Décisions de la Commission des oppositions des marques de commerce

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Office de la propriété intellectuelle du Canada

LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

Référence : 2024 COMC 105

Date de la décision : 2024-05-31

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

DANS L’AFFAIRE D’UNE OPPOSITION

Opposante : Engineers Canada/Ingénieurs Canada

Requérante : Group Lotus Limited

Demande : 1896156 pour LOTUS ENGINEERING

Introduction

[1] Group Lotus Limited (la Requérante) a produit la demande d’enregistrement no 1,896,156 (la Demande) pour la marque de commerce LOTUS ENGINEERING (la Marque) en liaison avec l’état déclaratif des produits et services reproduits ci-dessous avec les classes de Nice (Cl) connexes :

Produits :

[traduction]

Cl 12 (1) Véhicules, nommément automobiles; véhicules terrestres, nommément automobiles, et accessoires constituants connexes.

Services :

[traduction]

Cl 42 (1) Services de génie, nommément services de génie automobile; services de génie des véhicules, nommément services de génie automobile; services de conception de véhicules et de moteurs; services de conseil concernant la réduction du bruit émis par les véhicules; conception de pièces de véhicule terrestre; conception de véhicules terrestres; conception d’outils pour la production de pièces de véhicule terrestre; consultation dans le domaine de la mise au point de véhicules; inspection de véhicules automobiles à des fins de contrôle technique; conception de moteurs à combustion interne pour véhicules terrestres.

[2] Engineers Canada/Ingénieurs Canada (l’Opposante) s’est opposée à la Demande pour un certain nombre de motifs, dont la plupart concerne l’emploi par la Requérante du terme « ENGINEERING » dans la Demande pour la Marque.

[3] Pour les raisons qui suivent, je rejette la Demande.

Le dossier

[4] La Demande relative à la Marque a été produite le 27 avril 2018 et a été annoncée aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 19 août 2020.

[5] Le 9 octobre 2020, l’Opposante a produit une déclaration d’opposition à l’encontre de la Demande en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13, dans sa version modifiée le 17 juin 2019 (la Loi). Les motifs d’opposition soulevés étaient fondés sur la mauvaise foi en vertu de l’article 38(2)a.1) de la Loi; la non-enregistrabilité en vertu des articles 12(1)b) et 12(1)e) de la Loi; l’absence de caractère distinctif en vertu de l’article 2 de la Loi; le fait que la Requérante n’employait pas et ne projetait pas d’employer la Marque en vertu de l’article 38(2)e); et l’absence de droit à l’emploi en vertu de l’article 38(2)f) de la Loi.

[6] La Requérante a produit et signifié sa contre-déclaration le 25 février 2021, niant les motifs d’opposition.

  • [7]À l’appui de son opposition, l’Opposante a produit ce qui suit :

  • l’affidavit of Gerard McDonald, souscrit le 16 juin 2021, accompagné des Pièces 1 à 25;
  • l’affidavit de D. Jill Roberts, souscrit le 21 juin 2021, accompagné des Pièces 1 à 36;
  • l’affidavit d’Evelyn Spence, souscrit le 10 juin 2021, accompagné de la Pièce 1.

[8] À l’appui de sa Demande, la Requérante a produit l’affidavit d’Akiv Jhirad, souscrit le 18 février 2022, accompagné des Pièces 1 à 95-C.

[9] En réponse, l’Opposante a produit un deuxième affidavit de Gerard McDonald, souscrit le 10 août 2022 (le Deuxième affidavit McDonald), et un deuxième affidavit de D. Jill Roberts, souscrit le 15 août 2022 (le Deuxième affidavit Roberts). L’Opposante a subséquemment reçu la permission de produire un troisième affidavit de Gerard McDonald, souscrit le 13 septembre 2022 (le Troisième affidavit McDonald).

[10] Aucun des déposants des parties n’a été contre-interrogé.

[11] Les deux parties ont produit des observations écrites et étaient présentes lors d’une audience.

[12] À l’audience, l’Opposante a retiré les motifs d’opposition fondés sur les articles 38(2)f), 38(2)a.1), 38(2)b) et 12(1)e) de la Loi. Par conséquent, la décision suivante tiendra compte uniquement des autres motifs d’opposition, à savoir les articles 38(2)b), 12(1)b), 38(2)d), 2 et 38(2)e) de la Loi.

La preuve

La preuve de l’Opposante

Le Premier affidavit McDonald

[13] M. McDonald est ingénieur civil et le directeur général de l’Opposante (para 1 et 2).

[14] L’Opposante est un organisme canadien à but non lucratif qui offre des services et du soutien à douze associations provinciales et territoriales responsables de la réglementation de la pratique de l’ingénierie au Canada (les Organismes de réglementation). Les Organismes de réglementation régissent la profession de l’ingénierie au Canada dans chacune des provinces et chacun des territoires du Canada, y compris l’autorisation de plus de 300 000 membres de la profession de l’ingénierie au Canada. Chaque Organisme de réglementation a été établi en vertu d’une loi de sa législature provinciale ou territoriale et assume le rôle d’autorité pour les ingénieurs sur son territoire. Une liste de ces lois est jointe à titre de Pièce 2 à l’affidavit de M. McDonald (les Lois sur l’ingénierie). Chacun des Organismes de réglementation forme les seuls membres de l’Opposante et, en collaboration avec l’Opposante, ils travaillent à faire progresser la profession d’ingénierie dans l’intérêt général des Canadiens (para 6 à 11).

