CPR (3d) 409 (CAF)].

[18] En l’espèce, j’estime que Mme Bean fait une affirmation claire d’emploi de la Marque au Canada au cours de la période pertinente en liaison avec les Produits et les Services, au moyen du site Web de ventes en ligne de la Propriétaire. Son affirmation est appuyée par des images représentatives de la Marque arborée i) directement sur certains Produits et sur les étiquettes et/ou les étiquettes volantes d’autres, et ii) sur le site Web employé pour annoncer et exécuter les Services. Elle fournit des factures représentatives montrant l’exécution des Services par la vente des Produits facturés, dont elle confirme qu’ils ont été commandés en ligne par le site Web de la Propriétaire, et elle atteste de ventes de la même manière des Produits supplémentaires indiqués dans le tableau joint à son affidavit. De plus, il ressort clairement de l’ensemble de son témoignage qu’une telle vente de détail en ligne constitue la pratique normale du commerce de la Propriétaire.

[19] Pour les raisons discutées ci-dessous, je suis convaincue que la Propriétaire a ainsi démontré l’emploi de la Marque au Canada au cours de la période pertinente, mais seulement en liaison avec les Produits [traduction] « Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements habillés » et les Services [traduction] « Vente en ligne de ce qui suit : bougies, sacs, sacs tout-aller, vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés sur un site Web de marchandises générales ».

[20] Puisque la Propriétaire n’a fourni aucune preuve de circonstance spéciale justifiant le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec les autres Produits et Services, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Gamme de produits HYGGE

[21] Je noterais en premier lieu que je suis convaincue que l’ensemble des Produits ont été inclus dans la gamme de produits HYGGE au cours de la période pertinente. Les photos représentatives jointes à titre de Pièce C à l’affidavit de Mme Bean, accompagnées des images sur la page Web, la page Facebook et la page Instagram aux Pièces E1, F et G respectivement, illustrent la Marque apposée sur chacun des Produits ou en liaison avec chacun de ces produits.

[22] À cet égard, je suis prête à accepter que le sac en tricot en forme de poche illustré dans les photos correspond à un [traduction] « sac tout-aller », que les bas doublés de peluche et les bas à pompons sont des [traduction] « vêtements tout-aller », que les bottes tricotées sont des [traduction] « bottes » (même si elles peuvent être employées comme pantoufles) et que les pantoufles à bande en fausse fourrure avec des boucles en métal peuvent être considérées comme des [traduction] « sandales » (étant essentiellement des sandales faites de fausse fourrure).

[23] Je suis également prête à accepter les ensembles de pyjamas garnis de plumes illustrés sur la page Web HYGGE comme des [traduction] « vêtements, nommément […] vêtements habillés », étant donné la façon dont ils sont décrits dans la légende qui les accompagne : [traduction] « Nous savons que vous allez adorer notre nouveau côté plus habillé à Hygge aussi. Avec autant de potentiel stylistique, nos ensembles garnis de plumes de couleur noire et peau servent aussi de tenue de soirée ultime pour recevoir à la maison ou sortir. Essayez le haut avec un jean décontracté et un soulier à talon haut à lanières. Pour une touche plus élégante, rentrez une chemise blanche dans le pantalon […] ». De plus, étant donné que les publicités sur les médias sociaux de 2020 et 2021 présentent une esthétique semblable et que la page Web HYGGE spécifie que la gamme est [traduction] « confortable, toujours avec un côté luxueux » (mon soulignement), je suis prête à inférer que le [traduction] « nouveau côté plus habillé » était déjà au moins quelque peu présent au cours de la période pertinente, avec des morceaux qui peuvent être adaptés du décontracté à l’habillé, comme les camisoles fluides illustrées sur la page Web HYGGE et présentées dans les vidéos Facebook.

