Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 93

Date de la décision : 2024-05-09

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Naborly Inc.

Requérante : Neighborly Assetco LLC

Demande : 1,919,273 pour NEIGHBOURLY PROPERTY MANAGEMENT

Introduction

[1] Neighborly Assetco LLC a produit une demande d’enregistrement pour la marque de commerce NEIGHBOURLY PROPERTY MANAGEMENT (la Marque), en liaison avec les services de la classe 36 suivants (collectivement, les Services de la Requérante) :

[traduction]

(1) Services de gestion immobilière; évaluation et gestion de biens immobiliers; consultation en gestion immobilière; services de location immobilière, nommément location de logements résidentiels; services immobiliers, nommément gestion de biens locatifs; services immobiliers, nommément services de gestion de biens pour des syndicats de copropriétaires, des associations de propriétaires d’habitation et des immeubles à appartements; services immobiliers, nommément location, courtage, location à bail et gestion de biens commerciaux, de bureaux et de locaux pour bureaux.

[2] Naborly Inc. (l’Opposante) s’oppose à l’enregistrement de la Marque. L’opposition est fondée principalement sur des allégations selon lesquelles la Marque crée de la confusion avec la marque de commerce déposée NABORLY (la Marque de commerce de l’Opposante), enregistrement no LMC1,019,654, enregistrée en liaison avec les services suivants (collectivement, les Services de l’Opposante) :

[traduction]

(1) Services d’administration des affaires, nommément vérification des locataires, traitement de formulaires de demande de location et traitement de demandes de cession de bail et de sous-location; traitement de demandes d’assurance.

(2) Services de cote de solvabilité; services d’évaluation des risques financiers; services de perception de loyers; traitement administratif de réclamations d’assurance et de données de paiement.

(3) Fournisseur de logiciels-services dans les domaines des services de cote de solvabilité et des services d’évaluation des risques; logiciels-services, à savoir logiciels pour le commerce en ligne, en l’occurrence pour la vérification de la solvabilité et des locataires, pour la réception et le traitement de formulaires de demande de location, pour la réception et le traitement du paiement des loyers et du paiement des garanties de loyer, pour la réception et le traitement de demandes de cession de bail et de sous-location, ainsi que pour la réception et le traitement de demandes d’assurance de locataires et de propriétaires.

[3] Pour les raisons qui suivent, la demande est rejetée.

Le dossier

[4] La demande a été produite le 11 septembre 2018. Elle a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 10 février 2021. Le 10 août 2021, l’Opposante s’est opposée à la demande en produisant une déclaration d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi).

[5] Les motifs d’opposition sont résumés ci-dessous :

  • ·En vertu de l’article 38(2)a.1) de la Loi, la demande a été produite de mauvaise foi, car la Requérante savait, ou aurait dû savoir, au moment de la production, que l’Opposante jouissait de droits antérieurs sur la Marque de commerce de l’Opposante qui étaient en conflit avec le droit revendiqué de la Requérante d’employer et d’enregistrer la Marque.

  • En vertu des articles 38(2)b) et 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec la Marque de commerce de l’Opposante.

  • En vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque au Canada parce que la Marque de commerce de l’Opposante avait été employée et révélée avant la date de production de la demande.

  • En vertu des articles 38(2)d) et 2 de la Loi, la Marque n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée à distinguer les Services de la Requérante des Services de l’Opposante en liaison avec lesquels l’Opposante avait antérieurement employé et révélé la Marque de commerce de l’Opposante au Canada.

  • En vertu de l’article 38(2)e) de la Loi, la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Services de la Requérante.

  • En vertu de l’article 38(2)f) de la Loi, à la date de production de la demande, la Requérante n’avait pas le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Services de la Requérante, étant donné les droits antérieurs de l’Opposante acquis par l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante.

