Contenu de la décision
Office de la propriété intellectuelle du Canada
LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE
Référence : 2025 COMC 31
Date de la décision : 2025-02-20
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Requérante : LODE Global Corporation
1,880,849 pour AGX COIN
Aperçu
[1] La présente décision concerne des oppositions aux demandes nos 1,880,841 et 1,880,849 pour les marques de commerce AGX et AGX COIN, respectivement, qui sont toutes deux au nom de LODE Global Corporation (la Reqérante), et sont en général visées par les demandes en liaison avec des services financiers relatifs aux devises numériques et à la fourniture de produits et de services auxiliaires facilitant ces services financiers. J’appelle ces marques de commerce collectivement les « Marques », sauf si elles font l’objet d’une discussion individuelle.
[2] AGF Management Limited (l’Opposante) s’est opposée à ces demandes principalement au motif que les Marques prêtent à confusion avec l’emploi et l’enregistrement antérieurs par l’Opposante de la marque de commerce AGF en liaison avec des services financiers, y compris la gestion de fonds d’investissement et de fonds mutuel de placement.
[3] Pour les raisons qui suivent, les deux demandes sont refusées.
Contexte
[4] Les Demandes sont fondées sur l’emploi projeté de la Marque au Canada en liaison avec les produits et services suivants (les Produits et Services) :
[traduction]
(1) Logiciel téléchargeable pour l’exécution d’opérations, la transmission, la réception, le stockage et l’envoi en ligne de devises numériques, de devises virtuelles, de cryptomonnaies, de jetons numériques et d’actifs numériques, pour la gestion de paiements et d’opérations de change mettant en cause des devises numériques, des devises virtuelles, des cryptomonnaies, des jetons numériques et des actifs numériques;
(1) Services financiers, nommément stockage et transfert de devises numériques, de devises virtuelles, de cryptomonnaies, de jetons numériques et d’actifs financiers numériques au moyen d’un portefeuille électronique; services financiers, nommément tenue d’un marché financier en ligne pour l’exécution d’opérations et la transmission de devises numériques, de devises virtuelles, de cryptomonnaies, de jetons numériques, de pièces de monnaie numériques et d’actifs financiers numériques; services d’opérations en ligne sur devises numériques, devises virtuelles, cryptomonnaies, jetons numériques, pièces de monnaie numériques et actifs financiers numériques;
(2) Transmission de données cryptographiques pour devises numériques, devises virtuelles, cryptomonnaie, jetons numériques, pièces de monnaie numériques et actifs numériques sur des réseaux de communication électronique; transmission électronique de données cryptographiques sur chaîne de blocs pour devises numériques, devises virtuelles, cryptomonnaie, jetons numériques, pièces de monnaie numériques et actifs numériques au moyen de terminaux informatiques et d’appareils électroniques;
Offre d’utilisation temporaire d’un logiciel en ligne non téléchargeable pour l’exécution d’opérations, la transmission, la réception, le stockage et l’envoi en ligne de devises numériques, de devises virtuelles, de cryptomonnaies, de jetons numériques et d’actifs numériques, pour la gestion de paiements et d’opérations de change mettant en cause des devises numériques, des devises virtuelles, des cryptomonnaies, des jetons numériques et des actifs numériques;
[5] Les deux demandes ont été produites le 1er février 2018 et annoncées aux fins d’opposition dans le Journal des marques de commerce le 6 juillet 2022. Le 14 décembre 2022, l’Opposante a produit des déclarations d’opposition en vertu de l’article 38 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, ch T-13 (la Loi). Les motifs d’opposition, qui sont les mêmes pour les deux procédures, concernent l’enregistrabilité en vertu de l’article 12(1)d), le droit à l’enregistrement en vertu des articles 16(1)a) et 16(1)(c), le caractère distinctif en vertu de l’article 2 et la non-conformité avec les articles 38(2)e) et 38(2)f) et l’allégation de mauvaise foi en vertu de l’article 38(2)a.1) de la Loi.
[6] La Requérante a produit des contre-déclarations niant les motifs d’opposition.
[7] Les deux parties ont produit une preuve et des observations écrites, et ont été représentées lors d’une audience.
Aperçu de la preuve
[8] Un bref aperçu de la preuve est énoncé ci-dessous. Des parties pertinentes de la preuve sont discutées de manière approfondie dans l’analyse des motifs d’opposition.
La preuve de l’Opposante
[9] L’Opposante a produit les affidavits d’Oriana Dalla Benetta (souscrit le 28 juin 2023), de Christina Fradsham (souscrit le 6 juin 2023), et d’Anne-José Villeneuve (souscrit le 21 juin 2023). Aucun des déposants n’a été contre-interrogé. Comme les affidavits produits dans chaque affaire sont essentiellement les mêmes, j’utiliserai le singulier pour faire référence à chacun de ces affidavits.
L’affidavit Benetta
[10] Mme Benetta est la vice-présidente de la marque et des services créatifs de l’Opposante. Elle explique que le « American Growth Fund » a été créé en 1957 et que, depuis au moins 1971, les services financiers exécutés par l’Opposante au Canada se sont étendus et englobent une variété de services financiers, y compris des services d’investissement financier, des services de conseil financier, des services de conseil en matière de valeurs mobilières, de marchandises et d’investissement, des conseils et des analyses en matière d’investissement, et des services de planification financière. Une liste complète de ces services est fournie au paragraphe 7 de l’affidavit Benetta et, le cas échéant, je les appellerai collectivement les [traduction] « Services financiers AGF », comme c’est le cas dans l’affidavit Benetta. Mme Benetta indique qu’en plus des Services financiers AGF, l’Opposante offre des services de parrainage financier et des services éducatifs, y compris des séminaires, des webinaires et des cours en rapport avec les Services financiers AGF. J’appellerai ces services les « Services éducatifs AGF », comme c’est le cas dans l’affidavit Benetta [au paragraphe 7]. L’Opposante offre les Services financiers et éducatifs AGF dans tout le Canada et dispose également d’équipes chargées des opérations d’investissement et du service à la clientèle sur le terrain en Amérique du Nord et en Europe. L’Opposante gère un actif total de plus de 41 000 000 000 $ et offre des services à plus de 800 000 investisseurs.
[11] Mme Benetta déclare qu’à partir de 1964 environ, l’Opposante a adopté la marque de commerce AGF en liaison avec les Services financiers AGF en tant que marque de commerce principale et image de marque au Canada. Depuis 1984, les principaux logos d’AGF arborent principalement la marque de commerce nominale AGF accompagnée de l’image d’un tigre, apposée au-dessus ou à côté, généralement dans les formats reproduits ci-dessous (la liste complète étant produite à l’annexe B de l’affidavit Benetta) :
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[12] Depuis son adoption il y a plus de 60 ans, l’Opposante a continuellement employé la marque de commerce AGF dans pratiquement toutes les annonces et sur tous les documents de correspondance distribués par l’Opposante dans le cadre de l’annonce ou de l’exécution de ses Services financiers AGF. Les pièces G, H et I contiennent des échantillons représentatifs de magazines, d’affiches, de documents promotionnels, de résumés à l’intention des investisseurs, de prospectus, de rapports annuels publiés et de documents d’entreprise montrant le recours aux Enregistrements AGF dans l’annonce et/ou l’exécution des Services financiers AGF.