[24] En ce qui a trait aux bas, la Partie requérante soutient qu’ils sont définis à juste titre comme des [traduction] « articles chaussants » et que le choix de Mme Bean de les définir comme [traduction] « vêtement tout-aller » crée plutôt [traduction] « un langage vague et imprécis [qui] ne devrait pas permettre à l’Inscrivante de maintenir l’Enregistrement » [observations écrites, au para 56]. Cependant, je note que l’entrée de la facture fournie à titre de pièce pour les [traduction] « Bas à paillettes roses » les définit comme des [traduction] « Articles et accessoires de vêtements, tricotés ou crochetés », ce qui se démarque de l’entrée pour [traduction] « Pantoufles de fausse fourrure », laquelle définit ces dernières par [traduction] « Articles chaussants, guêtres et articles semblables, morceaux de tels articles ». De plus, il semble que la section [traduction] « Vêtements d’intérieur » de la boutique en ligne de la Propriétaire est accessible sous le menu des vêtements. Le menu des articles chaussants comporte seulement les catégories [traduction] « Bottes », [traduction] « Souliers à talon haut », [traduction] « Espadrilles », [traduction] « Chaussures » et « Bottes de pluie » et rien n’indique que les bas illustrés seraient vendus sous l’une de ces sections. En effet, dans le tableau récapitulatif de la Pièce H, les sous-catégories de produits [traduction] « BAS/BAS-CULOTTES » et [traduction] « BAS PANTOUFLES » se trouvent dans la section [traduction] « VÊTEMENTS DE NUIT, LINGERIE ET BAS », alors que la sous-catégorie [traduction] « PANTOUFLES » se trouve dans la section [traduction] « ARTICLES CHAUSSANTS ». Je suis donc prête à accepter les bas de la Propriétaire comme des [traduction] « vêtements ».

[25] La Partie requérante soutient également que la Propriétaire [traduction] « tente un tour de passe-passe en faisant incorrectement référence à ce qu’elle reconnaît être une pantoufle comme étant une sandale » [observations écrites, au para 64, soulignement dans l’original]. En effet, comme l’a noté la Partie requérante, le produit que la Propriétaire définit comme des [traduction] « sandales en peluche/fourrure » est décrit sur le site Web de la Propriétaire par [traduction] « Pantoufles à bande de fausse fourrure » [observations écrites, au para 21.e; affidavit Bean à la Pièce D2, mon soulignement]. Cependant, j’estime que l’article en question a l’apparence d’une sandale, la seule différence notable étant qu’elle est faite de fausse fourrure, et je suis donc prête à l’accepter comme une sandale intérieure confortable. Comme l’a remarqué la Cour fédérale, dans le cadre d’une procédure en vertu de l’article 45, il faut se garder « d’examiner avec un soin méticuleux le langage dans un état déclaratif des marchandises » [voir Aird & Berlis LLP c Levi Strauss & Co, 2006 CF 654 au para 17].

‌Emploi en liaison avec les Produits

[26] Selon la preuve qui précède, je suis convaincue que l’ensemble des Produits auraient été annoncés pour la vente sur le Site Web de la Propriétaire au cours de la période pertinente. Cependant, je ne suis pas convaincue que Mme Bean ait démontré un transfert véritable de chacun des Produits au Canada dans la pratique normale du commerce. Bien qu’elle affirme que la Marque était [traduction] « employée » au Canada au cours de la période pertinente en liaison avec chacun des Produits [para 4], elle ne précise pas que chacun des Produits était en fait vendu au Canada, plutôt que d’être simplement annoncé et offert pour la vente. Elle affirme que les produits [traduction] « qui étaient vendus au Canada » au cours de la période pertinente affichaient bien en vue la Marque [para 5], mais ne va pas jusqu’à confirmer de quels produits il s’agit.