[6] Le 13 juin 2022, la Requérante a signifié et produit une contre-déclaration. Les deux parties ont produit de la preuve; toutefois, la preuve de l’Opposante s’est limitée à une copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante. Aucun contre-interrogatoire n’a été effectué relativement à une quelconque preuve produite dans le cadre de la présente procédure. Seule la Requérante a produit des observations écrites; aucune audience n’a été tenue.

Preuve de la Requérante

[7] Comme preuve dans la présente procédure, la Requérante a produit l’affidavit de Mary Thompson, Directrice principale des opérations de Dwyer Franchising LLC, la société mère de la Requérante, souscrit le 11 mai 2023. Elle explique que la Requérante [traduction] « est un réseau de services résidentiels qui rapprochent les consommateurs et les professionnels des services de leurs communautés qui sont en mesure de répondre à leurs besoins particuliers d’entretien, de réparation et d’amélioration d’habitations », et qu’elle agit comme [traduction] « fournisseur unique afin que des consommateurs puissent communiquer avec des experts en services résidentiels vérifiés de haute qualité et qu’elle fournit les renseignements dont ils ont besoin pour faire des choix éclairés, y compris des cotes, des avis et des renseignements sur les licences ».

[8] Mme Thompson affirme que la Requérante et ses prédécesseurs exercent des activités au Canada depuis trois décennies, et qu’ils ont commencé à offrir leurs services aux propriétaires et à d’autres clients en liaison avec la marque « NEIGHBOURLY » depuis au moins aussi tôt que 2018. La Requérante possède un certain nombre de « sous-marques » en liaison avec lesquelles des services sont offerts, notamment le nettoyage résidentiel, le nettoyage des drains, le nettoyage des vitres, la restauration, la tonte de la pelouse et d’autres services. Elle affirme que les services offerts par la Requérante comprennent tous les Services de la Requérante, qui sont fournis au public par l’entremise de franchisés détenus et exploités à l’échelle locale, y compris les sous-marques. Elle affirme également que la Requérante contrôle la nature et la qualité des services fournis par les franchisés en liaison avec la Marque.

[9] De plus, l’affidavit de Mme Thompson et les pièces comprennent les renseignements suivants :

  • Des chiffres de vente estimés à l’échelle du système pour les années 2019 à 2023 pour les Produits et Services de la Requérante (des dizaines de millions de dollars américains pour le Canada chaque année), ainsi que les revenus estimés pour les mêmes années (des millions de dollars américains pour le Canada chaque année).

  • Des renseignements relatifs à la publicité en liaison avec la Marque, y compris des captures d’écran du site Web de la Requérante, de médias sociaux et de sites Web des franchisés, ainsi que des renseignements montrant la publicité faite lors de salons professionnels et dans des publications. Malgré l’affirmation de Mme Thompson que la Marque est présentée [traduction] « en évidence » sur chacun de ces documents, aucun des documents fournis à titre de pièce ne semble arborer la Marque; plutôt, le mot « Neighbourly » ou « Neighborly » est arboré sans les mots « property management ». Mme Thompson affirme que l’investissement total de la Requérante dans la publicité et la promotion au Canada entre 2018 et 2022 était supérieur à 6 millions de CAD.

  • Des détails et des copies certifiées de dix-sept enregistrements canadiens de marques de commerce comprenant le mot « NEIGHBOURLY », ainsi que des détails et des certificats de trois enregistrements américains de marques de commerce comprenant le mot « NEIGHBORLY », qui appartiennent tous à la Requérante.

  • Des captures d’écran d’un site Web qui, selon Mme Thompson, est le site Web de l’Opposante, ainsi qu’un article de presse portant sur l’acquisition de l’Opposante par un concurrent à la fin de 2022. Mme Thompson affirme que ces documents suggèrent que l’Opposante fournit des services liés à la vérification des propriétaires et des locataires, qui, selon elle, ne sont pas liés aux services fournis par la Requérante et ne sont pas annoncés aux mêmes types de clients.