[13] Outre les marques de commerce reproduits ci-dessus, l’Opposante a également employé et enregistré plusieurs autres marques de commerce qui mettent en évidence ou comportent clairement le terme AGF conjointement avec d’autres mots et éléments graphiques. Celles-ci sont répertoriées dans la pièce C de l’affidavit Benetta.
[14] J’appellerai les marques de commerce de l’Opposante répertoriées dans les pièces B et C de l’affidavit Benetta collectivement les [traduction] « Enregistrements AGF », comme le fait Mme Benetta dans son affidavit.
[15] De 1998 à 2021, les ventes canadiennes annuelles des Services financiers AGF par l’Opposante en liaison avec les Enregistrements AGF ont varié de plus de 1 000 000 000 CAD à plus de 6 000 000 000 CAD. Le paragraphe 29 de l’affidavit Benetta présente ces ventes sur une base annuelle.
[16] Mme Benetta estime qu’en 2022 seulement, l’Opposante a distribué aux investisseurs canadiens plus de 1 160 000 relevés individuels et correspondances portant la marque de commerce AGF ou l’un ou plusieurs des Enregistrements AGF restants. Entre 1984 et 2022, l’on estime que l’Opposante aurait distribué plus d’environ 1 147 774 828 relevés individuels ou correspondances portant un ou plusieurs des Enregistrements AGF aux investisseurs canadiens. Ces estimations excluent d’autres occasions où les acheteurs canadiens des Services financiers AGF auraient eu l’occasion de voir la marque de commerce AGF en visitant le site Web AGF agf.com, ou en regardant une ou plusieurs des Marques AGF dans des annonces télévisées, des films, des journaux, des magazines ou des annonces électroniques [Pièces L, J].
[17] Mme Benetta estime que, depuis 2000, l’Opposante a dépensé plus de 81 970 000 CAD pour la promotion des Services financiers AGF en liaison avec les Enregistrements AGF sur le marché canadien. Le paragraphe 31 de l’affidavit Benetta présente ces frais d’annonce sur une base annuelle.
L’affidavit Fradsham
[18] Mme Fradsham est une assistante juridique employée par l’agent de l’Opposante. Elle fournit les détails des enregistrements de marques de commerce invoqués par l’Opposante [Pièces A à MM].
L’affidavit Villeneuve
[19] Dre. Villeneuve est professeure agrégée au Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta et professeure associée au Département de linguistique. Dans le cadre de son travail universitaire, Dre. Villeneuve a fait des recherches et étudié la linguistique et la phonologie en français et en anglais.
[20] Dre. Villeneuve a été retenue par l’agent de l’Opposante pour fournir une opinion et un témoignage d’expert sur certains sujets relatifs aux marques de commerce AGF et AGX, notamment : la prononciation anglaise, française et bilingue (français/anglais) d’AGF et d’AGX; et la ressemblance phonétique, visuelle et conceptuelle d’AGF et d’AGX.
[21] L’Opposante a également produit des copies certifiées conformes de l’historique des dossiers des demandes.
La preuve de la Requérante
[22] Pour chaque procédure, la Requérante a produit l’affidavit de Ian Richard Toews (souscrit le 1er novembre 2023), un dirigeant de la Requérante et un cofondateur et président du projet LODE. M. Toews n’a pas été contre-interrogé sur son affidavit. Dans la mesure où les affidavits produits dans chaque affaire sont essentiellement les mêmes, à l’exception du fait qu’un affidavit fait référence à la marque de commerce AGX tandis que l’autre fait référence à AGX COIN, j’utiliserai le singulier pour désigner les affidavits.
[23] L’affidavit Toews fournit des renseignements sur l’origine et les objectifs de l’entreprise de la Requérante et des Marques. M. Toews explique que :
De septembre 2017 à ce jour, le mandat de la Requérante a été de développer un système de cryptomonnaie d’argent (la « Plateforme LODE ») qui remet en question les systèmes financiers et bancaires actuels afin de connecter les consommateurs généraux, les entreprises et les personnes sous-bancarisées à un système décentralisé qui répond mieux à leurs besoins. La plateforme LODE est un écosystème distribué organisé collectivement et composé de deux actifs cryptographiques, le LODE Token (le jeton de gouvernance) et l’AGX/AGX COIN (la cryptomonnaie stable), chacun représentant une relation unique avec les lingots d’argent physiques.
La plateforme LODE permet aux particuliers, aux entreprises et à la population sous-bancarisée d’accéder à un porte-monnaie numérique en ligne qui permet de traiter des transactions à faible coût en utilisant un moyen d’échange adossé à des actifs – AGX/AGX COIN.
Les AGX/AGX COIN sont des actifs stables conçus pour être envoyés, dépensés et échangés dans des portefeuilles numériques et sur des échanges décentralisés. Les AGX/AGX COIN sont garantis par de l’argent mis en voûte. Chaque AGX/AGX COIN est garanti par un gramme d’argent de qualité de 99,99 % en coffre-fort, audité et assuré. Pour chaque COIN AGX/AGX émis, on retrouve un gramme d’argent dans l’un des cinq coffres de la LODE situés au Canada, aux États-Unis et au Liechtenstein.
[24] Au 1er novembre 2023 (date à laquelle M. Toews a souscrit l’affidavit), la communauté LODE se compose de 14 757 membres actifs dans le monde entier. M. Toews estime que, depuis septembre 2017, la Requérante a investi environ 23 millions de dollars pour le développement de la plateforme LODE.
[25] Le total des chiffres de ventes brutes mondiales attribuées aux Produits et Services liés à la marque de commerce AGX/AGX COIN de 2019 à 2023 est de 1 900 000 $. Le paragraphe 21 de l’affidavit Toews présente ces chiffres d’affaires bruts sur une base annuelle pour la période pertinente.
[26] Le nombre total de détenteurs d’actifs numériques AGX/AGX COIN de 2019 à 2023 est de 4 346. Le paragraphe 22 de l’affidavit Toews indique le nombre de détenteurs d’actifs numériques sur une base annuelle pour la période pertinente.
[27] Les COIN AGX/AGX ont été vendus et transférés dans le portefeuille numérique LODE de 2019 à ce jour (novembre 2023) au Canada, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en France, en Australie, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Suède, en Belgique, en Nouvelle-Zélande, en Suisse, en Afrique du Sud et en Espagne.