[27] Il est bien établi qu’offrir en vente n’est pas la même chose que vendre et, en soi, cela est insuffisant pour établir l’emploi d’une marque de commerce conformément à l’article 4(1) de la Loi; une certaine preuve de transferts dans la pratique normale du commerce est nécessaire [voir Michaels & Associates c WL Smith & Associates Ltd (2006), 51 CPR (4th) 303 (COMC); et Riches, McKenzie & Herbert LLP c Cleaner’s Supply Inc, 2012 COMC 211]. Une telle preuve peut prendre la forme de documents comme des factures ou des rapports de vente ou peut être présentée sous la forme de déclarations assermentées claires. Cependant, en l’espèce, Mme Bean n’indique pas clairement que les ventes de la Propriétaire au Canada comprenaient des produits autres que ceux énumérés dans le tableau récapitulatif à la Pièce H. Bien que les factures fournies à titre de pièces couvrent d’autres articles, aucun d’entre eux n’est surligné et, en l’absence de confirmation de la part de Mme Bean, je ne suis pas prête à inférer que l’un d’entre eux faisait partie des produits dont elle a pu corréler les numéros ou les codes avec la présentation de la Marque. Il ne s’agit pas d’une affaire comme CPST Intellectual Property Inc. et InjaNation Fun and Fitness Inc, 2023 COMC 73, citée par la Propriétaire, où le rapport de ventes versé dans la preuve énumérait tous les produits visés par l’enregistrement et introduisait chacun par la marque déposée.

[28] Il ne s’agit également pas d’une affaire où l’on peut conclure que les chiffres de ventes agrégés comprennent les produits en question. Le tableau récapitulatif [traduction] « indiquant des volumes de ventes canadiennes représentatifs » ne fournit aucun chiffre agrégé pour des catégories de produits, mais énumère plutôt un petit nombre seulement de produits individuels, indiquant seulement une ou deux ventes pour chacun. En l’absence de toute statistique concernant le trafic sur le site Web depuis le Canada ou de toute explication de ce qui est signifié par des volumes de ventes [traduction] « représentatifs », on ne peut que spéculer quant aux autres produits, si tant est qu’il y en ait, que la Propriétaire aurait vendus au Canada à partir de son site Web du Royaume-Uni.

[29] Dans ces circonstances, je suis seulement prête à accepter que la Propriétaire a vendu au Canada les Produits spécifiques indiqués dans le tableau à la Pièce H, lequel résume, selon l’attestation de Mme Bean, des ventes telles que celles représentées dans les factures représentatives.

[30] La Partie requérante soutient que les factures fournies à titre de pièces ne représentent pas des ventes par la Propriétaire puisqu’elles proviennent plutôt de Globale. Selon l’argument de la Partie requérante, les factures émises par [traduction] « un tiers inexpliqué » ne sont [traduction] « d’aucune aide pour le propriétaire de la marque de commerce » s’il n’est pas fait mention de ce dernier comme participant à la transaction. La propriétaire cite en appui Smart & Biggar cJarawan, 2006 CF 1253; Nelligan O’Brien Payne LLP c Shaw Satellite GP, 2017 COMC 90; et Boutiques Progolf Inc c Marks & Clerk (1992), 44 CPR (3d) 380 (CF 1re inst), révisée pour d’autres motifs (1993), 54 CPR (3d) 451 (CAF)]. Cependant, ces affaires ne sont pas pertinentes. Dans Jarawan, la conclusion était que les factures n’ont pas donné l’avis de liaison entre la marque de commerce apposée sur celles-ci et les produits. Shaw concernait des tiers envoyant des factures qui identifiaient le destinataire par sa marque de commerce et Progolf impliquait certaines factures de fabricants contournant le propriétaire de la marque de commerce en chemin vers l’acheteur ultime.

[31] Il est vrai que la Propriétaire n’est pas identifiée sur les deux factures de 2020. Cependant, le logo MINT VELVET est apposé sur les trois factures de 2021. De plus, Mme Bean atteste que les codes internes et les numéros de suivi confirment que les produits facturés en question ont été commandés à partir du site Web de la Propriétaire [para 10]. Je note également que certaines des descriptions des produits facturés pertinents correspondent, à première vue, aux articles mis en avant dans les vidéos publiées par la Propriétaire sur Facebook en 2020 et 2021, comme les pyjamas zébrés de couleur or et le masque pour yeux noir [voir la Pièce F].