[15] Aux paragraphes 23 à 33 de son affidavit, M. McDonald décrit la [traduction] « vaste portée de l’ingénierie », indiquant qu’il existe de nombreuses branches d’ingénierie et que chaque branche a des sous‑disciplines et des sous-branches spécialisées axées sur des technologies, des produits, des procédés de fabrication, des expertises ou des industries en particulier. De plus, M. McDonald décrit la nature de bon nombre de ces diverses branches de l’ingénierie, y compris des références à des tableaux énumérant des cours particuliers disponibles pour chaque branche de l’ingénierie dans les universités canadiennes (para 64 à 77). M. McDonald indique que, en date de 2018, il y avait 278 programmes d’ingénierie accrédités par le Bureau canadien d’agrément des programmes de génie, offerts par 44 établissements d’ingénierie (para 30).

[16] De plus, M. McDonald note qu’Emploi et Développement social Canada (EDSC) fournit une classification en ligne des emplois au Canada appelée Classification nationale des professions (CNP) (para 31). Il affirme que sur la base du contenu de la CNP, de sa propre expérience et de ses propres recherches, il estime qu’il y a des centaines de sous-disciplines et de spécialités en ingénierie au sein de la profession d’ingénieur. Il joint des copies de l’Indice des titres de la CNP 2011 et de la CNP 2016 relatif au mot clé « engineer » [ingénieur] (Pièces 8 et 9). Sur le site Web de l’Opposante, l’Opposante a associé les codes de la CNP pour diverses disciplines d’ingénierie à des programmes accrédités offerts au Canada (Pièce 10).

[17] Selon M. McDonald, [traduction] « l’emploi des termes qui permettent d’identifier la profession de l’ingénierie comme “ingénieur”, “ingénierie” et “ing.” est contrôlé par la loi » et, en général, [traduction] « aucune personne ou entreprise ne peut employer un quelconque titre, désignation ou abréviation d’une manière qui porterait à croire que la personne est autorisée à œuvrer dans le domaine de l’ingénierie professionnelle au Canada, si cette personne ou entreprise n’a pas la licence ou l’autorisation appropriée pour le faire ». De plus, il affirme que, au Canada, un [traduction] « ingénieur » est une personne qui a reçu un permis pour exercer l’ingénierie par un Organisme de réglementation après avoir démontré qu’il possède l’éducation, les compétences, les connaissances et l’expérience requises. Il explique qu’une personne non autorisée avec une éducation en ingénierie (obtenue soit au Canada, soit dans un autre pays) peut faire du travail d’ingénierie, mais seulement si son travail est supervisé par un ingénieur autorisé qui supervise le travail et assume la responsabilité pour celui-ci. En ce qui a trait aux restrictions législatives, il fournit un tableau qui identifie les sections particulières de chaque Loi provinciale et territoriale sur l’ingénierie, ainsi qu’une liste des lois provinciales et fédérales concernant les noms d’entreprise et les dénominations sociales à la Pièce 13 de son affidavit (para 43 à 48).

[18] M. McDonald atteste que, en 2016, l’Opposante a commandé une enquête nationale sur l’opinion publique pour évaluer la perception du grand public des ingénieurs professionnels. Il affirme que le rapport d’enquête, réalisé par Innovative Research Group, indique que 55 % des personnes sondées définissaient le mot [traduction] « ingénieur » comme une désignation professionnelle (para 22, Pièce 7).

[19] M. McDonald explique que le large spectre du travail effectué par les ingénieurs peut entraîner des conséquences significativement néfastes ou même catastrophiques s’il est exécuté par des personnes non habilitées (para 34). Il fournit des exemples historiques au Canada à cet égard (para 35 et 49, Pièces 11 et 14).

[20] M. McDonald a visité les sites Web de la Requérante à www.lotuscars.com et www.lotusengineering.com et fournit des extraits de ces sites. Après avoir examiné le contenu de ces sites et la Demande pour la Marque, M. McDonald conclut que les produits et services de la Requérante correspondent à la portée des produits et services qui seraient conçus, produits et fournis par des ingénieurs professionnels ou sous leur supervision (para 57 à 63).

[21] Enfin, M. McDonald atteste que chacun des Organismes de réglementation conserve un registre de personnes ou d’entités autorisées à exercer la pratique d’ingénierie sur leur territoire et fournit des certificats à cet égard (para 82 et 83). Il joint des confirmations certifiées de certains des Organismes de réglementation provinciaux et territoriaux mentionnés que la Requérante n’est pas autorisée ou inscrite pour œuvrer dans le domaine de l’ingénierie et que la Requérante n’emploie aucun ingénieur autorisé à pratiquer l’ingénierie dans ces administrations (para 84 et 85, Pièce 24). M. McDonald explique que, en raison des perturbations commerciales découlant de la pandémie de la COVID-19, l’Opposante n’a pas été en mesure d’obtenir la confirmation de certains Organismes de réglementation provinciaux, à savoir ceux dans les provinces de l’Ontario et du Québec (para 86).

Le Premier affidavit Roberts

[22] Mme Roberts est auxiliaire juridique (para 1).