[28] Actuellement, les AGX/AGX COIN sont vendus par le biais du LODE Wallet. Un LODE Wallet peut être ouvert à partir du site Web lode.com en cliquant sur l’onglet Register/Login (Enregistrement/Connexion) ou en se rendant sur le site Web lodewallet.com. La pièce H est décrite comme un guide étape par étape permettant d’ouvrir un LODE Wallet et d’acheter des LODE Tokens et des AGX/AGX COIN. Les AGX/AGX COIN peuvent également être achetés sur la bourse décentralisée « Trader Joe », l’explorateur de blocs « Snowtrace » et l’outil d’indexation décentralisé « Dex Tools » [Pièce I].
[29] M. Toews déclare que, depuis 2018, les Marques ont été constamment et largement employées dans des annonces et dans la commercialisation des Services de la Requérante par le biais de son site Web, de brochures de renseignements, de rapports d’évaluation et de diligence raisonnable et de plans d’affaires, au Canada et dans le monde entier. Des copies de captures d’écran du site Web agxpay.com, des brochures promotionnelles, un rapport d’évaluation et de diligence raisonnable, un plan d’affaires et des vidéos explicatives disponibles sur YouTube et sur le site Web de LODE, arborant tous la marque de commerce AGX ou AGX COIN, sont produits à titre de pièces [Pièces J à O].
[30] M. Toews explique que les Marques ont été dérivées en partie en se servant du symbole « Ag », qui est l’élément chimique de l’argent indiqué dans le tableau périodique des éléments. La Pièce D contient une copie d’un tableau périodique présentant l’élément chimique « Ag » sous le numéro atomique 47. M. Toews constate en outre que la lettre X est dérivée du mot « exchange » (échange).
[31] La Requérante est également la propriétaire de l’enregistrement de la marque de commerce No LMC1,083,711 pour la marque de commerce AGX 360 et Dessin.
Question préliminaire – Admissibilité de la preuve d’expert
[32] Parmi ses éléments de preuve, l’Opposante a produit l’affidavit d’Anne-José Villeneuve. Comme indiqué ci-dessus, Dre. Villeneuve fournit une preuve d’expert sur certains sujets relatifs aux marques de commerce AGF et AGX, notamment : la prononciation anglaise, française et bilingue (français/anglais) d’AGF et d’AGX; et la ressemblance phonétique, visuelle et conceptuelle d’AGF et d’AGX.
[33] Pour qu’une preuve d’expert soit admissible, elle doit répondre aux critères de la pertinence, de la nécessité d’aider le juge des faits, de l’absence de toute règle d’exclusion et de l’existence d’un expert suffisamment qualifié [R c Mohan, [1994] 2 SCR 9]. Bien que je considère Dre. Villeneuve comme une experte dûment qualifiée, je n’ai pas besoin de son témoignage pour m’aider à examiner la ressemblance entre les marques de commerce des parties et à déterminer si le consommateur occasionnel serait susceptible de les confondre, car je suis déjà en mesure de me faire ma propre opinion [Masterpiece Inc c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, 92 CPR (4th) 361 au para 92]. Par conséquent, l’affidavit Villeneuve n’est pas recevable.
[34] J’ajouterais que si j’ai tort de considérer cette preuve d’expert comme irrecevable, cela n’affecte pas ma conclusion générale sur la probabilité de confusion.
Fardeau ultime et fardeau de la preuve
[35] L’Opposante a le fardeau de preuve initial de produire une preuve admissible suffisante pour permettre de conclure raisonnablement à l’existence des faits allégués à l’appui de chaque motif d’opposition. Une fois que l’Opposante s’est acquittée de ce fardeau de preuve initial, la Requérante doit s’acquitter du fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que les motifs d’opposition en question ne devraient pas faire obstacle à l’enregistrement de la Marque [John Labatt Ltd c Molson Companies Ltd, 1990 CanLII 11059, 30 CPR (3 d) 293 (CF 1re inst); Dion Neckwear Ltd c Christian Dior, SA et al, 2002 CAF 29, 20 CPR (4 th) 155]. Cela signifie que, s’il est impossible d’arriver à une conclusion définitive en faveur de la Requérante après avoir examiné l’ensemble de la preuve, le litige doit être tranché à l’encontre de la Requérante.
Analyse des motifs d’opposition
Motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d)
[36] La date pertinente pour ce motif d’opposition est la date de ma décision [Park Avenue Furniture Corporation c Wickes/Simmons Bedding Ltd, 1991 CanLII 11769, 37 CPR (3d) 413 (CAF)].
[37] L’Opposante a plaidé que les Marques ne sont pas enregistrables puisque, contrairement à l’article 12(1)d) de la Loi, les Marques créent de la confusion avec les marques de commerce déposées de l’Opposante, y compris les marques de commerce suivantes énumérées à l’annexe A de la déclaration d’opposition. Les détails de ces enregistrements sont établis à l’annexe A de cette décision.
1.
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AGF
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LMC185086
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2.
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LMC349,787
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3.
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LMC570443
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4.
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AGF
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LMC609303
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5.
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LMC581062
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6
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LMC620419
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7.
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LMC1080227
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8
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LMC1081008
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9.
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LMC1092465
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[38] L’opposante a également plaidé que les Marques créent une confusion avec plusieurs autres marques de commerce enregistrées qui comprennent l’élément AGF et qui sont énumérées dans les Annexes B et C de la déclaration d’opposition.
[39] J’ai exercé mon pouvoir discrétionnaire pour consulter le registre et confirmer que ces enregistrements existent toujours [Quaker Oats Co Ltd of Canada c Menu Foods Ltd (1986), 11 CPR (3d) 410 (COMC)]. L’Opposante s’est donc acquittée de son fardeau de preuve initial à l’égard de ce motif d’opposition. Par conséquent, la Requérante a le fardeau ultime de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a aucune probabilité de confusion entre les Marques et l’une des marques de commerce déposées de l’Opposante.
[40] Dans l’évaluation de la question de confusion, je me concentrerai sur les enregistrements de l’Opposante pour la marque de commerce nominale AGF, puisque, à mon avis, elle représente le meilleur argument de l’Opposante. Cela dit, je considère également que l’emploi des marques de commerce mixtes énumérées dans le tableau ci-dessus (identifiées sous les numéros 2, 3 et 5 à 9) constitue un emploi de la marque nominale AGF puisque AGF se distingue des autres éléments de ces marques mixtes [voir Nightingale Interloc Ltd c Prodesign Ltd (1984), 2 CPR (3d) 535 p. 538-539].
[41] Si le motif de l’Opposante n’est pas accueilli sur la base de sa marque de commerce nominale AGF, alors il ne sera également accueilli sur la base d’aucune autre de ses marques de commerce identifiées dans la déclaration d’opposition puisque les Marques visées par la demande possèdent un plus grand degré de ressemblance par rapport à la marque de commerce nominale AGF.
