Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 82

Date de la décision : 2024-04-30

DANS L’AFFAIRE D’UNE PROCÉDURE DE RADIATION EN VERTU DE L’ARTICLE 45

Partie requérante : A-COLD-WALL* Limited

Propriétaire inscrite : Les Placements Arden Inc. / Arden Holdings Inc.

Enregistrement : LMC1,006,559 pour A.C.W. ARDEN CONTEMPORARY WEAR & Dessin

Introduction

[1] La présente décision concerne une procédure de radiation sommaire engagée en application de l’article 45 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T‐13 (la Loi) à l’égard de l’enregistrement no LMC1,006,559 pour la marque de commerce A.C.W. ARDEN CONTEMPORARY WEAR & Dessin (la Marque), appartenant à Les Placements Arden Inc. / Arden Holdings Inc. (la Propriétaire), et reproduite ci-dessous.

A.C.W. ARDEN CONTEMPORARY WEAR & DESSIN

[2] Pour les raisons qui suivent, je conclus que l’enregistrement doit être modifié.

Le dossier

[3] À la demande de A-COLD-WALL* Limited (la Partie requérante), le registre des marques de commerce a donné l’avis prévu à l’article 45 de la Loi à la Propriétaire le 9 août 2023. L’avis enjoignait à la Propriétaire d’indiquer, en liaison avec chacun des produits spécifiés dans l’enregistrement, si la Marque a été employée au Canada à un moment quelconque au cours des trois années précédant immédiatement la date de l’avis et, dans la négative, qu’elle précise la date à laquelle elle a ainsi été employée en dernier lieu et la raison de son défaut d’emploi depuis cette date. En l’espèce, la période pertinente pour démontrer l’emploi est du 9 août 2020 au 9 août 2023.

[4] La Marque est enregistrée pour l’emploi en liaison avec les produits suivants :

[traduction]

(1) Vêtements, nommément tee-shirts, chemises, pulls d’entraînement, débardeurs, chemisiers, vestes, blazers, manteaux, pantalons, jeans en denim, shorts, jupes, robes, pantalons-collants, salopettes courtes, chandails, pulls, hauts tissés, hauts courts, hauts en molleton, corsages bain-de-soleil, hauts à capuchon, hauts en tricot, hauts d’entraînement, bustiers tubulaires, cardigans, chemises habillées, vêtements tout-aller

[5] La définition pertinente d’« emploi » est énoncée à l’article 4 de la Loi comme suit :

(1) Une marque de commerce est réputée employée en liaison avec des produits si, lors du transfert de la propriété ou de la possession de ces produits, dans la pratique normale du commerce, elle est apposée sur les produits mêmes ou sur les emballages dans lesquels ces produits sont distribués, ou si elle est, de toute autre manière, liée aux produits à tel point qu’avis de liaison est alors donné à la personne à qui la propriété ou possession est transférée.

[6] Il est bien accepté que le niveau de preuve requis pour établir l’emploi dans le cadre de la présente procédure est peu élevé [Woods Canada Ltd c Lang Michener (1996), 71 CPR (3d) 477 (CF 1re inst)] et qu’il n’est pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve [Union Electric Supply Co Ltd c Registraire des marques de commerce (1982), 63 CPR (2d) 56 (CF 1re inst)]. Toutefois, il n’en faut pas moins présenter des faits suffisants pour permettre au registraire de conclure que la marque de commerce a été employée en liaison avec chacun des produits et services spécifiés dans l’enregistrement pendant la période pertinente.

[7] En réponse à l’avis du registraire, la Propriétaire a produit l’affidavit de Mark Dervishian, le directeur principal des opérations et secrétaire de la Propriétaire, assermenté le 7 novembre 2023. Les deux parties ont produit des observations écrites; aucune audience n’a été tenue.