[23] Mme Roberts a visité un certain nombre de sites Web entre octobre 2020 et juin 2021. Elle décrit cette recherche en ligne et joint à son affidavit divers documents, captures d’écran et extraits de pages Web obtenus au cours de ses visites de tels sites Web, y compris ce qui suit :

· les résultats de recherches dans les répertoires de membres des Organismes de réglementation (pour l’Alberta, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et le Yukon) pour des entreprises qui sont autorisées par ces Organismes de réglementation à pratiquer l’ingénierie et qui ont le mot « engineering » dans leur nom d’entreprise (para 2 à 7, Pièces 1 à 6);

· des extraits des répertoires canadiens des Pages jaunes pour les villes de Calgary, Vancouver et Halifax, datés de 2015 à 2017, d’enregistrements pour « Engineers » (para 8, Pièce 7);

· des imprimés d’un éventail de sites Web de programme d’ingénierie d’universités canadiennes (y compris des programmes d’ingénierie automobile) et des calendriers universitaires, y compris des calendriers archivés remontant à 2015 (para 8 à 18 et 35, Pièces 8 à 17, 33 et 34);

· des captures d’écran de pages Web de www.lotuscars.com et www.lotusengineering.com (para 19 à 21, Pièces 18 à 20);

· des imprimés de la base de données de brevets en ligne de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada indiquant des brevets produits par la Requérante (para 22, Pièce 21);

· des imprimés de résultats de diverses recherches en ligne (Canada 411, Google.ca) pour le nom Lotus et pour le mot « Lotus » pour des entreprises (à Ottawa et en Ontario) (para 23 à 25, Pièces 22 à 24);

· des captures d’écran de pages Web d’entreprises de l’Ontario qui comprennent ou intègrent « Lotus » dans leur dénomination sociale, y compris la page de profil LinkedIn et l’entrée au répertoire des membres en ligne de l’Organisme de réglementation de l’Ontario pour le fondateur d’une de ces entreprises (para 26 à 29, Pièces 25 à 28);

· des imprimés de résultats d’une recherche pour le mot LOTUS sur la page de recherche d’une société de régime fédéral du gouvernement du Canada (para 30, Pièce 29);

· un imprimé de la page d’accueil du site Web de LOTUS STEMM (www.lotusstemm.org) et une copie de la page d’information sur la société de régime fédéral pour cette entreprise de la page de recherche d’une société de régime fédéral du gouvernement du Canada (para 31, Pièce 30);

· des articles et des publications archivés remontant à 2005 concernant l’ingénierie automobile (des sites Web de l’Université McMaster, wheels.ca et Globe & Mail GlobeCampus) (para 32 à 34, Pièces 31 à 33);

· un imprimé de l’enregistrement de marque de commerce des États-Unis numéro 5830602 pour LOTUS ENGINEERING obtenu du site Web de l’USPTO (para 36, Pièce 35);

· des extraits du dictionnaire The Canadian Oxford Dictionary pour la définition du mot « lotus » (para 37, Pièce 36).

L’Affidavit Spence

[24] Mme Spence est l’avocate et la secrétaire organisationnelle de l’Opposante (para 1).

[25] Mme Spence atteste que chacun des Organismes de réglementation maintient un registre de personnes ou d’entités autorisées à exercer la pratique d’ingénierie sur leur territoire (para 5).

[26] Mme Spence atteste qu’elle a demandé une confirmation certifiée auprès des Organismes de réglementation de l’Ontario et du Québec quant à savoir si la Requérante possède un Permis de pratique ou un Certificat d’autorisation, le cas échéant, pour œuvrer dans le domaine de l’ingénierie au Canada. La demande comprenait également la question de savoir si un quelconque ingénieur professionnel autorisé sur leur territoire respectif avait nommé la Requérante comme employeur (para 6). Elle joint, à titre de Pièce 1 à son affidavit, les réponses qu’elle a reçues à ces demandes. Les deux réponses indiquaient que la Requérante ne possède pas présentement (et pas avant le 27 avril 2018 en Ontario) un tel permis de pratique ou certificat d’autorisation (le cas échéant) et qu’aucun titulaire d’un permis sur ces territoires n’a nommé la Requérante comme employeur.

La preuve de la Requérante

L’Affidavit Jhirad

[27] M. Jhirad est stagiaire l’agent de la Requérante (para 1). Les 16 et 17 février 2022, il a mené un large éventail de recherches en ligne. Il joint à son affidavit des extraits de sites Web qu’il a visités et de dictionnaires qu’il a consultés au cours de sa recherche.

[28] En particulier, il fournit ce qui suit :

· des définitions du dictionnaire pour « ENGINEER » et « ENGINEERING » du site dictionary.com (Pièces 1 et 2);

· des imprimés de pages Web du site Web de la Requérante à www.lotusengineering.com (Pièces 3 à 11) et www.lotuscars.com (Pièce 12);

· des imprimés d’un large éventail d’articles en ligne (y compris de Radio-Canada, BNN Bloomberg, AutoTrader.ca, The Globe and Mail, et plus) portant sur la Requérante et ses voitures, certains de ses directeurs de l’ingénierie et cadres établis au Royaume-Uni et les profils de plusieurs des directeurs de l’ingénierie et cadres établis au Royaume-Uni de la Requérante sur LinkedIn (Pièces 13 à 18, 26 à 30, 32 à 34 et 68 à 83);

· des imprimés des entrées Wikipédia pour « Lotus Cars », « Jacques Villenueve » [sic] et les résultats des courses automobiles du Grand Prix canadien de 1967 à 2015 (Pièces 19, 31, 36 à 67);

· des imprimés de pages Web de divers concessionnaires situés au Canada qui vendent des voitures Lotus (Pièces 20 à 25);

· des imprimés de la Base de données sur les marques de commerce canadiennes de marques de commerce déposées appartenant à la Requérante qui comportent le terme LOTUS (Pièces 84-A et 84-B);