Test en matière de confusion
[42] En déterminant si deux marques de commerce créent de la confusion, toutes les circonstances de l’espèce doivent être considérées, y compris celles énoncées à l’article 6(5) de la Loi : le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues; la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage; le genre de produits, services ou entreprises; la nature du commerce; et le degré de ressemblance entre les marques de commerce, y compris dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent. La liste de ces critères n’est pas exhaustive et un poids différent sera accordé à chacun selon le contexte [Mattel, Inc c 3894207 Canada Inc, 2006 CSC 22, 1 RCS 772 au para 54; Veuve Clicquot Ponsardin c Boutiques Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, 49 CPR (4th) 401]. Je renvoie également à Masterpiece, supra, au para 49, où la Cour suprême du Canada déclare que le facteur énoncé à l’article 6(5)e), notamment la ressemblance entre les marques de commerce, est souvent celui qui revêt le plus d’importance dans l’analyse relative à la confusion.
[43] Le test en matière de confusion est évalué comme une question de la première impression dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé à la vue de la marque de commerce du requérant, alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce de l’opposant et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques [Veuve Clicquot, supra, au para 20].
Caractère distinctif inhérent des marques de commerce et mesure dans laquelle elles sont devenues connues
[44] Des marques de commerce composées d’une combinaison de lettres manquent généralement de caractère distinctif inhérent et sont considérées comme des marques faibles [GSW Ltd c Great West Steel Industries Ltd (1975), 22 CPR (2d) 154 (CF 1re inst)]. Par conséquent, la marque de commerce AGF de l’Opposante et la marque de commerce AGX de la Requérante ne sont pas intrinsèquement fortes. En ce qui concerne la marque de commerce AGX COIN de la Requérante, je ne considère pas que l’inclusion du mot « coin » augmente le caractère distinctif inhérent global de cette marque de commerce étant donné sa signification descriptive par rapport à bon nombre de Produits et Services visés par la demande. À cet égard, je note que le dictionnaire en ligne Merriam-Webster comprend une définition de la pièce de monnaie comme « une unité de cryptomonnaie » [voir Tradall SA c Devil’s Martini Inc, 2011 COMC 65 concernant que le registraire peut prendre connaissance d’office des définitions du dictionnaire].
[45] En ce qui a trait à la mesure dans laquelle les marques de commerce des parties sont devenues connues, cet élément favorise l’Opposante de manière significative compte tenu de l’emploi de longue date et répandu de la marque de commerce AGF au Canada. En particulier, l’affidavit Benetta démontre que l’Opposante a une base importante au Canada et, depuis l’adoption de la marque de commerce AGF en liaison avec les Services financiers AGF comme sa principale marque de commerce et marque de produits au Canada il y a plus de 60 ans, a continuellement employé la marque de commerce AGF sur pratiquement toutes les annonces et tous les documents de correspondance distribués par l’Opposante dans le cadre de l’annonce ou de l’exécution des Services financiers AGF. Depuis l’an 2000, plus de 81 970 000 $ ont été dépensés par l’Opposante pour la promotion des Services financiers AGF en liaison avec les Enregistrements AGF sur le marché canadien.
[46] En revanche, la preuve de l’emploi des Marques par la Requérante – et de la mesure dans laquelle elles sont devenues connues au Canada – est limitée. L’affidavit Toews suggère que la Requérante a commencé à offrir les Produits et Services en liaison avec les Marques en 2019. Les chiffres d’affaires annuels mondiaux de 2019 à 2023 sont fournis, mais il n’y a pas d’indication du montant attribuable aux consommateurs canadiens. De même, même si le nombre total de détenteurs d’actifs numériques AGX/AGX COIN à l’échelle mondiale pour la même période est fourni, il n’y a aucune indication du nombre de détenteurs d’actifs numériques au Canada. En outre, bien que la Requérante a investi environ 23 millions de dollars dans le développement de la plateforme LODE, il n’y a pas de ventilation de ce chiffre expliquant la proportion consacrée au développement, à la promotion ou à l’annonce des Produits/Services en liaison avec les Marques au Canada. Avec tout cela, il est difficile d’évaluer à quel point les Marques sont connues au Canada.
[47] Dans l’ensemble, je conclus que ce facteur, lequel est une combinaison de caractère distinctif inhérent et acquis, favorise l’Opposante.
Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage
[48] L’affidavit Benetta indique que la marque de commerce AGF est employée comme marque principale de l’Opposante au Canada depuis 1964. Les demandes d’enregistrement des Marques sont fondées sur l’emploi projeté, et les preuves fournies par la Requérante indiquent que l’emploi des Marques a commencé en 2019. Par conséquent, ce facteur favorise également l’Opposante.
Genre des produits, services ou entreprises; et nature du commerce
[49] Les enregistrements AGF de l’Opposante couvrent généralement les services financiers, y compris la gestion de fonds mutuels et d’investissements, les services de planification financière, le conseil et l’analyse en matière d’investissement.
[50] Les Produits et Services visés par la demande couvrent généralement les services financiers relatifs aux devises numériques, aux devises virtuelles, aux cryptomonnaies, aux jetons numériques et aux actifs numériques financiers, y compris leur stockage et leur transfert au moyen d’un portefeuille électronique; la conduite d’une bourse financière en ligne pour l’échange et la transmission de ces devises et actifs; et l’échange en ligne de ces devises et de ces actifs. Ils comprennent également la fourniture de biens et services auxiliaires facilitant ces services financiers, tels que des logiciels téléchargeables, la transmission de données cryptographiques pour ces devises et actifs via des réseaux de communication électronique, et la transmission électronique de données cryptographiques via la blockchain pour ces devises et actifs via des terminaux informatiques et des appareils électroniques.
[51] Dans ses observations écrites, la Requérante fait valoir que les Produits et Services [traduction] « ne sont pas des instruments financiers traditionnels (c’est-à-dire que l’achat, la vente, l’envoi, la réception et le stockage d’actifs numériques et de cryptomonnaies sont différents des instruments financiers traditionnels tels que les fonds mutuels, les actions et les obligations) et qu’il faut des connaissances et une compréhension spécialisées pour l’achat, la vente, l’envoi, la réception et le stockage en toute sécurité des actifs en cryptomonnaies dans les portefeuilles numériques » [Observations de la Requérante au paragraphe 5(c)]. Lors de l’audience, la Requérante a également décrit les actifs AGX comme étant davantage une autre forme d’argent liquide ou de paiement, par opposition à un moyen d’investissement comme un fonds mutuel.
[52] De son côté, l’Opposante fait valoir que les Produits et Services de la Requérante comprennent [traduction] « des types de cryptomonnaies qui, par exemple, seraient analogues à des types de produits négociés en bourse de bitcoin vendus à des investisseurs », et que [traduction] « les propres preuves de la Requérante montrent qu’elle commercialise ses produits et services en tant que “monnaie d’argent” et à des personnes agissant en tant qu’investisseurs cherchant à sécuriser leur avenir financier » [Observations de l’Opposante à la page 30], avec pour résultat qu’il y a un chevauchement étroit ou direct avec les Services financiers de l’Opposante.