La preuve

[8] M. Dervishian explique que la Propriétaire emploie la Marque en liaison avec divers produits de vêtement depuis 2017, lesquels sont vendus par des magasins de détail, la boutique en ligne de la Propriétaire et son application pour téléphone intelligent. À titre de Pièce C, il joint des factures en date de la période pertinente et démontre des ventes à des clients canadiens pour des produits décrits par M. Dervishian et dans les factures par pantalons-collants, jupes, chandails, bustiers tubulaires, vestes de motard en faux cuir, cardigans, shorts en denim, jeans, hauts courts, blazers, pantalons, robes, débardeurs et corsages bain-de-soleil. Dans chaque cas, le sigle A.C.W. figure dans les descriptions de produit sur les factures; M. Dervishian affirme également que les produits étaient [traduction] « marqués » avec la Marque. Il fournit des chiffres de ventes pour les produits associés à la Marque pour chaque année de la période pertinente, toutefois ces chiffres ne sont pas ventilés par produit.

[9] M. Dervishian explique que, au cours de la période pertinente, la Marque était arborée en liaison avec les produits de la Propriétaire au moyen d’étiquettes volantes et d’étiquettes. À titre de Pièce D, il joint des photos d’un certain nombre de produits avec des étiquettes volantes et des étiquettes. En raison de la basse résolution de certaines des photos, il n’est pas possible de lire l’ensemble du texte sur les étiquettes volantes et les étiquettes, toutefois, chacune semble inclure les initiales A.C.W., avec du texte plus petit en dessous. M. Dervishian confirme que ces photos sont représentatives des produits de la Propriétaire vendus pendant la période pertinente. Les produits illustrés comprennent des articles de vêtement, y compris bon nombre des produits indiqués sur les factures fournies à titre de pièces.

[10] M. Dervishian affirme également que la marque était arborée au point de vente pour les produits de la Propriétaire. À titre de Pièces E et F, respectivement, il joint des photos d’affiches et de pancartes arborant la Marque qui, selon ses affirmations, étaient présentées dans les magasins de détail de la Propriétaire, et des captures d’écran du site Web et de l’application de la Propriétaire illustrant les initiales A.C.W. en liaison avec divers produits de vêtement et autres. Il affirme que ces images sont représentatives de la façon dont la Marque était arborée dans ces contextes au cours de la période pertinente.

Analyse

[11] La Partie requérante fait valoir que la preuve de la Propriétaire n’est pas suffisante pour démontrer que la Propriétaire a employé la Marque au sens des articles 4 et 45 de la Loi au cours de la période pertinente. Les observations particulières de la Partie requérante seront abordées individuellement ci-dessous.

Question préliminaire : Technicalités de l’affidavit

[12] La Partie requérante souligne comme question préliminaire que, bien que chaque pièce à l’affidavit Dervishian soit notariée, les pages fournies à titre de pièces ne contiennent aucune date et aucun lieu quant au moment et à l’endroit auxquels les pièces ont été notariées ou exécutées. Par conséquent, la Partie requérante fait valoir qu’il n’est pas clair que les pièces avaient été présentées au déposant au moment auquel l’affidavit a été assermenté et elles ont peut-être été assermentées à une heure, une date et un lieu différents.

[13] Cependant, la Propriétaire fait valoir, et je suis d’accord, que les lacunes techniques dans un affidavit ou une déclaration solennelle ne devraient pas empêcher une partie de répondre de façon satisfaisante à l’avis prévu à l’article 45 lorsqu’il y a une preuve suffisante pour conclure que la marque de commerce était employée [Baume & Mercier SA c Brown (1985), 4 CPR (3d) 96 (CF 1re inst)]. Je note que le registraire a admis en preuve des pièces qui n’étaient pas clairement identifiées et à ce titre n’étaient pas correctement souscrites si les pièces étaient plutôt identifiées ou expliquées dans le corps de l’affidavit [voir, par exemple, Borden & Elliot c Raphaël Inc (2001), 16 CPR (4th) 96 (COMC)]. En l’espèce, les pièces ont été clairement identifiées dans le corps de l’affidavit et portent l’estampille du même notaire que l’affidavit lui-même. Dans de telles circonstances, je suis prêt à accorder un poids total à la preuve fournie, nonobstant le fait que la date et l’heure de l’exécution ne figurent pas sur les pages des pièces.

Emploi par la Propriétaire

[14] La Partie requérante fait valoir qu’il n’y a [traduction] « aucune déclaration ou affirmation dans la preuve de l’Inscrivante que les Produits visés par l’enregistrement sont fabriqués ou produits par l’Inscrivante elle-même (ou par un tiers licencié) ou que l’Inscrivante a entrepris une quelconque entreprise autre que celle d’un détaillant » (soulignement dans l’original). En l’absence d’une telle confirmation, la Partie requérante fait valoir que [traduction] « en tant que détaillant ou distributeur, l’Inscrivante ne serait pas considérée comme “employant” la Marque de commerce en liaison avec les produits ».