· des imprimés de la Base de données sur les marques de commerce canadiennes de marques de commerce déposées appartenant à des entités non canadiennes qui comprennent les termes « ENGINEER » (1 résultat), « ENGINEERS » (6 résultats), « ENGINEERED » (65 résultats) et « ENGINEERING » (21 résultats) (Pièces 85 à 88);

· des imprimés de résultats de recherche sur www.amazon.ca pour des livres employant les mots clés « LOTUS ENGINEERING » et pour des livres publiés depuis 2017 qui contiennent les mots « ENGINEERING » ou « ENGINEER » dans le titre (Pièces 89-A à 91);

· des imprimés de résultats de recherche sur www.chapters.indigo.ca pour les livres en anglais employant le mot clé « ENGINEER » (Pièce 92);

· des imprimés de résultats de recherche sur www.yellowpages.ca pour des entreprises situées au Canada au moyen des mots clés « ENGINEER » et « ENGINEERING » (Pièces 93 et 94);

· des imprimés de profils LinkedIn de la Requérante, y compris sa section [traduction] « Emplois » au moyen du terme de recherche « engineer » (Pièces 95-A, 95-B et 95-C).

La contre-preuve de l’Opposante

Le Deuxième affidavit McDonald

[29] Le deuxième affidavit de M. McDonald est en réponse à la preuve de l’état du registre qui se trouve dans l’affidavit de M. Jhirad aux Pièces 85 à 88. C’est-à-dire, les imprimés de marques de commerce déposées indiqués comme appartenant à des entités non canadiennes qui comprennent les termes « ENGINEER », « ENGINEERS », « ENGINEERED » et « ENGINEERING ».

[30] M. McDonald explique que l’Opposante consent habituellement aux demandes d’enregistrement de marques de commerce lorsque :

a) le requérant est autorisé à œuvrer dans le domaine de l’ingénieur dans au moins une circonscription administrative au Canada ou le requérant emploie des personnes qui sont autorisées à œuvrer dans le domaine de l’ingénierie sur au moins un territoire au Canada;

b) le requérant est l’éditeur de magazines, de périodiques ou de journaux s’adressant aux membres de la profession de l’ingénierie;

c) le requérant est une organisation de la profession de l’ingénierie ou est au profit de ses membres.

[31] M. McDonald présente ensuite tous les cas de marques de commerce trouvées par M. Jhirad dans les résultats de sa recherche de l’état du registre susmentionnée pour les marques de commerce comprenant les termes ENGINEER, ENGINEERS et ENGINEERING, où la marque de commerce satisfait à l’un de ces critères ou n’était pas, pour une quelconque autre raison, considérée comme préoccupante ou non pertinente (p. ex. ne visait pas des produits ou des services que le public estimerait provenir d’ingénieurs professionnels, était uniquement à l’égard d’un dessin ou avait été enregistrée en 1955 avant que l’Opposante surveille de telles marques et s’y oppose). Subséquemment aux explications de M. McDonald, il ne reste que trois enregistrements de marques de commerce sans explication qui comprennent le terme ENGINEERING.

[32] En ce qui a trait au terme ENGINEERED, M. McDonald affirme que l’Opposante ne s’oppose pas en général aux marques de commerce formées de ce mot, ou le contenant, mais a dans certains cas demandé la radiation sommaire de telles marques de commerce. Il fournit une liste et joint les détails (Pièce B) de quatre de ces marques de commerce qui ont été récemment radiées selon ses affirmations.

Le Deuxième affidavit Roberts

[33] Le 19 juillet 2022, Mme Roberts a visité plusieurs des sites Web de concessionnaires automobiles canadiens que M. Jhirad avait visités, dont les pages avaient été annexées à son affidavit (Pièces 20 à 25 de l’affidavit Jhirad). Elle a également examiné diverses sections de ces sites Web et elle fournit des captures d’écran à cet égard sous les Pièces 1 à 4 de son propre affidavit.

[34] De plus, et également le 19 juillet 2022, Mme Roberts a de nouveau consulté la base de données en ligne des marques de commerce de l’USPTO et a mené une recherche pour le terme Lotus Engineering. Elle joint à titre de Pièce 5 à son affidavit un imprimé de l’enregistrement de marque de commerce des États-Unis numéro 5830602, pour LOTUS ENGINEERING, appartenant à Group Lotus Limited PLC.

La preuve permise de l’Opposante

Le Troisième affidavit McDonald

[35] Le troisième affidavit de M. McDonald fournit des copies certifiées de lettres des Organismes de réglementation de l’Ontario et du Québec (Pièce 1) qui ont été jointes initialement et à l’origine à titre de preuve à l’affidavit Spence.

Fardeau de preuve et fardeau ultime

[36] Conformément aux règles de preuve habituelles, l’Opposante a le fardeau de preuve initial d’établir les faits sur lesquels elle appuie les allégations formulées dans sa déclaration d’opposition [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd (1990), 30 CPR (3d) 293 (CF 1re inst)]. La présence d’un fardeau de preuve imposé à l’Opposante à l’égard d’une question donnée signifie que, pour que cette question soit prise en considération, il doit exister suffisamment de preuves à partir desquelles on peut raisonnablement conclure à l’existence des faits allégués à l’appui de cette question.

[37] La Requérante a le fardeau ultime de démontrer que la Demande ne contrevient pas aux dispositions de la Loi ainsi que l’allègue l’opposant dans le cas des allégations à l’égard desquelles l’Opposante s’est acquittée de son fardeau de preuve. La présence d’un fardeau ultime qui incombe à la Requérante signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion déterminante une fois que toute la preuve a été examinée, la question doit être tranchée à son encontre.