[53] À mon avis, il existe au moins un chevauchement significatif entre les produits et services respectifs des parties dans la mesure où les deux parties opèrent dans la sphère financière et offrent des services financiers, bien que, comme l’a noté la Requérante, ses Produits et Services ne sont pas des instruments financiers [traduction] « traditionnels », mais reflètent plutôt les nouvelles avancées technologiques (chaine de blocs). En outre, puisque la Requérante pourrait chercher à établir que les Produits et Services AGX/AGX COIN sont une autre forme d’argent liquide ou de paiement, je suis d’accord avec l’observation de l’Opposante selon laquelle la preuve de la Requérante suggère effectivement que les Produits et Services AGX/AGX COIN vont au-delà et sont également considérés et commercialisés comme de la [traduction] « monnaie d’argent » attirant ceux qui cherchent, dans une perspective d’investissement, à sécuriser leur avenir financier et accroître la richesse. À cet égard, je note les extraits suivants de l’affidavit et des pièces à conviction de Toews :
[traduction]
- AGX est une monnaie d’argent moderne conçue avec vous à l’esprit pour vous donner la liberté de construire votre richesse comme vous l’entendez. Avec AGX, vous serez libre d’envoyer, de dépenser et de vous enrichir avec de l’argent numérique sans frontières. Ne faites plus d’économies. Libérez-vous [...] « [Pièce J – captures d’écran téléchargées du site Web agxpay.com].
- En termes de sécurité financière, les AGX Coins sont ajustés à l’inflation et à la déflation, et leur prix est stable par rapport au prix du marché de l’argent. En conséquence, les détenteurs de AGX Coins peuvent créer des rendements en spéculant sur les hausses et les baisses futures du prix de l’argent. » [Pièce M – copie de l’évaluation de l’investisseur et du rapport de diligence raisonnable fourni aux investisseurs au Canada, page 17].
- AGX Coins – Neuf cas d’utilisation : [Pièce M, page 32]
3) Crypto-Traders - Les gestionnaires de fonds de devises cryptographiques et d’actifs blockchain peuvent se positionner sur les AGX Coins comme moyen de stabiliser et de diversifier leurs portefeuilles, d’isoler les profits ou de se couvrir contre la volatilité [...]
7) Investisseurs en argent – Les fonds négociés en bourse (FNB) peuvent découvrir que les positions en AGX Coin offrent une meilleure sécurité et une plus grande flexibilité que les fonds négociés en bourse, qui doivent être administrés par diverses contreparties [...]
8) Investisseurs en lingots – Les [investisseurs] en lingots d’argent peuvent échanger leurs pièces et barres physiques contre des AGX Coins et exploiter leur pouvoir d’achat auprès des commerçants et détaillants favorables à AGX qui recherchent un règlement solide en argent. En outre, les AGX Coins peuvent être déposés auprès d’un opérateur d’échange de cryptomonnaies et convertis en d’autres actifs numériques tels que le bitcoin, et permettent aux « empileurs » d’argent de se positionner de manière transparente dans l’espace d’investissement cryptographique.
[54] Par conséquent, ce facteur favorise l’Opposante.
[55] En ce qui concerne les voies de commercialisation, dans ses déclarations écrites, la Requérante fait valoir que le flux de vente, l’achat et la déclaration des services financiers de l’Opposante, tels que les fonds mutuels, les actions ou les obligations, sont différents [paragraphe 5(g)]. La Requérante explique notamment que [traduction] « la vente de fonds mutuels, d’actions et d’obligations se fait généralement par l’intermédiaire d’un représentant commercial qui conseille le consommateur sur les mérites et les performances du fonds et sur les risques qui y sont associés [...] ». La Requérante souligne qu’en revanche, [traduction] « un utilisateur souhaitant acheter des Produits et Services AGX/AGX COIN devrait d’abord visiter et effectuer des recherches sur le site Web de la Requérante à « lode.one » et ensuite télécharger un portefeuille à « lodewallet.com » [...] Une fois le portefeuille téléchargé, l’utilisateur peut acheter l’actif numérique par l’intermédiaire du portefeuille de la LODE. Par ailleurs, si l’utilisateur dispose déjà d’un portefeuille de cryptomonnaies, il peut acheter les actifs numériques AGX/AGX COIN par l’intermédiaire de la bourse d’échange décentralisée Trader Joe « [Observations de la Requérante aux paragraphes 36 et 38].
[56] Pour sa part, l’Opposante fait valoir que les voies de commercialisation des Produits et Services de la Requérante et des services de l’Opposante sont identiques [Observations écrites de l’Opposante au paragraphe 9.2]. Lors de l’audience, l’Opposante a également noté que les déclarations de la Requérante concernant la nature du commerce pour les services de l’Opposante, par exemple, la manière dont les ventes de fonds mutuels sont habituellement effectuées, ne figurent pas dans les éléments de preuve du dossier.
[57] Lorsqu’on examine la nature du commerce des parties, alors que la preuve de la nature véritable du commerce des parties peut être utile, c’est en fin de compte l’état déclaratif des Produits et Services dans les demandes de la Requérante et les enregistrements de l’Opposant qui régit l’évaluation de la probabilité de confusion en vertu de l’article 12(1)d) de la Loi [Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien c Super Dragon Import Export Inc (1986), 12 CPR (3d) 110 (CAF); Mr Submarine Ltd c Amandista Investments Ltd, 1987 CanLII 8953 (CAF), 19 CPR (3d) 3 (CAF)]. Dans ce contexte, bien que les services financiers de la Requérante intègrent déjà les progrès de la technologie, il ne semble pas y avoir de restrictions dans l’état déclaratif des produits et services contenus dans les enregistrements de l’Opposante qui pourraient empêcher l’Opposante de mettre en œuvre ou d’incorporer des technologies similaires dans la fourniture de ses services financiers.
[58] La Requérante fait également valoir que le consommateur cible par chaque partie est différent et très sophistiqué, ce qui réduit la probabilité de confusion [paragraphes 40 à 44 des observations écrites de la Requérante]. Cependant, les preuves indiquent qu’il y a au moins un certain chevauchement dans les clients visés par les parties en ce sens qu’elles s’adressent toutes deux à des particuliers et à des investisseurs [voir l’affidavit Benetta au paragraphe 8 et l’affidavit Toews aux paragraphes 12, 29 à 31 et les Pièces L, M, N].
[59] En ce qui concerne le niveau de sophistication des consommateurs cibles, on peut se demander si une expertise ou des connaissances spécialisées sont nécessaires pour utiliser les Produits et Services AGX/AGX COIN de la Requérante, étant donné que la preuve de la Requérante les décrit comme une option [traduction] « peu importe qui vous êtes, où vous vivez, ce que vous gagnez » et [traduction] « simple et tellement facile à utiliser » [Pièce J, affidavit Toews]. Indépendamment de cela, même en supposant que les consommateurs visés par les parties soient avertis, le test en matière de confusion est celui de la première impression et toute démarche subséquente prise par les consommateurs sophistiqués dans une tentative de corriger tout cas potentiel de confusion lorsqu’ils font preuve de patience et de diligence raisonnable dans leur décision d’achat n’a aucune pertinence [par analogie, voir les paragraphes 68 à 74 de Masterpiece, supra].