  • Des détails et un certificat pour la marque de commerce américaine « NABORLY » de l’Opposante. Mme Thompson affirme que les marques de commerce NABORLY de l’Opposante ont coexisté pendant des années avec les enregistrements de la Requérante aux États-Unis et au Canada, sans opposition ou contestation de la part de l’Opposante. Elle affirme également que la Requérante n’est pas au courant de cas de confusion entre les services de la Requérante et ceux de l’Opposante.

Analyse

Motif d’opposition : Article 12(1)d)

[10] L’Opposante prétend qu’en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi, la Marque n’est pas enregistrable parce qu’elle crée de la confusion avec l’enregistrement de l’Opposante pour la Marque de commerce de l’Opposante. J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que cet enregistrement existe toujours [Quaker Oats Co of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard du motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d).

[11] Étant donné que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve à l’égard de ce motif d’opposition, je dois évaluer si la Requérante s’est acquittée de son fardeau ultime de prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion entre la Marque de la Requérante et la Marque de commerce de l’Opposante. La date pertinente en ce qui a trait à la confusion avec une marque de commerce déposée est la date de la présente décision [Simmons Ltd c A to Z Comfort Beddings Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413 (CAF)].

[12] Pour appliquer le test en matière de confusion, le registraire doit tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris celles qui sont expressément énumérées à l’article 6(5) de la Loi, à savoir : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de produits, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux, notamment dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent. Il n’est pas nécessaire d’attribuer un poids égal à ces facteurs énumérés [voir, en général, Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, et Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27 (Masterpiece)]. De plus, dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a déclaré que le degré de ressemblance entre les marques de commerce est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.

[13] Enfin, l’article 6(2) de la Loi ne concerne pas la confusion entre les marques de commerce elles-mêmes, mais la confusion entre des produits ou des services provenant d’une source qui sont considérés comme provenant d’une autre source. En l’espèce, la question posée par l’article 6(2) est de savoir s’il y aurait confusion entre les services vendus sous la Marque de telle sorte qu’ils seraient considérés comme fournis par l’Opposante.

Caractère distinctif inhérent et acquis

[14] La Requérante fait valoir que la Marque possède un caractère distinctif inhérent plus élevé que celui de la Marque de commerce de l’Opposante. À cet égard, la Requérante fait valoir que la Marque de commerce de l’Opposante n’est qu’une mauvaise orthographe du mot « neighbourly », tandis que la Marque est un syntagme inventé ayant une formulation grammaticale unique qui n’a, en soi, aucun sens facile à discerner. Cependant, les mots descriptifs « property management » atténuent le degré de caractère distinctif de la Marque, puisqu’ils suggèrent les Services de la Requérante. En revanche, la Marque de commerce de l’Opposante n’a aucune connotation en lien avec les Services de l’Opposante et est un mot inventé (même si elle est identique sur le plan phonétique au mot « neighbourly »). Par conséquent, j’estime que la Marque de commerce de l’Opposante possède un degré plus élevé de caractère distinctif inhérent.

[15] Le caractère distinctif d’une marque de commerce peut être renforcé par son emploi et sa promotion au Canada [voir Sarah Coventry Inc c Abrahamian (1984), 1 CPR (3d) 238 (CF 1re inst); GSW Ltée c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (CF 1re inst)]. Cependant, malgré l’affirmation de la Requérante qu’elle a fourni une [traduction] « preuve importante » que la Marque était devenue bien connue au Canada, la preuve de la Requérante démontre seulement l’emploi de « neighbourly » ou « neighborly », sans les mots « property management ». Je n’estime pas que l’emploi de « neighbourly », à lui seul, constitue l’emploi de la Marque telle que demandée. Bien que le mot « neighbourly » peut être l’élément le plus distinctif, les mots « property management » constituent également un élément dominant de la Marque telle que demandée et je n’estime pas que le public conclurait que la marque de commerce NEIGHBOURLY PROPERTY MANAGEMENT en tant que telle est employée en l’absence de ces mots [Promafil Canada Ltée c Munsingwear Inc (1992), 44 CPR (3d) 59 (CAF); pour des conclusions semblables, voir Riches, McKenzie & Herbert c Rosita's Fine Foods (1985) Ltd (1997), 82 CPR (3d) 237 (COMC) au para 7; Gowling Lafleur Henderson LLP c Padcon Ltd, 2014 COMC 125 aux para 24 et 25; People's Drug Mart (BC) Ltd c People Food Inc, 2021 COMC 111 au para 20]. Bien que la Requérante a produit la preuve de revenus pour la prestation de ses services [traduction] « arborant la [Marque] » et de ses dépenses publicitaires, en l’absence de preuve démontrant l’emploi de la Marque telle que demandée, je ne suis pas prêt à conclure, à partir de ces chiffres, que la Marque a acquis un caractère distinctif.