Évaluation des motifs d’opposition

[38] À titre de préambule aux motifs d’opposition particuliers établis dans la déclaration d’opposition, l’Opposante fait valoir ce qui suit :

· L’Opposante est une fédération des Organismes de réglementation provinciaux et territoriaux prescrits par la loi.

· L’ingénierie est une profession réglementée au Canada et les Organismes de réglementation de l’ingénierie (par l’entremise des Lois sur l’ingénierie) disent qui est habilité à exercer la pratique de l’ingénierie dans la circonscription administrative respective. Pour être habilitée à exercer la pratique de l’ingénierie au Canada, une personne ou une entreprise doit satisfaire aux normes éducationnelles et professionnelles très strictes.

· L’emploi du terme ENGINERING est également réglementé par les lois provinciales et territoriales. Aucune personne ou société, y compris la Requérante, n’a le droit de prétendre, expressément ou par implication, qu’elle a le droit d’exercer la pratique d’ingénierie ou qu’elle est un membre autorisé de la profession de l’ingénierie, dans toute province ou tout territoire au Canada, à moins qu’elle soit, en fait, autorisée à exercer l’ingénierie dans cette circonscription administrative (jointe à titre d’Annexe A à la déclaration d’opposition est une [traduction] « liste de ces lois et des numéros d’articles pertinents »).

· Il existe également des dispositions législatives commerciales, au niveau fédéral et provincial, qui limitent l’emploi des titres professionnels dans le nom (compris à l’Annexe A à la déclaration d’opposition est [traduction] « un échantillon de ces lois et des numéros d’articles pertinents »).

· Les produits et services visés par la Demande relèvent des types de produits et services offerts par des ingénieurs professionnels, y compris, sans toutefois s’y limiter, les produits et services offerts par des ingénieurs de véhicules, des ingénieurs automobiles et des ingénieurs-conseils. L’ingénierie des véhicules et automobiles comporte des éléments de l’ingénierie mécanique, électrique, électronique, informatique et de sécurité.

· Les personnes ou les entreprises qui ne sont pas habilitées à exercer la pratique de l’ingénierie dans une province ou un territoire donné, mais qui le sous-entendent (par l’emploi d’un titre d’ingénierie dans leurs nom, titre ou marque de commerce indiquant qu’elles sont ainsi habilitées), posent une menace à la sécurité et au bien-être du public.

Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b)

[39] L’Opposante plaide que la Demande n’est pas conforme à l’article 12(1)b) de la Loi, puisque la Marque, qu’elle soit illustrée, écrite ou prononcée, donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des produits et des services en liaison avec lesquels son emploi est projeté ou du statut des personnes employées dans leur production. L’Opposante fait valoir que, à la lumière du fait que la Marque comprend le terme ENGINEERING, lequel est contrôlé au Canada, il s’ensuit que :

i. si des membres de la profession de l’ingénierie au Canada sont impliqués dans la production des produits et services, alors la Marque est clairement descriptive de la nature et de la qualité des produits et des services et des personnes employées dans leur production;

ii. si des membres de la profession de l’ingénierie au Canada ne sont pas impliqués dans la production des produits et services, alors la Marque donne une description fausse et trompeuse de la nature et de la qualité des produits et des services et des personnes employées dans leur production.

[40] L’Opposante plaide en outre que la Marque donne une description claire ou une description fausse et trompeuse de la nature ou de la qualité des produits et des services ou des personnes employées dans la production puisque le mot LOTUS devant le mot ENGINEERING entraîne une marque de commerce que les consommateurs percevraient comme invoquant une société d’ingénierie qui emploie des ingénieurs professionnels.

[41] La date pertinente pour évaluer ce motif d’opposition est la date de production de la Demande, à savoir le 27 avril 2018 [Fiesta Barbeques Ltd c General Housewares Corp, 2003 CF 1021, 28 CPR (4th) 60].

[42] Le mot « clair » à l’article 12(1)b) signifie [traduction] « facile à comprendre, évident ou simple »; le mot « nature » signifie [traduction] « une particularité, un trait ou une caractéristique du produit » [Drackett Co of Canada Ltd c American Home Products Corp (1968), 55 CPR 29 à la p 23 (C de l’É)]. Pour déterminer si une marque de commerce donne une description claire, il ne faut pas scruter séparément chacun des éléments constitutifs de la marque de commerce et l’analyser dans ses moindres détails, mais la considérer dans son ensemble sous l’angle de la première impression, du point de vue du consommateur ou de l’utilisateur moyen des produits ou services connexes [voir Wool Bureau of Canada Ltd c Canada (Registraire des marques de commerce) (1978), 40 CPR (2d) 25 (CF 1re inst)]. À cet égard, le registraire doit non seulement tenir compte de la preuve, mais également faire preuve de bon sens [Neptune SA c Canada (Procureur général) (2003), 29 CPR (4th) 497 (CF 1re inst)].

[43] L’interdiction relative aux marques de commerce qui donnent une description fausse et trompeuse vise à empêcher que le public soit induit en erreur [Atlantic Promotions Inc c Canada (Registraire des marques de commerce), 1984 CarswellNat 831 (CF 1re inst), 2 CPR (3d) 183; et Provenzano c Canada (Registraire des marques de commerce), 1977 CarswellNat 676 (CF 1re inst)].