[32] Dans le cadre d’une procédure prévue à l’article 45, en l’absence de preuve du contraire, il convient d’accorder une crédibilité substantielle aux déclarations faites dans un affidavit [Ogilvy Renault c Compania Roca-Radiadores SA, 2008 Carswellnat 776 (COMC)]. De plus, la preuve doit être considérée dans son ensemble et les pièces doivent être interprétées conjointement avec les déclarations faites dans l’affidavit [voir, par exemple, Fraser Milner Casgrain sencrl c Canadian Distribution Channel Inc (2009), 78 CPR (4th) 278 (COMC)]. La preuve n’a pas à être parfaite; un propriétaire inscrit doit seulement établir une preuve prima facie d’emploi et le registraire peut tirer des conclusions raisonnables à partir des faits fournis [voir Diamant; précitée; et Eclipse International Fashions Canada Inc c Shapiro Cohen, 2005 CAF 64, 48 CPR (4th) 223]. Le propriétaire d’une marque de commerce n’est pas obligé de fournir la preuve de l’’emploi de sa marque de commerce avec son nom [Vogue Brassiere Inc c Sim & McBurney (2000), 5 CPR (4th) 537 (CF 1re inst)].

[33] En l’espèce, bien que Mme Bean n’indique pas expressément la relation entre la Propriétaire et Globale et ne clarifie pas la notation [traduction] « Vendu par » dans les factures ultérieures, je suis d’accord avec l’interprétation mise de l’avant dans les observations écrites de la Propriétaire [para 37 à 39]. Après avoir examiné la preuve dans son ensemble, la conclusion raisonnable est que Globale était l’entreprise d’expédition internationale employée par la Propriétaire pour livrer ses produits à ses clients canadiens et qu’elle agissait donc seulement comme intermédiaire.

[34] Il est bien établi que le concept de « pratique normale du commerce » reconnaît une continuité d’actions qui commencent avec le propriétaire et aboutissent au consommateur final, en passant par des transactions intermédiaires effectuées par des agents ou des distributeurs. Ainsi, la preuve que les produits de la propriétaire de la marque de commerce arborant la marque de commerce ont été distribués et vendus par l’entremise d’une autre entité, en l’espèce, un expéditeur transfrontalier, peut être suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 45 de la Loi, tant que la propriétaire est le premier lien dans la chaîne de distribution [selon Manhattan Industries Inc c Princeton Manufacturing Ltd (1971), 4 CPR (2d) 6 (CF 1re inst); Philip Morris Inc. c Imperial Tobacco Ltd (1985), 7 CPR (3d) 254, conf par (1987), 17 CPR (3d) 237 (CAF); et Osler, Hoskin & Harcourt v Canada (Registraire des marques de commerce) (1997), 77 CPR (3d) 475 (CF 1re inst)]. En l’espèce, bien qu’il aurait été préférable que Mme Bean explique le rôle de Globale dans la chaîne de distribution, et qu’il aurait été simple pour elle de le faire, j’estime que la preuve est suffisante pour établir la position de la Propriétaire en tant que premier maillon dans la chaîne.

[35] Cependant, puisque Mme Bean ne fait pas de corrélation entre les descriptions de produits facturés et les Produits ou les images de produits fournies à titre de preuve, la question demeure toujours de savoir lesquels des Produits ont été véritablement vendus au Canada au cours de la période pertinente. Par exemple, les pantoufles à bande en fausse fourrure que je suis prête à accepter comme [traduction] « sandales », compte tenu de leur construction semblable à celle d’une sandale, ont été vendues en 2023, soit après la période pertinente. De plus, rien dans la preuve ne suggère que l’article vendu en 2020 identifié simplement par [traduction] « Pantoufles de fausse fourrure » pourrait également être considéré comme une sandale. En effet, la page Web HYGGE illustre, dans la même image que la jaquette (robe, en anglais), des pantoufles de chambre doublées de fourrure qui recouvrent le pied à la manière d’une mule et ne semblent donc pas être des [traduction] « sandales ». De même, en l’absence d’images de bas qui brillent ou scintillent, il n’est pas clair si les Bas à paillettes roses et les Bas scintillants noirs sont des vêtements tout-aller ou des vêtements habillés. Il y a une image de bas tricotés tout-aller dans l’une des vidéos Facebook, mais en l’absence d’une date précise pour la vente de 2022 des BAS PANTOUFLES TRICOTÉS NOIRS, il n’est pas possible de déterminer si de tels bas ont été vendus au cours de la période pertinente.