[15] Cependant la Propriétaire fait valoir, et je suis d’accord, que la Loi n’exige pas que le propriétaire d’une marque de commerce soit lui-même le fabricant des produits pour être considéré comme la source de ces produits et qu’il convient de présumer qu’un propriétaire inscrit est la source des produits en question, sauf indication contraire de la preuve [Marks & Clerk c Tritap Food Broker, 2017 COMC 35 aux para 18 et 19; Smart & Biggar c Canadian Tire Corporation, Limited, 2017 COMC 153 au para 18]. En l’espèce, en l’absence de preuve du contraire, je suis convaincu que la Propriétaire est la source des produits illustrés dans sa preuve.

Présentation de la Marque telle qu’elle est enregistrée

[16] La Partie requérante fait valoir que, en raison de la piètre qualité des images des produits portant les étiquettes volantes et les étiquettes, il n’est pas possible de déterminer si la Marque telle qu’enregistrée est arborée ou seulement les initiales A.C.W., lesquelles, comme le fait valoir la Partie requérante et, ne constituent pas la Marque telle qu’enregistrée. À cet égard, la Partie requérante observe qu’au moins dans un cas, les photos illustrent un article de vêtement portant une étiquette qui comprend les initiales A.C.W., mais pas les mots « ARDEN CONTEMPORARY WEAR ».

[17] Bien que je sois d’accord que la piètre qualité des photos ne me permettent pas de lire les mots en plus petits caractères sous les initiatives A.C.W., je suis en mesure de déterminer que bon nombre d’étiquettes et presque toutes, voire toutes, les étiquettes volantes comprennent les lettres A.C.W. au-dessus de texte du genre d’un mot court, suivi par un long mot, suivi par un autre mot court. En l’absence de quoi que ce soit qui suggérerait le contraire, et compte tenu de la déclaration sous serment de M. Dervishian que les photos illustrent la Marque arborée sur des étiquettes volantes et des étiquettes, j’accepte que la Marque est arborée telle qu’enregistrée. Je note que, dans le cas soulevé par la Partie requérante où il y a une photo de shorts avec une étiquette qui ne comprend pas « ARDEN CONTEMPORARY WEAR », il y a également une étiquette volante fixée à ces shorts qui semble arborer la Marque telle qu’enregistrée.

[18] Par conséquent, conformément aux déclarations sous serment de M. Dervishian, j’accepte que chacun des produits de la Propriétaire transférés au cours de la période pertinente avait une étiquette volante ou une étiquette fixée qui arborait la Marque. Puisque ces étiquettes ou étiquettes volantes donneraient l’avis de liaison requis en vertu de l’article 4 de la Loi, il n’est pas nécessaire que j’évalue les observations de la Partie requérante concernant la présentation de la Marque au point de vente ou sur les factures.

Emploi en liaison avec chacun des produits

[19] Je suis d’accord avec la Partie requérante que la Propriétaire doit démontrer l’emploi de la Marque en liaison avec chacun des produits et que la Propriétaire a seulement fourni la preuve qui peut démontrer l’emploi en liaison avec certains des produits visés par l’enregistrement. Bien qu’il ne soit pas nécessaire de produire une surabondance d’éléments de preuve dans le cadre de la procédure de radiation prévue à l’article 45, le propriétaire inscrit doit tout de fournir une certaine preuve d’emploi de la marque de commerce en liaison avec chacun des produits indiqués dans l’enregistrement; de plus, l’emploi démontré à l’égard d’un produit en particulier ne peut pas en général servir à maintenir plusieurs produits [John Labatt Ltd c Rainier Brewing Co (1984), 80 CPR (2d) 228 (CAF) (Labatt); voir également Diamant Elinor Inc c 88766 Canada Inc, 2010 CF 1184]. Une telle preuve peut prendre la forme de documents comme des factures et des rapports de vente, mais elle peut aussi être obtenue à l’aide de déclarations assermentées claires concernant des volumes de ventes, la valeur en dollars des ventes ou des données factuelles équivalentes [voir, par exemple, 1471706 Ontario Inc c Momo Design srl, 2014 COMC 79].