[44] Pour qu’une marque de commerce donne une description « fausse et trompeuse », elle doit tromper le public quant à la nature ou à la qualité des produits ou des services connexes [Atlantic Promotions Inc c le Registraire des marques de commerce (1984), 2 CPR (3d) 183 (CF 1re inst)]. La nature descriptive de la marque de commerce doit s’appliquer à la composition matérielle des produits ou services ou faire référence à une qualité ou caractéristique intrinsèque évidente des produits ou des services [ITV Technologies Inc c WIC Television Ltd, 2003 CF 1056; Provenzano c Registraire des marques de commerce (1977), 37 CPR (2d) 189 (CF 1re inst), conf par (1978) 40 CPR (2d) 288 (CAF)].

[45] La question de savoir si une marque de commerce donne une « description fausse et trompeuse » doit être envisagée du point de vue de l’acheteur moyen des produits ou services connexes. La question doit être tranchée en tenant compte de la marque de commerce dans son ensemble sous l’angle de la première impression à la lumière des produits ou services connexes [voir Canadian Parking Equipment c Canada (Registraire des marques de commerce) (1990), 34 CPR (3d) 154 (CF 1re inst); et Conseil du régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l’Ontario c Canada (Procureur général), 2012 CAF 60]. En faisant cette détermination, une fois de plus, le registraire doit non seulement tenir compte de la preuve, mais également faire preuve de bon sens dans l’évaluation des faits [Neptune SA, précitée].

[46] Le test acceptable à appliquer est la question de savoir si les mots qui donnent une description fausse et trompeuse [traduction] « dominent la marque de commerce visée par la demande au point […] de faire obstacle à l’enregistrement de celle-ci » [voir Conseil canadien des ingénieurs c John Brooks Co, 2004 CF 586, 35 CPR (4th) 507 au para 21 (CF 1re inst); Chocosuisse Union des Fabricants - Suisses de Chocolate c Hiram Walker & Sons Ltd (1983), 77 CPR (2d) 246 (COMC); et Lake Ontario Cement Ltd c Registraire des marques de commerce (1976), 31 CPR (2d) 103 (CF 1re inst)].

[47] Si seulement une partie d’une marque de commerce porte à objection, la marque de commerce dans son ensemble peut être encore enregistrable tant que la partie portant à objection ne domine pas la marque de commerce visée par la demande dans son ensemble de manière à faire obstacle à l’enregistrement de celle-ci [voir Conseil canadien des ingénieurs c John Brooks Co (2004), 2004 CF 586, 35 CPR (4th) 507 (CF 1re inst)].

La Marque donne-t-elle une description claire de la nature et de la qualité des produits et des services ou des personnes employées dans leur production?

[48] L’Opposante fait valoir que « engineering » dans le contexte des produits et services de la Requérante communique clairement la signification d’un travail fait par des ingénieurs agréés. L’Opposante fait valoir que, dans son ensemble, la Marque donne une description claire au public que Lotus Engineering est une société ou une entreprise d’ingénierie offrant des services d’ingénierie au public. À l’appui, l’Opposante fait référence à la preuve mise de l’avant par M. McDonald et Mme Roberts à l’égard de ce qui suit :

· des titres d’emplois d’ingénierie de la CNP du gouvernement canadien, les définitions du gouvernement canadien des divers domaines de l’ingénierie et les programmes universitaires canadiens accrédités, lesquels démontrent, selon ses affirmations, que les produits et services visés par la Demande de la Requérante (et comme reproduits dans les extraits des sites Web de la Requérante), relèvent clairement du domaine de l’ingénierie automobile et d’autres domaines de l’ingénierie (y compris mécanique; électrique; industrielle, fabrication et sécurité; logicielle; et ingénierie-conseil);

· le mot « ingénierie », étant un mot qui est contrôlé au Canada dans chaque province et territoire par les Organismes de réglementation servant d’autorités d’autorisation pour les ingénieurs sur leur territoire respectif;

· divers brevets canadiens appartenant à Group Lotus Limited et Group Lotus PLC pour leur innovation dans des aspects techniques de la conception automobile qui, selon les affirmations de l’Opposante, indiquent que leurs produits sont en effet techniques et spécialisés de manière à ce que l’on pourrait s’attendre à la participation d’ingénieurs;

· des résultats de l’enquête indiquant que 55 % des personnes sondées définissaient le mot « engineer » comme une désignation professionnelle.

[49] L’Opposante fait valoir que les consommateurs s’attendent à ce que les produits et services de la Requérante soient offerts par des ingénieurs agréés, particulièrement à la lumière de l’importance de l’expertise technique et en sécurité dans l’ingénierie automobile [citant Engineers Canada/Ingénieurs Canada c Burtoni, 2014 COMC 174, 127 CPR (4th) 378 au para 47].

[50] L’Opposante fait référence à un certain nombre de précédents pour affirmer que les mots « engineer » et « engineering » ont adopté une signification claire en liaison avec le travail exécuté par des ingénieurs professionnels [voir Conseil canadien des ingénieurs c John Brooks Co, 2004 CF 586, 35 CPR (4th) 507 aux para 19 et 20; Conseil canadien des ingénieurs c Oyj (2008), 68 CPR (4th) 228 aux para 28 et 29 (COMC); Burtoni, précitée; Engineers Canada/Ingénieurs Canada c Financière Westrand, 2014 COMC 14 au para 33; Engineers Canada/Ingénieurs Canada c REM Chemicals Inc, 2014 CF 644, 125 CPR (4th) 245 au para 61e); Engineers Canada/Ingénieurs Canada c Affinia International Inc., 2015 COMC 8, 132 CPR (4th) 129 aux para 28 et 29; Engineers Canada/Ingénieurs Canada c Eureka! Institute, Inc, 2021 COMC 2015 aux para 25 et 31; et Engineers Canada/Ingénieurs Canada c ThyssenKrupp AG, 2022 COMC 118 aux para 24 et 29].