[16] Puisque l’Opposante n’a produit aucune preuve démontrant la mesure dans laquelle la Marque de commerce de l’Opposante a été employée, je conclus qu’aucune marque de commerce n’a acquis un quelconque caractère distinctif.

[17] Tout compte fait, je conclus que ce facteur favorise l’Opposante.

Période d’emploi

[18] Comme discuté ci-dessus, bien que Mme Thompson affirme que la Marque est employée depuis au moins aussi tôt que 2018, la Requérante n’a fourni aucune preuve démontrant l’emploi de la Marque telle que demandée. En ce qui concerne l’Opposante, bien que la copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante indique le 31 décembre 2014 comme date de premier emploi revendiquée, je ne peux déduire qu’il y a eu un emploi minimal de cette marque de commerce, comme elle figure dans la copie certifiée soumise en preuve et, de plus, un enregistrement en soi n’est pas une preuve que la marque de commerce déposée a été employée continuellement depuis la date revendiquée [voir Tokai of Canada Ltd c Kinsford Products Company, LLC, 2018 CF 951; et Entre Computer Centers Inc c Global Upholstery Co (1991), 40 CPR (3d) 427 (COMC)].

[19] Par conséquent, ce facteur ne favorise aucune partie.

Genre des produits, services ou entreprises, et nature du commerce

[20] La Requérante fait valoir que les Services de l’Opposante comprennent exclusivement les demandes de location, l’évaluation des risques financiers, le paiement de loyer et les demandes d’assurance. Bien que les Services de la Requérante et les Services de l’Opposante comprennent des services de la classe de Nice 36, la Requérante fait valoir qu’aucun de ses services ne s’apparente aux types de services liés à la Marque de commerce de l’Opposante. La Requérante soutient qu’en l’absence d’une preuve de fond de la part de l’Opposante, il n’y a rien pour prouver que les services de la Requérante chevauchent ceux de l’Opposante. À l’appui de cette proposition, la Requérante cite Eagle’s Flight, Creative Training Excellence Inc c Yara International ASA, 2020 COMC 125; toutefois, dans cette affaire, le registraire a conclu qu’en l’absence de preuve de la part de la requérante, rien ne montrait que les services de formation axés sur la sécurité des parties ne chevaucheraient pas ou ne comporteraient pas des voies de commercialisation semblable [para 42]. Quoi qu’il en soit, c’est le principe élémentaire de droit qu’il incombe à la Requérante de démontrer qu’il n’y a aucune probabilité raisonnable de confusion une fois que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial.

[21] La Requérante fait valoir [traduction] « [qu’]il n’y a aucun chevauchement direct ou indirect » dans le genre des services des parties. Toutefois, même si les Services de la Requérante ne concernent pas spécifiquement sur des demandes de location, des évaluations des risques financiers, des paiements de loyer ou des demandes d’assurance, j’estime que les Services de la Requérante qui englobent les services de gestion immobilière, les services immobiliers et les services de biens locatifs chevauchent dans une certaine mesure les Services de l’Opposante en ce qui a trait au traitement de formulaires de demande de location, au traitement de demandes de cession de bail et de sous-location, et aux services de perception de loyers.