[36] En fin de compte, je suis prête à accepter les ventes enregistrées des bas [traduction] « BRILLANTS » et [traduction] « SCINTILLANTS » et des ensembles de pyjamas [traduction] « LONGS ZÉBRÉS ZOÉ », [traduction] « CAMISOLE ET CULOTTES COURTES ZOÉ » et [traduction] « UNISEXE À CARREAUX ROUGES » comme des ventes des [traduction] « Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements habillés ». De plus, j’accepte que ces morceaux soient marqués avec des étiquettes et/ou des étiquettes volantes arborant la Marque de la même manière que, par exemple, les autres bas et la jaquette (robe, en anglais) illustrée dans les photos représentatives à la Pièce C. Je suis donc convaincue que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les [traduction] « Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements habillés » au Canada au cours de la période pertinente.

[37] En revanche, en l’absence de toute facture, de tout chiffre de ventes ou de tout autre détail concernant les ventes de bougies, de sac, de bottes ou de sandales au Canada au cours de la période pertinente, l’énumération par Mme Bean de ces produits comme des produits avec lesquels la Propriétaire [traduction] « a employé la Marque » au Canada au cours de la période pertinente constitue une simple affirmation d’emploi. Ainsi, j’estime que la Propriétaire n’a pas démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les Produits [traduction] « Bougies », [traduction] « Sacs tout-aller » et [traduction] « Articles chaussants, nommément bottes, sandales ».

‌Emploi en liaison avec les Services

[38] Je suis convaincue que la page HYGGE du site Web de la Propriétaire à la Pièce E1, avec ses images de la gamme de produits HYGGE, les liens vers [traduction] « MAGASINER DES VÊTEMENTS DE NUIT » et [traduction] « MAGASINER AVEC STYLE » et une bannière offrant l’expédition au Canada, illustre la Marque figurant dans l’annonce des Services suivants au cours de la période pertinente : [traduction] « Vente en ligne de ce qui suit : bougies, sacs, sacs tout-aller, vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés sur un site Web de marchandises générales ». J’estime que la présentation de la Marque comme logo sur l’image de couverture au-dessus de la page Web HYGGE constitue une présentation de la Marque dans l’annonce de ces services à l’égard de la gamme de produits HYGGE.

[39] La Partie requérante soutient que la présentation de la Marque sur le site Web de la Propriétaire est dans le meilleur des cas en liaison avec les produits, et pas les Services, puisque la marque de commerce associée à l’exploitation du site Web est MINT VELVET [observations écrites, au para 79]. À l’appui, la Partie requérante cite Smart & Biggar c MAGG Gifts Inc, 2022 COMC 144, où le registraire a conclu que la présentation d’une marque de commerce sur les produits offerts en vente sur le site Web de marque « Q Wholesale » du propriétaire était insuffisante pour démontrer l’emploi de la marque de commerce en liaison avec l’exploitation d’un magasin de vente en gros en ligne. Cependant, dans la même affaire, le registraire a accepté la présentation évidente de la marque de commerce dans le haut des pages Web du magasin de détail du propriétaire avec l’élément [traduction] « Magasinez en ligne! » comme une preuve claire que le propriétaire exploitait un magasin de détail en ligne en liaison avec cette marque de commerce. Dans le même ordre d’idées, en l’espèce, la Marque est arborée non seulement sur les produits offerts pour la vente sur le site Web de la Propriétaire, mais également en évidence sur l’image de couverture dans le haut de la page Web en particulier qui invite les visiteurs à [traduction] « MAGASINER DES VÊTEMENTS DE NUIT » et [traduction] « MAGASINER AVEC STYLE » pour des articles dans la collection HYGGE. J’estime que cette preuve est comparable à la preuve qui a été acceptée pour démontrer l’emploi en liaison avec les services de magasin de détail dans MAGG Gifts.