[60] Par conséquent, compte tenu du chevauchement potentiel des voies de commercialisation des parties, j’estime que, dans le meilleur des cas pour la Requérante, ce facteur est neutre.
Degré de ressemblance
[61] Comme mentionné ci‑dessus, le degré de ressemblance entre les marques de commerce des parties constitue le critère réglementaire qui a souvent la plus grande incidence sur la décision concernant la confusion.
[62] Lorsqu’il s’agit de déterminer le degré de ressemblance, les marques de commerce doivent être considérées dans leur intégralité. Le test applicable n’est pas une comparaison côte à côte, mais celui de la première impression dans l’esprit du consommateur qui n’a qu’un vague souvenir de la marque de commerce d’un opposant [Veuve Clicquot, supra, au para 20].
[63] Dans Masterpiece, supra, la Cour a observé que même si le premier mot (ou la première syllabe) d’une marque de commerce peut, aux fins de caractère distinctif, être souvent celui qui revêt le plus d’importance [Conde Nast Publications Inc c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183 (CF 1re inst)], une approche préférable est de déterminer d’abord s’il y a un aspect de la marque de commerce qui est particulièrement frappant ou unique.
[64] La marque de commerce AGF de l’Opposante et la Marque AGX de la Requérante consistent toutes deux en des combinaisons de trois lettres. À mon avis, aucune des marques de commerce ne possède un aspect particulièrement frappant ou unique.
[65] Si l’on considère les deux marques de commerce dans leur ensemble, en termes de présentation et de son, j’estime que leurs similitudes l’emportent sur leurs différences. Elles ont en commun les deux premières lettres, et la présence d’un F ou d’un X comme dernière lettre n’entraîne pas une différence significative en termes de présentation ou de son.
[66] En ce qui concerne les idées suggérées, la marque de commerce AGF de l’Opposante semble être un acronyme pour « Advanced Growth Fund », tandis que la marque AGX de la Requérante est dérivée de l’élément chimique de l’argent (AG) du tableau périodique des éléments, et la lettre « X » est dérivée du mot « exchange » (échange). Toutefois, la preuve n’établit pas que les consommateurs reconnaîtraient les significations sous-jacentes attribuables à chaque marque de commerce. À mon avis, malgré le fait que AGF serait un acronyme à l’origine et que certains consommateurs pourraient en être conscients, la marque de commerce AGF serait tout aussi probablement, sinon plus, perçue à première vue comme une marque inventée qui ne véhicule pas d’idée particulière. Également, je suis d’avis que la Marque de la Requérante serait, à première vue, plus susceptible d’être considérée comme une marque inventée qui ne véhicule aucune idée particulière plutôt que de véhiculer l’idée précise de la combinaison de l’élément chimique « AG » et « exchange ». Par conséquent, aucune idée particulière n’est suggérée par les marques de commerce elles-mêmes, à l’exception des trois lettres qui constituent chaque marque de commerce.
[67] En ce qui concerne le degré de ressemblance entre la marque de commerce AGF de l’Opposante et la Marque AGX COIN de la Requérante, bien qu’il existe encore une certaine ressemblance entre cette marque de commerce et la Marque AGF de l’Opposante en raison de la ressemblance de leurs premiers éléments, le degré de ressemblance est globalement plus faible en raison de la présence de l’élément COIN de cette Marque.
[68] Néanmoins, dans l’ensemble, ce facteur important favorise l’Opposante en ce qui concerne les deux Marques.
Circonstances de l’espèce – la renommée de la marque de commerce AGF et la famille de marques AGF de l’Opposante
[69] L’Opposante fait valoir que la marque de commerce AGF est très bien connue, voire célèbre, en liaison avec les services financiers qu’elle propose. L’Opposante fait également valoir qu’elle possède et emploie une famille de marques de commerce AGF en liaison avec des services financiers.
[70] Je considère que la preuve de l’Opposante permet de conclure que la marque de commerce AGF est très bien connue au Canada en liaison avec les services financiers de l’Opposante. Je considère également que la preuve de l’Opposante démontre l’emploi de plus de deux de ses marques de commerce qui comprennent l’élément AGF (par exemple, LMC 609,303; LMC 620,419; LMC 1,092,465; LMC 620,292; LMC 1,080,233), et en ce sens on pourrait considérer qu’elle a démontré l’existence d’une famille de marques de commerce.
[71] Par conséquent, ces circonstances de l’espèce sont effectivement favorables à l’Opposante. Cela étant dit, en ce qui concerne la renommée de la marque de commerce AGF de l’Opposante, je note que cela a déjà été largement pris en compte dans mon évaluation du facteur énoncé à l’article 6(5)a).
Circonstance de l’espèce – état du registre et du marché
[72] La Requérante fait valoir qu’il existe des dizaines d’acronymes employés dans le secteur financier qui coexistent dans le Registre canadien des marques et sur le marché canadien, de sorte que l’on peut présumer que les consommateurs sont [traduction] « plus sensibles aux différences entre les lettres qui composent les services financiers et capables de faire des distinctions subtiles » [Observations écrites de la Requérante, paragraphe 45(e)]. Cependant, la Requérante n’a pas produit l’état du registre ou des preuves de marché à l’appui de sa demande. En l’absence d’une telle preuve, je n’estime pas qu’il s’agit d’une circonstance de l’espèce qui favorise la Requérante.
Circonstances de l’espèce – Absence de confusion réelle
[73] Dans ses observations écrites [au paragraphe 13.2], l’Opposante fait valoir que la Requérante n’a fourni aucun élément de preuves qui montre que les Marques de la Requérante ont été employées dans une mesure substantielle sur le marché canadien, ce qui aurait permis de démontrer qu’il n’y a pas eu de confusion réelle, alors qu’au contraire, elle a fourni des preuves incontestables de son emploi et de sa promotion de longue date et répandus de la marque de commerce AGF.
[74] Une absence de preuve de confusion réelle sur une certaine période peut permettre au registraire de tirer une conclusion défavorable concernant la probabilité de confusion. Néanmoins, l’Opposante n’a aucune obligation de soumettre des preuves de cas de confusion réelle. En outre, l’absence d’une telle preuve ne soulève pas nécessairement des présomptions défavorables à l’Opposante, car il incombe à la Requérante de démontrer l’absence d’une probabilité de confusion.
[75] À mon avis, la preuve fournie par la Requérante n’est pas suffisante pour déterminer si un emploi concurrent a été étendu, de sorte que je ne suis pas disposé à considérer l’absence de preuve en cas de confusion réelle comme une circonstance significative de l’espèce.