[22] En ce qui concerne les voies de commercialisation, la Requérante soutient que ses services sont fournis sur place par des franchisés, tandis que les services de l’Opposante sont fournis en ligne, comme le montrent les captures d’écran du site Web de l’Opposante qui sont jointes à l’affidavit de Mme Thompson. Toutefois, le fait que les services des parties puissent être fournis de cette façon n’est pas déterminant, puisque, même si la preuve des activités réelles des parties peut être utile [voir McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd, 1996 CanLII 3963 (CAF); McDonald’s Corp c Silcorp Ltd (1989), 55 CPR (2d) 207 (CF 1re inst), conf par (1992), 41 CPR (3d) 67 (CAF)], c’est l’état déclaratif des services figurant dans la demande de la Requérante et l’enregistrement de l’Opposante qui régit l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd (1987), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. En d’autres termes, rien n’empêcherait la Requérante d’offrir ses services en ligne si l’enregistrement de la Marque était accordé; en effet, il ressort clairement de la preuve de la Requérante, y compris les captures d’écran du site Web jointes à titre de Pièce B, qu’une partie de ses activités était réalisée par l’entremise d’une application pour téléphone intelligent.

[23] Quoi qu’il en soit, le genre des Services de l’Opposante semble indiquer que ces services visent les propriétaires de biens locatifs; à mon avis, il y a une certaine probabilité de chevauchement, particulièrement en ce qui a trait aux Services de la Requérante qui comprennent spécifiquement les services de gestion immobilière et les services de biens locatifs.

[24] Par conséquent, je conclus que ces facteurs favorisent l’Opposante.

Degré de ressemblance

[25] Lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, la loi est claire qu’il faut tenir compte des marques de commerce dans leur totalité; il n’est pas correct de les placer côte à côte, et de comparer et de relever les ressemblances ou les différences entre leurs éléments constitutifs. Dans Masterpiece, la Cour suprême du Canada a indiqué que, lorsqu’on compare des marques, il est préférable de se demander d’abord si l’un des aspects de celles-ci est particulièrement frappant ou unique.

[26] La Requérante fait valoir que la Marque est constituée d’un syntagme de neuf syllabes composé de mots anglais reconnaissables, tandis que la Marque de commerce de l’Opposante est constituée d’un seul mot, avec une orthographe inhabituelle qui serait remarquée par les membres du public et qui sert à distinguer les marques de commerce comme question de première impression.

[27] J’estime que l’élément le plus frappant ou unique de la Marque est le mot « NEIGHBOURLY », puisque les mots « PROPERTY MANAGEMENT » décrivent les services fournis par la Requérante ou ses licenciés. J’estime que les marques de commerce des parties ont un certain degré de ressemblance dans la présentation, puisque la Marque de commerce de l’Opposante a une orthographe différente du premier mot de la Marque. Sur le plan phonétique, le premier élément, le plus frappant, de la Marque est identique à la Marque de commerce de l’Opposante. Dans la mesure où la Marque de commerce de l’Opposante serait reconnue comme étant une faute d’orthographe intentionnelle dans le mot « neighbourly », les marques de commerce des parties véhiculent des idées connexes, bien que, comme souligné ci-dessus, la Marque véhicule également l’idée de services de gestion immobilière.

[28] Dans l’ensemble, j’estime que ce facteur favorise l’Opposante, mais seulement dans une mesure limitée.

Autre circonstance de l’espèce : aucun cas de confusion réelle

[29] La preuve de cas de confusion réelle n’est pas requise pour démontrer l’existence d’une probabilité de confusion. Toutefois, l’emploi simultané de deux marques de commerce sans cas de confusion réelle est une circonstance de l’espèce qui peut suggérer une absence de probabilité de confusion, selon la nature et la durée particulières de cet emploi simultané [voir Christian Dior, SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, 20 CPR (4th) 155 (CAF) au para 19; voir également Aliments de Consommation Maple Leaf Inc c Kelbro Enterprises Inc, 2012 COMC 28, 99 CPR (4th) 424].