[40] En ce qui a trait à la portée de la gamme de produits au cours de la période pertinente, j’accepte que les produits illustrés aux Pièces C, E1, F et G auraient été offerts pour la vente par l’entremise de la section HYGGE du Site Web de la Propriétaire à l’époque, y compris le [traduction] « sac tout-aller » en forme de poche en tricot ainsi que la pochette avec fermeture éclair, le sac à cordon coulissant et le [traduction] « sac » pour les bouteilles d’eau chaude, qui, à mon avis, relèvent de la catégorie plus générale des [traduction] « sacs ». Je n’accorde aucune importance à l’omission de Mme Bean de différencier les deux catégories de sacs dans sa déclaration d’emploi relative aux Services, puisqu’elle a été faite avant le rétrécissement de la spécification dans l’enregistrement. Je suis également prête à accepter le masque pour les yeux comme [traduction] « couvre-chef », gardant à l’esprit encore une fois que, lorsqu’on interprète un état déclaratif de produits et de services dans une procédure prévue à l’article 45, il faut se garder « d’examiner avec un soin méticuleux le langage utilisé » [Aird & Berlis, précitée].

[41] En outre, je suis convaincue que ces Services étaient disponibles pour être exécutés au Canada au cours de la période pertinente. Le Site Web de la Propriétaire cible le Canada avec des prix en dollars canadiens et l’offre de l’expédition au Canada. De plus, la preuve de Mme Bean concernant des ventes particulières confirme l’exécution de ces Services au Canada au cours de la période pertinente, à tout le moins à l’égard des vêtements.

[42] Les Services tels qu’énumérés dans l’enregistrement ciblent également le cuir, le similicuir, les chemises et les robes (dresses, en anglais). Cependant, je ne suis pas convaincue que la preuve montre la Marque arborée dans l’annonce ou l’exécution des Services à l’égard de tels produits supplémentaires, qui ne sont pas représentés comme des articles de la collection HYGGE.

[43] À cet égard, je ne suis pas d’accord avec les observations de la Propriétaire lors de l’audience, selon lesquelles la jaquette (robe, en anglais) illustrée dans les photos à la Pièce C devrait être considérée comme une robe. Je comprends que Mme Bean affirme l’emploi de la Marque avec seulement six produits et que les [traduction] « vêtements, nommément des vêtements habillés (p. ex., des robes) » est le seul parmi ceux-ci que je ne considère pas comme étant représenté à la Pièce C. Cependant, le vêtement sur un cintre illustré dans cette pièce n’a pas l’apparence d’une robe ou d’un vêtement habillé. De plus, le contexte dans lequel il est illustré, parmi un revêtement de bouteille d’eau chaude, un sac semblable à une trousse de toilettes, des bas épais et des pantoufles, renforce l’impression d’une sortie-de-bain ou d’une robe d’intérieur plutôt que d’une robe (dress, en anglais). Cette impression est également renforcée par l’image de ce qui semble être le même vêtement porté avec un ensemble de pyjama et des pantoufles de chambre sur la page Web HYGGE à la Pièce E1. En ce qui a trait à l’affirmation de la Propriétaire que les catégories de produits du sous-menu comprennent des [traduction] « Robes » (Dresses, en anglais), pas des [traduction] « Jaquettes » (Robes, en anglais), et que deux factures mentionnent une [traduction] « Robe » (Dress, en anglais) , je n’estime pas que ces références soient déterminantes en l’absence d’une quelconque image représentative des pages de produits [traduction] « Robes » (Dresses, en anglais). Puisque la gamme HYGGE semble être pour des vêtements de nuit et des vêtements d’intérieur, cela semble correspondre davantage à l’élément de sous-menu [traduction] « Vêtements d’intérieur ». En ce qui a trait aux factures, bien que Mme Bean n’exclue explicitement aucune entrée, je ne trouve aucun fondement factuel permettant de déduire que les entrées omises du récapitulatif des ventes à la Pièce H peuvent malgré tout être de la gamme HYGGE.