Circonstances de l’espèce – enregistrement de AGX 360 & Dessin par la Requérante
[76] Outre les Marques visées par la demande, la Requérante est titulaire d’un enregistrement (No LMC1,083,711) pour la marque de commerce AGX 360 & Dessin. Cependant, l’existence d’un enregistrement antérieur appartenant à une partie ne donne pas automatiquement le droit à cette partie d’enregistrer une marque de commerce similaire [voir Groupe Lavo Inc c Proctor & Gamble Inc (1990), 32 CPR (3d) 533 (COMC) au para 15]. En outre, cet enregistrement semble couvrir différents services, et la Requérante n’a démontré aucun emploi de cette marque de commerce. Par conséquent, cela ne constitue pas une circonstance de l’espèce favorable à la Requérante.
Conclusion concernant le motif fondé sur l’article 12(1)d)
[77] En ce qui concerne la marque AGX visée par la demande, après avoir examiné toutes les circonstances environnantes, y compris le degré élevé de ressemblance entre les marques de commerce des parties, l’usage de longue date et répandu ainsi que la mesure dans laquelle la marque de commerce AGF de l’Opposante a été connue, et le chevauchement du ans la nature des produits et services des parties, j’estime que la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’y a pas de probabilité raisonnable de confusion entre la marque de commerce AGX visée par la demande et la marque de commerce AGF de l’Opposante.
[78] En ce qui concerne la marque AGX visée par la demande COIN, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, y compris un certain degré de ressemblance entre les marques des parties, l’emploi de longue date et répandu ainsi que la mesure dans laquelle la marque de commerce AGF de l’Opposante a été connue, et le chevauchement dans la nature des produits et services des parties, j’estime que la probabilité de confusion est, au mieux pour le Requérant, bien équilibrée entre une conclusion de confusion et l’absence de confusion. Puisque le fardeau de démontrer, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’existe pas de probabilité raisonnable de confusion entre les marques de commerce incombe à la Requérante, je dois donc trancher à l’encontre de la Requérante.
[79] Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d) est accueilli.
Motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a)
[80] La date pertinente pour un motif d’opposition en vertu de l’article 16(1)a) de la Loi est la date de la production des demandes, à savoir le 1er février 2018. L’Opposante s’est acquittée de son fardeau initial au moyen de sa preuve qui démontre l’emploi de la marque de commerce AGF, comme discuté ci-dessus, bien avant la date pertinente.
[81] À mon avis, la date pertinente antérieure pour ce motif d’opposition ne modifie pas de façon significative l’analyse effectuée relative à la confusion pour le motif d’opposition fondé sur l’article 12(1)d). Par conséquent, la Requérante ne s’est pas acquittée de son fardeau ultime visant à démontrer l’absence de probabilité de confusion à la date pertinente en vertu du motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a). Par conséquent, le motif d’opposition fondé sur l’article 16(1)a) est également accueilli pour les deux Marques.
Autres motifs d’opposition
[82] Puisque deux motifs d’opposition de l’Opposante ont déjà été accueillis, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres motifs d’opposition.
Décision
[83] Compte tenu de ce qui précède et dans l’exercice des pouvoirs qui m’ont été délégués en vertu des dispositions de l’article 63(3) de la Loi, je rejette les deux demandes d’enregistrement No. 1,880,841 et 1,880,849 selon les dispositions de l’article 38(12) de la Loi.
Jennifer Galeano
Membre
Commission des oppositions des marques de commerce
Office de la propriété intellectuelle du Canada
Traduction certifiée conforme
Meriem Ramdani
FélixTagne Djom
Annexe A
Les enregistrements de l’Opposante inclus à l’annexe A de la déclaration d’opposition
Marque de commerce
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Produits/services
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AGF
LMC185,086
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[traduction]
(1) Fourniture de services financiers, nommément la gestion de fonds mutuels et la vente et la distribution d’actions de fonds mutuels.
(2) Vente d’assurance-vie.
(3) Fourniture de services fiscaux ainsi que la préparation et le dépôt des déclarations d’impôt sur le revenu.
|
LMC349,787
|
[traduction]
(1) Services de gestion et de consultation pertinents aux finances et aux placements comprenant la création, la promotion, la distribution et la gestion de fonds mutuels et gestion de portefeuilles de placements.
(2) Services de fiducie et services de prêt.
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LMC570,443
|
[traduction]
(1) Fourniture de services financiers, nommément gestion de fonds mutuels, vente et distribution de fonds mutuels et actions de fonds mutuels; services de gestion de placements et de consultation; financement, promotion, distribution et gestion d’investissements de portefeuille; services de planification financière; services de sociétés de fiducie; services de prêt, d’hypothèque et services de sociétés de prêt; acceptation de dépôts, de retraits et d’emprunt de fonds; et investissement de dépôts.
|
AGF
LMC609,303
|
[traduction]
(1) Services financiers, nommément services de courtage de valeurs, agence de courtage dans le domaine des obligations et des titres négociables; services de courtage d’actions, services de cabinet de courtage, services consultatifs en matière de valeurs, de marchandises et d’investissements, services de souscription, nommément souscription de valeurs; services de négociation et de courtage de valeurs, d’obligations, d’obligations non garanties et d’actions, services d’agence des transferts; conseils et analyses en matière d’investissement; vente et distribution d’actions de fonds mutuel; services de gestion et de consultation en matière de placements; fondation, promotion, distribution et gestion de portefeuilles de placement; services de planification financière; acceptation de dépôts, retraits et emprunt de fonds, placement de dépôts pour le compte de personnes; placement de dépôts pour le compte d’institutions; services de prêt, nommément services de société de fiducie; services de société d’hypothèque et de prêt.
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LMC 581,062
|
[traduction]
(1) Services d’investissement, nommément gestion d’investissement de fonds mutuels de tiers; services de courtier de valeurs mobilières; agence de valeurs mobilière dans les domaines des obligations et des instruments négociables; services de courtage d’actions; maison de courtage dans les domaines des actions, des marchandises et des contrats à terme; services de recherches et de conseils ayant trait aux valeurs mobilières, aux actions, aux obligations, aux marchandises et autres instruments; souscription, distribution et commerce de valeurs mobilières; commerce et négociation d’obligations et d’actions; services d’agence de transferts fournis aux émetteurs de placement de valeurs mobilières; fourniture de conseils en investissement.
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LMC 620,419
|
[traduction]
(1) Services de maison de courtage de valeurs; agence en valeurs dans le domaine des obligations et des titres négociables; services de courtage d’actions; services de courtage; services de maison de courtage; valeurs, services consultatifs en matière de produits de base et d’investissements; services de souscription, y compris, souscription de valeurs; services d’opérations et de courtier de valeurs, d’obligations, de débentures et d’actions; services d’agence de transferts; conseils et analyse en matière d’investissement; vente et distribution d’actions de fonds mutuels; élaboration, promotion, distribution et gestion de portefeuilles de placement; investissement de dépôts; services de planification financière; acceptation de dépôts, retraits et emprunts de fonds; services de prêt; services de société de fiducie; services de gestion et de consultation en matière de placements; services de sociétés d’hypothèque et de prêt; services éducatifs dans le domaine de l’économie; planification financière et stratégies d’investissement; services éducatifs, nommément tenue de classes, de conférences et d’ateliers dans le domaine de la planification d’investissements, planification de la retraite, stratégies d’investissement et stratégies de planification financière; tenue de séminaires dans le domaine de la planification successorale et de la retraite; services consultatifs et de planification d’investissements financiers et de retraite.