[30] En l’espèce, la Requérante souligne que les marques de commerce des parties coexistent depuis plus de cinq ans et soutient qu’il s’agit d’une circonstance pertinente à l’appui du fait qu’il n’y a aucune preuve d’un cas de confusion, citant Institute of Advanced Financial Planners c L’Association des conseillers en finances du Canada, 2017 COMC 164.

[31] Toutefois, comme discuté ci-dessus, il n’est pas clair si, ou pendant combien de temps, la Marque telle que demandée a été employée par la Requérante au Canada. Dans le même ordre d’idées, il n’est pas clair pendant combien de temps et dans quelle mesure la Marque de commerce de l’Opposante a été employée au Canada. Comme il a été noté ci-dessus, je ne suis pas prêt à conclure que la Marque de commerce de l’Opposante a été employée au Canada seulement en raison de la date de premier emploi indiquée dans la copie certifiée de cette marque de commerce. Bien que la Requérante ait joint des captures d’écran du site Web de l’Opposante, obtenues en mai 2023 [Pièce P] et un article d’octobre 2022 indiquant que l’Opposante avait été acquise par une entité appelée SingleKey [Pièce Q], ces documents ne montrent pas la durée ou l’étendue de l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante au Canada. Par conséquent, je ne suis pas prêt à tirer des conclusions sur la base de l’absence de preuve de confusion réelle.

Autre circonstance de l’espèce : famille de marques de commerce

[32] La Requérante fait valoir que la Marque fait partie d’une famille de marques de commerce appartenant à la Requérante. Afin de pouvoir s’appuyer sur une famille de marques de commerce, une partie doit prouver l’emploi de chaque marque de la famille alléguée [Mcdonald’s Corp c Alberto-Culver Co (1995), 61 CPR (3d) 382 (COMC); McDonald’s Corp v Yogi Yogurt Ltd (1982), 66 CPR (2d) 101 (CF 1re inst)].

[33] En l’espèce, les marques de commerce qui font partie de la famille alléguée de marques de commerce de la Requérante comprennent NEIGHBOURLY (enregistrement no LMC1,051,639) et NEIGHBOURLY Design (enregistrement no LMC1,051,640), toutes deux enregistrées en liaison avec des services d’information et des services logiciels, ainsi qu’une variété de marques de commerce comprenant le mot « NEIGHBOURLY », comme NEIGHBOURLY GARAGE DOOR, NEIGHBOURLY MAIDS, NEIGHBOURLY GLASS, etc. J’accepte que la preuve de la Requérante, comme les captures d’écran du site Web de la Requérante qui sont jointes à titre de Pièce B, démontre au moins l’emploi des marques de commerce NEIGHBOURLY et NEIGHBOURLY Design en liaison avec les services d’information [traduction] « offre d’information destinée aux consommateurs pour les propriétaires sur les fournisseurs de services pour des projets de réparation résidentielle et des projets d’entretien ménager », puisque de tels renseignements sont fournis sur la page Web où les deux marques de commerce sont affichées bien en vue.

[34] Toutefois, la Requérante n’a cité aucun exemple, en preuve, de l’emploi d’autres marques de commerce comprenant le mot « NEIGHBOURLY » dans sa famille alléguée de marques de commerce. Bien que je note que certaines publications sur les pages Facebook et Twitter de la Requérante [Pièces C et D] comprennent des mots-clés comme « #Neighborly #GlassRepair », je ne considère pas que cela constitue un emploi d’une marque de commerce, puisque les mots-clés ne sont pas traités différemment des autres mots-clés dans le texte et ne donnent aucune indication qu’ils portent une signification quelconque de marque de commerce [voir Lost Craft Inc c 101217990 Saskatchewan Ltd dba Direct Brewing Company, 2021 COMC 168 au para 28, conf par 2022 CF 1254]. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que la Requérante ait prouvé l’emploi de l’une ou l’autre des marques de commerce comprenant le mot « NEIGHBOURLY » au sens de la Loi. Étant donné qu’une partie qui cherche à établir une famille de marques doit établir qu’elle emploie plus d’une ou deux marques de commerce de la famille alléguée [Techniquip Ltd c Assoc olympique canadienne (1998), 1998 CanLII 7573 (CF), 145 FTR 59 (CF 1re inst), conf par 250 NR 302 (CAF); New Communications Inc c CHUM Ltd (2003), 32 CPR (4th) 168 (COMC)], je n’estime pas qu’il s’agit d’un facteur pertinent qui favorise la Requérante.