[51] La Requérante fait valoir que la Marque, dans son intégralité, est de toute évidence non descriptive, et ne peut, par conséquent, pas donner une « description claire » de la nature et de la qualité des produits et des services ou des personnes employées dans leur production. En particulier, la Requérante fait valoir que la Marque comporte la marque de commerce déposée et [traduction] « célèbre » LOTUS de la Requérante, laquelle, selon ses affirmations, fait partie d’une famille plus large de marques de commerce déposées formées de LOTUS (faisant référence aux nombreux articles et aux nombreuses publications joints à l’affidavit Jhirad concernant la Requérante, ses automobiles LOTUS et les résultats du Grand Prix canadien entre 1967 et 2015).

[52] En effet, c’est la marque de commerce dans son ensemble qui doit être considérée et, ce faisant, il est clair que le mot LOTUS ne donne pas une description des produits et services de la Requérante. Ainsi, bien que j’accepte que l’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial dans le cadre de ce motif, la Marque dans son ensemble ne peut pas être considérée comme donnant une description claire.

La Marque donne-t-elle une description fausse et trompeuse de la nature et de la qualité des produits et des services ou des personnes employées dans leur production?

[53] L’Opposante fait valoir que, puisque la Requérante n’est pas autorisée à pratiquer l’ingénierie au Canada et n’emploie aucun ingénieur professionnel agréé canadien pour concevoir et produire ses produits projetés, l’emploi du mot « Engineering » dans LOTUS ENGINEERING est trompeur et fait que la Marque dans son ensemble donne une description fausse et trompeuse.

[54] Notant le test concernant les marques donnant une description fausse et trompeuse, l’Opposante fait valoir que le mot « Engineering » domine la Marque, particulièrement dans le contexte des produits et services de la Requérante étant dans le domaine de l’ingénierie automobile. L’Opposante fait également valoir que lorsque ENGINEERING est associé au mot LOTUS, cela donne l’impression d’une entreprise d’ingénierie. L’Opposante fait valoir que la preuve en effet démontre que la Requérante fabrique et conçoit des voitures et emploie des ingénieurs étrangers dans ses bureaux à l’extérieur du Canada. De plus, l’Opposante note que la Requérante indique dans sa Demande qu’elle a offert des [traduction] « Services de génie, nommément services de génie automobile; services de génie des véhicules, nommément services de génie automobile » en liaison avec la Marque depuis près de 30 ans au Canada. L’Opposante fait valoir que l’on s’attendrait à ce que les services d’ingénierie offerts à l’intérieur des frontières canadiennes sont exécutés par des ingénieurs canadiens agréés, comme l’exige la loi.

[55] De plus, l’Opposante fait valoir que la Cour fédérale a soutenu ce qui suit :

[…] le fait que l’emploi du mot « engineering » soit réglementé a des incidences en l’espèce. La plupart des gens présumeraient que les entreprises utilisant ce mot dans leur nom offrent des services d’ingénierie et ont des ingénieurs à leur emploi, à moins que le contraire ne ressorte clairement du contexte. [John Brooks, supra].

[56] La Requérante fait valoir que, à l’égard de l’allégation de l’Opposante que la Marque donne une description fausse et trompeuse, ce motif d’opposition comporte deux questions : (1) les produits et services visés par la Demande en sont-ils pour lesquels un consommateur typique s’attendrait à ce qu’ils concernent des ingénieurs canadiens agréés; et, le cas échéant, (2) « engineering » domine-t-il la Marque de manière à ce qu’elle donne une description fausse et trompeuse et qu’elle devienne donc non enregistrable?

[57] Pour commencer, la Requérante fait valoir que le terme « engineering » possède de nombreuses définitions, bien au-delà d’être limité aux services exécutés par des ingénieurs canadiens agréés.

[58] Cependant, l’Opposante note correctement qu’il faut tenir compte de ce que le mot « engineering » signifierait pour le consommateur moyen, comme question de première impression à la vue de la Marque dans son ensemble dans le contexte des produits et services particuliers auxquels elle est associée.

[59] En l’espèce, comme dans bon nombre des affaires citées par l’Opposante [Brooks, supra; Oyj, supra; Burtoni, supra; Westrand, supra, etc.], une ample quantité de preuve est fournie par l’Opposante comme quoi le terme « engineering » est étroitement contrôlé et l’ingénierie automobile est un domaine reconnu de l’ingénierie au Canada. De plus, puisque la Marque fait l’objet d’une demande pour l’emploi en liaison avec des produits et services qui relèvent clairement du domaine de l’ingénierie automobile, j’estime que les consommateurs s’attendraient à ce que de tels produits et services soient offerts par des ingénieurs professionnels.

[60] La Requérante a présenté plusieurs observations à l’égard de la preuve de l’état du registre dans le cadre de l’affidavit Jhirad. Cependant, je suis convaincue que la preuve mise de l’avant dans la contre-preuve de l’Opposante (le Deuxième affidavit McDonald) répond à toute préoccupation d’un motif d’emploi des termes comme « engineer » ou « engineering » qui appuierait la position de la Requérante.