(2) Parrainage financier de manifestations culturelles pour des tiers; parrainage financier et promotion de festivals cinématographiques pour des tiers; services de divertissement, nommément parrainage de festivals cinématographiques et de représentations musicales en direct; services d’organisme de bienfaisance en rapport avec la collecte de fonds, parrainage en rapport avec la collecte de fonds; parrainage d’activités de recherche et d’éducation ayant trait à la préservation des espèces animales en voie d’extinction.
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LMC1,080,227
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[traduction]
(1) Services financiers et de placement, nommément gestion de placements, gestion de portefeuilles, gestion de patrimoine, nommément planification financière et gestion de portefeuilles, gestion d’actifs, vente et gestion de fonds communs de placement, vente et gestion de fonds négociés en bourse, vente et gestion de caisses communes, vente et gestion de fonds distincts, gestion discrétionnaire de placements, gestion de placements de clients privés, conseils en placement, gestion de placements institutionnels, courtage de fonds communs de placement, services de courtier en valeurs mobilières; services d’agence de transfert de fonds communs de placement et de caisses communes; services de planification des placements pour la retraite ainsi que conseils connexes; information et recherche sur les placements boursiers dans les domaines de la planification financière et des placements financiers; services de planification financière; conseils en placement et analyse de placements; services financiers, nommément développement, vente et gestion de fonds de remplacement; placements financiers dans les domaines de l’infrastructure, de l’immobilier et des capitaux propres; placement de fonds pour des tiers; consultation en placement de fonds; services de consultation et de conseil financiers, nommément services d’analyse et de recherche financières; commandite financière d’évènements culturels pour des tiers, nommément de pièces de théâtre, de films, de prestations de musique et de spectacles de danse, de festivals de théâtre, de films, de musique et de danse, ainsi que d’expositions d’œuvres d’art et de musée; commandite financière de festivals de films pour des tiers; services d’organisme de bienfaisance ayant trait à la collecte de fonds, commandite ayant trait à la collecte de fonds; commandite de programmes éducatifs dans le domaine des affaires; commandite financière de recherche médicale.
(2) Services éducatifs dans les domaines de l’économie, de la planification financière et des stratégies de placement; services éducatifs, nommément tenue de cours, de conférences et d’ateliers dans les domaines de la planification de placements, de la planification de la retraite, des stratégies de placement et des stratégies de planification financière; tenue de séminaires dans le domaine de planification successorale et de la retraite.
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LMC1,081,008
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[traduction]
(1) Services financiers et de placement, nommément gestion de placements, gestion de portefeuilles, gestion de patrimoine, nommément planification financière et gestion de portefeuilles, gestion d’actifs, vente et gestion de fonds communs de placement, vente et gestion de fonds négociés en bourse, vente et gestion de caisses communes, vente et gestion de fonds distincts, gestion discrétionnaire de placements, gestion de placements de clients privés, conseils en placement, gestion de placements institutionnels, courtage de fonds communs de placement, services de courtier en valeurs mobilières; services d’agence de transfert de fonds communs de placement et de caisses communes; services de planification des placements pour la retraite ainsi que conseils connexes; information et recherche sur les placements boursiers dans les domaines de la planification financière et des placements financiers; services de planification financière; conseils en placement et analyse de placements; services financiers, nommément développement, vente et gestion de fonds de remplacement; placements financiers dans les domaines de l’infrastructure, de l’immobilier et des capitaux propres; placement de fonds pour des tiers; consultation en placement de fonds; services de consultation et de conseil financiers, nommément services d’analyse et de recherche financières; commandite financière d’évènements culturels pour des tiers, nommément de pièces de théâtre, de films, de prestations de musique et de spectacles de danse, de festivals de théâtre, de films, de musique et de danse, ainsi que d’expositions d’œuvres d’art et de musée; commandite financière de festivals de films pour des tiers; services d’organisme de bienfaisance ayant trait à la collecte de fonds, commandite ayant trait à la collecte de fonds; commandite de programmes éducatifs dans le domaine des affaires; commandite financière de recherche médicale.
(2) Services éducatifs dans les domaines de l’économie, de la planification financière et des stratégies de placement; services éducatifs, nommément tenue de cours, de conférences et d’ateliers dans les domaines de la planification de placements, de la planification de la retraite, des stratégies de placement et des stratégies de planification financière; tenue de séminaires dans le domaine de planification successorale et de la retraite.
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LMC 1,092,465
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[traduction]
(1) Services financiers et de placement, nommément gestion de placements, gestion de portefeuilles, gestion de patrimoine, nommément planification financière et gestion de portefeuilles, gestion d’actifs, vente et gestion de fonds communs de placement, vente et gestion de fonds négociés en bourse, vente et gestion de caisses communes, vente et gestion de fonds distincts, gestion discrétionnaire de placements, gestion de placements de clients privés, conseils en placement, gestion de placements institutionnels, courtage de fonds communs de placement, services de courtier en valeurs mobilières; services d’agence de transfert de fonds communs de placement et de caisses communes; services de planification des placements pour la retraite ainsi que conseils connexes; information et recherche sur les placements boursiers dans les domaines de la planification financière et des placements financiers; services de planification financière; conseils en placement et analyse de placements; services financiers, nommément développement, vente et gestion de fonds de remplacement; placements financiers dans les domaines de l’infrastructure, de l’immobilier et des capitaux propres; placement de fonds pour des tiers; consultation en placement de fonds; services de consultation et de conseil financiers, nommément services d’analyse et de recherche financières; commandite financière d’évènements culturels pour des tiers, nommément de pièces de théâtre, de films, de prestations de musique et de spectacles de danse, de festivals de théâtre, de films, de musique et de danse, ainsi que d’expositions d’œuvres d’art et de musée; commandite financière de festivals de films pour des tiers; services d’organisme de bienfaisance ayant trait à la collecte de fonds, commandite ayant trait à la collecte de fonds; commandite de programmes éducatifs dans le domaine des affaires; commandite financière de recherche médicale
(2) Services éducatifs dans les domaines de l’économie, de la planification financière et des stratégies de placement; services éducatifs, nommément tenue de cours, de conférences et d’ateliers dans les domaines de la planification de placements, de la planification de la retraite, des stratégies de placement et des stratégies de planification financière; tenue de séminaires dans le domaine de planification successorale et de la retraite
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Comparutions et agents inscrits au dossier
DATE DE L’AUDIENCE : 2024-10-23
COMPARUTIONS
Pour la Requérante : Sandra Wright
AGENTS INSCRITS AU DOSSIER
Pour la Requérante : Sandra Wright (Infuse Works Inc.)