Conclusion

[35] La question posée par l’article 6(2) de la Loi est de savoir si les consommateurs des services fournis en liaison avec la Marque NEIGHBOURLY PROPERTY MANAGEMENT croiraient que ces services sont fournis ou autorisés par l’Opposante en raison de sa Marque de commerce NABORLY. Je l’ai évaluée comme une question de première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue de la Marque, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir de la Marque de commerce de l’Opposante, et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques de commerce.

[36] En l’espèce, je conclus qu’au mieux pour la Requérante, la probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de commerce de l’Opposante est égale. En particulier, j’estime qu’en raison du degré de ressemblance entre les marques de commerce, du fait que la Requérante n’a pas démontré un quelconque emploi ou une quelconque réputation de sa Marque et du genre des services et de la nature du commerce qui se chevauchent, la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau de démontrer qu’il n’existe aucune probabilité de confusion entre la Marque et la Marque de commerce de l’Opposante.

[37] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est accueilli.

Motif d’opposition : Article 38(2)a.1)

[38] L’Opposante prétend que la demande a été produite de mauvaise foi, car la Requérante savait, ou aurait dû savoir, au moment de la production, que l’Opposante jouissait de droits antérieurs sur la Marque de commerce de l’Opposante qui étaient en conflit avec le droit revendiqué de la Requérante d’employer et d’enregistrer la Marque. La date pertinente pour l’analyse en vertu de l’article 38(2)a.1) de la Loi est la date à laquelle la demande a été produite.

[39] Il est bien établi que la simple connaissance de la marque de commerce d’autrui n’appuie pas, en soi, une allégation de mauvaise foi [WOOT, Inc c WootRestaurants Inc, 2012 COMC 197]. Le simple aveuglement volontaire ou l’omission de se questionner au sujet des droits d’un concurrent à l’égard d’une marque de commerce est également insuffisant pour constituer de la mauvaise foi [Blossman Gas, Inc c Alliance Autopropane Inc, 2022 CF 1794]. En l’espèce, l’Opposante n’a produit aucune preuve (à l’exception de la copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante) ni aucune observation; elle ne s’est donc pas acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition. À ce titre, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 16(1)a)

[40] En vertu des articles 38(2)c) et 16(1)a) de la Loi, l’Opposante plaide que la Requérante n’a pas droit à l’enregistrement de la Marque au Canada parce que la Marque de commerce de l’Opposante avait été employée et révélée avant la date de production de la demande.

[41] Afin de s’acquitter de son fardeau initial à l’égard de ce motif, l’Opposante doit démontrer que sa Marque a été employée avant la date de production de la demande de la Requérante et qu’elle n’a pas été abandonnée à la date de l’annonce de la demande. Par conséquent, la preuve pertinente que l’Opposante peut invoquer est une preuve d’emploi antérieure à la date de la production de la demande. Cependant, la simple production d’une copie certifiée de l’enregistrement de l’Opposante n’est pas suffisante pour permettre à l’Opposante de s’acquitter de son fardeau de preuve à l’égard d’un motif d’opposition fondé sur des allégations d’absence de droit à l’enregistrement [voir Rooxs, Inc c Edit-SRL, 2002 CanLII 61421, 23 CPR (4th) 265 (COMC)].