[44] Dans le même ordre d’idées, en l’absence d’une quelconque explication de la part de Mme Bean, je ne suis pas prête à accepter que les hauts de pyjamas illustrés dans la preuve sont ce qu’elle entend par [traduction] « chemises ». (En effet, je note que [traduction] « chemises et robes » n’apparaissait dans l’état déclaratif des services original de l’enregistrement que comme élément de la phrase [traduction] « housses à costumes, à chemises et à robes », ce qui semble plus correspondre aux tenues d’affaires). Peu importe, j’ai déjà accepté que l’emploi de la Marque a été démontré avec les Services à l’égard des [traduction] « vêtements » en général.

[45] J’ai également tenu compte du sous-menu énumérant les catégories de produits [traduction] « Chemises et blouses » et [traduction] « Robes et combinaisons-pantalons », ainsi que la collection [traduction] « Cuir » [Pièce E5]. Cependant, je ne suis pas d’accord avec l’argument de la Propriétaire que la présentation de la Marque sur la page Web HYGGE alors que ce sous-menu est consulté constitue la présentation de la Marque dans l’annonce des Services à l’égard des produits de cuir, des chemises et des robes. J’estime plutôt que c’est la marque de commerce MINT VELVET qui est présentée dans l’annonce et l’exécution des Services accessibles à partir du menu général MINT VELVET et de ses sous-menus. La Marque sur l’image de couverture de la collection HYGGE est seulement arborée comme sous-marque, dans l’annonce et l’exécution des Services disponibles via la section HYGGE du site. Même si l’accès au menu général MINT VELVET de la section HYGGE du site laisse la page HYGGE en grande partie visible en dessous, j’estime que les clients reconnaîtraient le menu général MINT VELVET et ses sous-menus comme étant séparés de la page particulière pour la collection HYGGE, s’il arrive que cette page soit ouverte à ce moment.

[46] En arrivant à cette conclusion, je suis consciente que Mme Bean fait référence aux pages Web des Pièces E1 à E5 comme des [traduction] « Sous-pages Hygge » et affirme qu’elles présentent la Marque [traduction] « annoncée en liaison avec » les divers éléments de sous-menu [para 7]. Toutefois, les Pièces E1 à E5 illustrent toutes la même page Web, laquelle annonce seulement i) une collection de marque HYGGE de vêtements de nuit, de vêtements d’intérieur et d’accessoires connexes et ii) des liens pour acheter les vêtements de nuit et des vêtements d’intérieur illustrés. En l’absence de captures d’écran illustrant toute autre page qu’il pourrait y avoir dans la section HYGGE, ou l’une des sections offrant des [traduction] « Articles de cuir », des [traduction] « Sacs » et des [traduction] « Ceintures », entre autres, pour la vente, je ne suis pas convaincue que les clients percevraient la page Web HYGGE visible en dessous des sous-menus MINT VELVET comme une indication que tous les articles accessibles à partir du site Web MINT VELVET par l’entremise de ces sous-menus sont offerts pour le visionnement et l’achat par le biais d’un service de marque HYGGE.

Décision

[47] Compte tenu de tout ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié pour supprimer les Produits (1), (2), et (4) et ce qui suit des Services (1) : « […] cuir et similicuir […] chemises et robes […] », selon les dispositions de l’article 45 de la Loi.

[48] L’état déclaratif modifié des produits et services sera libellé comme suit :

[traduction]

Produits

Cl25 (3) Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements habillés.

Services

Cl35 (1) Vente en ligne de ce qui suit : bougies […] sacs, sacs tout-aller […] vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés sur un site Web de marchandises générales.

 

 

_______________________________

Oksana Osadchuk

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

 

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne Osborne


ANNEXE A

Produits visés par l’enregistrement à la date de l’avis du registraire

[traduction]