[20] En l’espèce, j’accepte que les articles identifiés par la Propriétaire dans les factures de la Pièce C énumérés en liaison avec A.CW. dans la description de produit ont été transférés dans la pratique normale du commerce au Canada au cours de la période pertinente. Comme il en a été question ci-dessus, j’accepte également que les étiquettes ou les étiquettes volantes arborant la Marque étaient fixées à ces produits au moment du transfert. Par conséquent, j’estime que la Propriétaire a démontré l’emploi de la Marque au sens des articles 4 et 45 de la Loi en liaison avec les produits facturés notés ci-dessus, à savoir pantalons-collants, jupes, chandails, bustiers tubulaires, vestes de motard en faux cuir, cardigans, shorts en denim, jeans, hauts courts, blazers, pantalons, robes, débardeurs et corsages bain-de-soleil. Puisque les produits facturés semblent inclure plus d’un type de débardeurs, de pantalons et de jupes, je suis convaincu que la Propriétaire a également démontré l’emploi des produits visés par l’enregistrement [traduction] « chemises » et [traduction] « vêtements tout-aller ».

[21] Cependant, en ce qui a trait aux articles illustrés à la Pièce D, bien que M. Dervishian [traduction] « confirme que les produits illustrés à la Pièce D sont représentatifs des Produits offerts et vendus au Canada » au cours de la période pertinente, j’estime que, en l’absence d’autres détails, cette affirmation n’arrive pas à constituer la preuve nécessaire pour démontrer l’emploi au sens de la Loi. De plus, je note que l’offre des produits pendant la période pertinente ne suffit pas à elle seule; il est nécessaire de produire une preuve de transferts dans la pratique normale du commerce au Canada [voir, par exemple, Molson Cos c Halter (1976), 28 CPR (2d) 158 (CF 1re inst); et Gowling, Strathy & Henderson c Royal Bank (1995), 63 CPR (3d) 322 (CF 1re inst)]. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que la Propriétaire ait démontré l’emploi de la Marque en liaison avec les produits illustrés dans les photos à la Pièce D, mais qui ne figurent pas également sur les factures à la Pièce C.

[22] De plus, bien que la Propriétaire cite plusieurs affaires où le registraire a conclu que la preuve à l’égard d’un seul produit peut servir à maintenir plusieurs produits visés par l’enregistrement, je ne suis pas d’accord avec la Propriétaire qu’il y a un [traduction] « un principe bien établi dans la jurisprudence concernant l’emploi d’une marque de commerce sur un seul produit comme preuve d’emploi pour plusieurs Produits couverts par l’enregistrement ». Il est bien établi en droit que chaque affaire dépend de ses propres faits; en l’espèce, je n’estime pas qu’il existe une preuve pour justifier l’écart du principe établi par la Cour d’appel fédérale dans Labatt, précitée, en l’espèce.

[23] En l’absence de circonstances spéciales justifiant le défaut d’emploi de la Marque en liaison avec les autres produits, l’enregistrement sera modifié en conséquence.

Décision

[24] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, l’enregistrement sera modifié, selon les dispositions de l’article 45 de la Loi, pour supprimer [traduction] « tee-shirts », [traduction] « pulls d’entraînement », [traduction] « chemisiers », [traduction] « manteaux », [traduction] « salopettes courtes », [traduction] « pulls, hauts tissés », [traduction] « hauts en molleton », [traduction] « hauts à capuchon, hauts en tricot, hauts d’entraînement », [traduction] « chemises habillées ».

[25] L’enregistrement modifié sera libellé comme suit :

[traduction]

(1) Vêtements, nommément chemises, débardeurs, vestes, blazers, pantalons, jeans en denim, shorts, jupes, robes, pantalons-collants, chandails, hauts courts, corsages bain-de-soleil, bustiers tubulaires, cardigans, vêtements tout-aller

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G.M. Melchin

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Manon Duchesne Osborne


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour la Partie requérante : Osler, Hoskin & Harcourt LLP

Pour la Propriétaire inscrite : Cabinet Juridique St. Lawrence S.E.N.C.R.L.

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