[42] Étant donné que l’Opposante n’a produit aucune autre preuve lui permettant de s’acquitter de son fardeau, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 2

[43] L’Opposante a également plaidé qu’en vertu de l’article 2 de la Loi, la Marque n’est pas distinctive parce qu’elle ne distingue pas et n’est pas adaptée à distinguer les Services de la Requérante des Services de l’Opposante en liaison avec lesquels l’Opposante avait antérieurement employé et révélé la Marque de commerce de l’Opposante au Canada. La date pertinente pour un motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est la date de production de l’opposition [Metro-Goldwyn-Mayer Inc c Stargate Connections Inc, 2004 CF 1185 au para 25].

[44] Dans Bojangles’ International, LLC c Bojangles Café Ltd, 2006 CF 657 aux para 33 et 34, la Cour fédérale a indiqué qu’une marque de commerce pouvait annuler le caractère distinctif d’une autre marque si elle était connue, à tout le moins, dans une certaine mesure et que sa réputation au Canada était importante, significative ou suffisante, ou, à titre subsidiaire, si elle était bien connue dans une région particulière du Canada.

[45] L’Opposante n’a produit aucune preuve (à l’exception de la copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante) ni aucune observation; elle ne s’est donc pas acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 38(2)e)

[46] L’Opposante a plaidé que la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Services de la Requérante. La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de production de la demande.

[47] Les principes énoncés dans les affaires concernant l’ancien motif d’opposition fondé sur l’article 30e), quant à savoir si un requérant a l’intention de bonne foi d’employer la marque de commerce au Canada, sont instructifs à l’égard de ce nouveau motif. Comme pour l’ancien motif fondé sur l’article 30e), puisque les faits pertinents sont plus accessibles au requérant, et particulièrement relevant de ses connaissances, dans le cadre d’un motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e), le fardeau de preuve imposé à un opposant à l’égard de ce motif est léger et la quantité de preuves nécessaire pour s’en acquitter peut être très faible [Allergan Inc c Lancôme Parfums & Beauté & Cie, société en nom collectif (2007), 64 CPR (4th) 147 (COMC); Canadian National Railway c Schwauss (1991), 35 CPR (3d) 90 (COMC); Green Spot Co c John M Boese Ltd (1986), 12 CPR (3d) 206 aux p 210-11 (COMC)].

[48] Toutefois, l’Opposante n’a produit aucune preuve (à l’exception de la copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante) ni aucune observation et ne s’est donc pas acquittée de son fardeau à l’égard de ce motif d’opposition. Par conséquent, ce motif d’opposition est rejeté.

Motif d’opposition : Article 38(2)f)

[49] L’Opposante prétend que, à la date de production de la demande, la Requérante n’avait pas le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Services de la Requérante, étant donné les droits antérieurs de l’Opposante acquis par l’emploi de la Marque de commerce de l’Opposante.

[50] Toutefois, l’article 38(2)f) se rapporte au droit légal de la Requérante d’employer la marque de commerce (c’est-à-dire, conformément aux lois fédérales pertinentes et aux autres obligations juridiques), contrairement au droit de la Requérante d’enregistrer la marque (relativement à la marque de commerce d’une autre personne, conformément à l’article 16 de la Loi) [voir Premier Tech Home & Garden Inc c Ishihara Sangyo Kaisha, Ltd, 2022 COMC 25 au para 20; DCK Concessions Limited c Hong Xia ZHANG, 2022 COMC 200 au para 39]. Les faits plaidés ne sont pas ceux qui peuvent appuyer un motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)f). De plus, l’Opposante n’a produit aucune preuve (à l’exception de la copie certifiée de la Marque de commerce de l’Opposante) ni aucune observation pour appuyer ce motif. Ce motif d’opposition est donc rejeté.

Décision

[51] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

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G.M. Melchin

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne Osborne

 


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : Aucune audience tenue

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Aucun agent nommé

Pour la Requérante : Cassels Brock & Blackwell LLP

 

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