(1) Savons, nommément savons antibactériens, pains de savon, savons de bain, savons de beauté, savons de soins du corps, savons pour le corps, savons cosmétiques; parfumerie; huiles essentielles pour l’aromathérapie, comme aromatisants alimentaires et à usage personnel; huiles essentielles de bois de cèdre, de cédrat et de citron; cosmétiques; articles de toilette, nommément peignes, brosses à cheveux, rasoirs, crème à raser, après-rasage, brosses à dents, dentifrice, soie dentaire, bain de bouche, baume à lèvres, déodorant, shampooing, revitalisant; encens. (2) Bougies. (3) Mèches, nommément mèches pour bougies, mèches de lampe, mèches de briquet; pétrole lampant. (4) Cuir et similicuir; malles et bagages; mallettes de voyage; bagages; bagagerie; grands fourretout; porte-habits; valises; sacs, nommément sacs à livres, sacs polochons, sacs à main, sacoches de messager, sacs d’école, porte-monnaie, sacs à dos, sacs de voyage, fourre-tout, sacs isothermes; sacs à main; sacs à bandoulière; trousses de toilette; cabas; havresacs; sacs à dos; sacs de ceinture; sacs de sport; sacs tout-aller; mallettes; mallettes porte-documents; portemusique; sacs d’école; mallettes de maquillage; housses à costumes, à chemises et à robes; étuis à cravates; portefeuilles; supports à cahiers; porte-documents; portefeuilles; porte-monnaie; parapluies; parasols; bâtons de marche; cannes-sièges; ceintures; boîtes en cuir et en similicuir. (5) Mobilier, nommément mobilier de salle de bain, mobilier de chambre, mobilier de salle à manger, mobilier de cuisine, mobilier de salle de séjour, mobilier de bureau, mobilier d’extérieur; miroirs; cadres pour photos; oreillers et coussins. (6) Tissus et produits textiles, nommément ceintures en tissu, sous-verres en tissu, rideaux en tissu, paillassons en tissu, débarbouillettes en tissu, feutre et tissus non tissés, revêtements en tissu pour mobilier, nappe en tissu, tissus, huiles d’ensimage, sacs à provisions en tissu, tissus pour vêtements, textiles pour articles chaussants; couvre-lits et dessus de table; couvertures, carpettes, serviettes, nommément serviettes de bain, serviettes de plage, serviettes pour enfants, serviettes en tissu, linges à vaisselle, essuie-tout, débarbouillettes, serviettes de golf, essuie-mains, grandes serviettes de bain, débarbouillettes pour le visage, mouchoirs. (7) Vêtements, nommément vêtements tout-aller, vêtements de sport, vêtements pour bébés, vêtements pour enfants, vêtements habillés. (8) Articles chaussants, nommément chaussures, bottes, sandales, bottes de cowboy, bottes en caoutchouc, chaussures à talons hauts, chaussures de course, bottes de randonnée pédestre; couvre-chefs, nommément casquettes de baseball, petits bonnets, chapeaux de cowboy, feutres mous, chapeaux de paille, hauts-de-forme, bandeaux, fichus, casques, visières, ceintures.

Services visés par l’enregistrement à la date de l’avis du registraire

[traduction]

Vente au détail et vente en ligne de ce qui suit : savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, articles de toilette, encens, bougies, mèches et pétrole lampant, cuir et similicuir, malles et bagages, mallettes de voyage, bagages, bagagerie, grands fourre-tout, porte-habits, valises, sacs, sacs à main, sacs à bandoulière, trousses de toilette, cabas, havresacs, sacs à dos, sacs de ceinture, sacs de sport, sacs tout-aller, mallettes, mallettes porte-documents, portemusique, sacs d’école, mallettes de maquillage, housses à costumes, à chemises et à robes, étuis à cravates, portefeuilles, supports à cahiers, porte-documents, portefeuilles, porte-monnaie, parapluies, parasols, bâtons de marche, cannes-sièges, ceintures, boîtes en cuir ou en similicuir, vêtements, articles chaussants et couvre-chefs; service permettant aux clients de voir et d’acheter facilement les produits susmentionnés dans un magasin de détail de marchandises générales, sur un site Web de marchandises générales et à partir d’un catalogue de vente de marchandises générales par correspondance.


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2023-02-06

COMPARUTIONS

Pour la Partie requérante : Shane D. Hardy

Pour la Propriétaire inscrite : Sander R. Gelsing

AGENTS AU DOSSIER

Pour la Partie requérante : Cozen O’connor LLP

Pour la Propriétaire inscrite : Sander R. Gelsing (Warren Sinclair LLP)

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