[61] La Requérante fait valoir que, en tout cas, la Marque dans son ensemble ne peut pas donner une description fausse et trompeuse, puisque LOTUS est l’élément dominant de la Marque. À cet égard, la Requérante fait valoir que « engineering » est un mot répandu et générique qui n’est pas intrinsèquement distinctif. De plus, la Requérante fait valoir que sa marque de commerce déposée LOTUS, laquelle figure au début de la Marque et qui, selon ses affirmations, est exclusive à la Requérante, est la partie la plus dominante et frappante de la Marque. Elle compare l’espèce à l’affaire dans Conseil canadien des ingénieurs c COMSOL AB, 2011 COMC 3, pour la marque de commerce COMSOL ENGINEERING, où il a été soutenu que le premier mot COMSOL était distinctif et dominait la marque, de façon à ce que la marque dans son ensemble ne peut pas être considérée comme donnant une description fausse et trompeuse. Le fait de cette affaire se distingue cependant, puisqu’il a été conclu que les produits en question dans cette affaire étaient destinés à l’emploi par des ingénieurs et que le public cible de ces produits ne serait pas trompé à croire qu’un ingénieur professionnel canadien était employé dans la production de ces produits.

[62] La Requérante fait également valoir que LOTUS est particulièrement frappante puisque : 1) il s’agit d’une marque célèbre pour des automobiles de luxe et de cours; 2) elle fait partie d’une famille de marques déposées existante appartenant à la Requérante en liaison avec les automobiles; et 3) en revanche, il y a un emploi répandu des mots ENGINEERS, ENGINEERED et ENGINEERING par d’autres, ce qui rend « engineering » courant, intrinsèquement faible et un lui confère un aspect relativement faible de la marque.

[63] Je ne suis pas d’accord, que je tienne ou non compte des critiques de l’Opposante envers la preuve de la Requérante de sa réputation pour LOTUS. Comme il a été soutenu dans Brooks, supra, au para 21, le test pour la description fausse et trompeuse n’indique pas que la partie offensante de la marque de commerce doit être l’élément dominant, mais plutôt :

[…] « dominent la marque de commerce visée par la demande au point … de faire obstacle à l’enregistrement de celle-ci … » : Chocosuisse Union des Fabricants - Suisses de Chocolate c. Hiram Walker & Sons Ltd., (1983), 77 C.P.R. (2d) 246 (C.O.M.C.), citant Lake Ontario Cement Ltd. c. Registrar of Trade Marks (1976), 31 C.P.R. (2d) 103.

[64] À mon avis, la présence du terme « engineering » dans la Marque est évidente, claire et domine la Marque, particulièrement dans le contexte les produits et services visés par la Demande. Par conséquent, en appliquant le bon sens aux faits de l’espèce, la Marque dans son ensemble, à la première impression, mènerait les consommateurs à croire que les produits et services associés sont offerts par des ingénieurs professionnels. Cependant, il n’y a aucune preuve que des ingénieurs professionnels sont employés dans la production des produits et services de la Requérante. Ainsi, la Marque donne une description fausse et trompeuse des personnes employées dans la production des produits et services visés par la Demande.

[65] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)b) de la Loi est accueilli.

Motif d’opposition fondé sur l’article 2

[66] L’Opposante plaide que la Marque n’est pas distinctive au sens de l’article 2 de la Loi, puisque :

i. Elle ne distingue pas, et n’est pas adaptée à distinguer, les produits et les services de la Requérante comme décrits dans la Demande des produits et des services des autres, y compris des ingénieurs agréés, des sociétés d’ingénierie et des entités qui sont agréées ou autorisées pour pratiquer l’ingénierie au Canada.

ii. Elle donne une description claire ou fausse et trompeuse puisque l’emploi de la Marque par la Requérante suggère que les produits et services de la Requérante sont produits, fournis, vendus, loués ou cédés sous licence par des personnes et des entreprises autorisées à exercer l’ingénierie au Canada ou que la Requérante est autorisée par l’Opposante ou les Organismes de réglementation ou associée à eux.

[67] Une marque de commerce donnant une description claire ou une description fausse et trompeuse n’est, nécessairement, pas distinctive [Conseil canadien des ingénieurs professionnels c APA – Engineered Wood Assn (2000), 7 CPR (4th) 239 (CF 1re inst) au para 253, 2000 CanLII 15543 (CF)].

[68] Puisque j’ai déjà conclu que la Marque donne une description fausse et trompeuse en date du 27 avril 2018 et que je ne dispose d’aucune raison pour conclure du contraire à la date de production de la déclaration d’opposition (à savoir, le 9 octobre 2020), le motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif est également accueilli. Par conséquent, je n’ai pas à examiner le premier volet du motif d’opposition fondé sur l’absence de caractère distinctif comme il est noté ci-dessus.

Motif d’opposition fondé sur l’article 38(2)e)

[69] Puisque j’ai déjà tranché en faveur de l’Opposante à l’égard de ses motifs d’opposition en vertu des articles 12(1)b) et 2, je m’abstiendrai d’examiner ce dernier motif d’opposition.

Décision

[70] Compte tenu de ce qui précède, dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette la demande d’enregistrement selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.

Kathryn Barnett

Membre

Commission des oppositions des marques de commerce

Office de la propriété intellectuelle du Canada

Traduction certifiée conforme

William Desroches

Félix Tagne Djom

Manon Duchesne Osborne


Comparutions et agents inscrits au dossier

DATE DE L’AUDIENCE : 2024-01-24

COMPARUTIONS

Pour l’Opposante : Geoff Langen

Pour la Requérante : Mark Evans

AGENTS AU DOSSIER

Pour l’Opposante : Macera Jarzyna LLP

Pour la Requérante : Smart & Biggar LP

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